Bureaux, logements, commerces, infrastructures… la Cloche d’Or pousse sur plusieurs fronts. Ses promoteurs, qui veulent éviter «l’effet Kirchberg», déplorent une certaine lenteur administrative. En coulisse, le combat judiciaire autour des terrains se poursuit.

Rendez-vous au centre commercial Cloche d’Or. Direction le 13e étage d’une des tours jumelles Zenith, qui le surplombent. L’endroit figure parmi les points de vue panoramiques de la capitale qui sont sortis de terre ces cinq dernières années.

Au loin, se dressent justement le Kirchberg et ses tours récentes (CJUE), et de . Le quartier d’affaires imaginé par les pouvoirs publics poursuit aussi sa mue pour devenir un véritable lieu de vie et d’intégration des différents moyens de transport et de déplacement, là où le «tout-voiture» régnait en maître.

Les développeurs-promoteurs privés du Ban de Gasperich qui avaient invité la presse mardi 3 mars pour un point général sur les travaux entamés en 2012 veulent justement éviter la comparaison entre les deux quartiers. L’équipe de Grossfeld PAP tient en effet à mettre en avant les spécificités du site de 80 hectares, dont le master plan remonte à 2004.

Une vue aérienne de la Cloche d’Or. (Illustration: Grossfeld PAP)

Une vue aérienne de la Cloche d’Or. (Illustration: Grossfeld PAP)

Un site qu’il ne faut d’ailleurs plus nommer «Ban de Gasperich», du nom de ce lieu-dit champêtre où il a vu le jour. «Ce n’est pas une exploitation agricole», lance Michel Knepper, directeur des opérations de Grossfeld PAP, la société en charge du développement du quartier qui est détenue par Promobe (du groupe Becca) et par le belge Extensa.

«Nous nous sommes mis d’accord avec la Ville de Luxembourg (à l’été dernier, ndlr) pour que l’ensemble de la zone s’appelle le quartier Cloche d’Or. Dans les prochains mois, en collaboration avec les Ponts et Chaussées, une signalisation sera mise en place au départ de l’autoroute pour que le quartier soit visible tout simplement en tant que Cloche d’Or à l’avenir.»

Michel Knepper et les équipes de Gossfeld n’excluent pas une évolution à la hausse du nombre de logements. (Photo: Anthony Dehez)

Michel Knepper et les équipes de Gossfeld n’excluent pas une évolution à la hausse du nombre de logements. (Photo: Anthony Dehez)

Un trio de bureaux

Depuis le penthouse de la tour résidentielle, le futur acheteur (prix indiqué sur internet à 2.062.143€ pour un penthouse de 131m² au 12e étage) pourra apercevoir le parc de 15 hectares . «Le double du parc municipal au boulevard Prince Henri», notait Michel Knepper.

De la tour, on aperçoit aussi les équipes d’ouvriers qui œuvrent en plein air. Ils étaient jusqu’à 3.000 simultanément au moment de la construction du centre commercial, . Ils sont actuellement entre 700 et 800 sur plusieurs sites.

Tout d’abord,, situé entre les QG de et d’ et qui est développé par le groupe Becca sur 6.000m². Il sera livré en juin de cette année.

Trois chantiers sont aussi en cours derrière l’immeuble de Deloitte. Un premier bureau d’«office center» construit pour le compte de Regus dans lequel seront proposés des espaces de coworking . Livraison prévue pour janvier 2022.

5.000m² de bureaux sortent aussi de terre pour l’État, afin d’y placer des équipes du ministère de la Santé, ainsi que l’Administration du cadastre. Livraison prévue pour novembre 2021.

Le dernier du trio de chantiers concomitants débutera en juin prochain. L’immeuble baptisé «Darwin» accueillera plusieurs occupants sur 5.000m².

Voici pour le côté nord.

Côté sud, face à Deloitte, au croisement des boulevards Raiffeisen et Kockelscheuer. L’immeuble résidentiel «Weierbach» de 151 appartements et 19 commerces va aussi devenir réalité. «Outre le centre commercial, notre ambition est de proposer des commerces en pied d’immeuble du côté du quartier sud. Nous voulons en faire un véritable quartier de vie, même le soir», ajoute Michel Knepper.

Nous ne voulons pas faire de résidence uniquement pour les coûts modérés.

Michel Knepperdirecteur des opérationsGrossfeld PAP

Un millier de personnes habitent actuellement à la Cloche d’Or, selon Promobe, qui a livré en janvier 2018 les premiers appartements . Les dernières livraisons du A3 sont prévues pour ce mois de mars. Soit 890 unités de logement jouxtant le futur parc.

Prix moyen au mètre carré annoncé mardi: 8.900 euros, «en dessous d’autres projets qui se font en ville», souligne . Le promoteur veut se laisser une marge de manœuvre pour ajouter d’autres éléments résidentiels.

Les plans prévoient actuellement pour 6.000 habitants parmi les 25.000 utilisateurs du quartier d’ici 2025, répartis entre 15% de commerce, 55% de bureaux et 30% d’habitations.

Selon une convention passée avec la Ville, 10% des surfaces habitables sont réservées pour du logement affichant un prix de vente inférieur à environ 20% du prix du marché. «Nous voulons proposer du logement à coût modéré à la même qualité et dans les mêmes bâtiments, nous ne voulons pas faire de résidence uniquement pour les coûts modérés», pointe Michel Knepper.

En attendant le tram…

La mobilité reste un enjeu pour le quartier. Grossfeld a investi 40 millions d’euros dans les infrastructures, comme convenu avec la Ville de Luxembourg.

La genèse du premier immeuble, le siège de PwC , avait révélé combien le planning était clé pour faire en sorte que les infrastructures routières suivent le même rythme. Récemment, les critiques ont été nombreuses sur la sécurité des déplacements à pied entre Howald et la Cloche d’Or.

Du côté des promoteurs qui dépendent de l’agenda des travaux publics, on préfère regarder vers l’avenir et souligner la volonté initiale de faire du quartier un lieu exemplaire en matière de mobilité, avec des voies pour cyclistes et piétons. L’arrivée du tram d’ici 2023, en même temps que la finalisation de la gare de Howald, doit permettre un bond en avant.

«Le tram s’arrêtera à la gare de Howald, il y aura aussi un arrêt entre le centre commercial et le Lycée Vauban, et un troisième sur le boulevard de Kockelscheuer, en face du siège de PwC. Il se dirigera ensuite vers le terminus au niveau du nouveau stade national», précise Michel Knepper.

Une longue marche

«La Ville a été très réactive en fonction des demandes et de l’évolution du quartier pour adapter les lignes de bus», précisait Michel Knepper. «Sept lignes de bus desservent aujourd’hui le quartier.»

Une manière de préciser que les autorités jouent le jeu sur le plan de la mobilité. Mais Flavio Becca pointait aussi combien il était difficile de concrétiser un quartier sans devoir ronger son frein quant aux lenteurs et lourdeurs administratives.

«Nous pensons un peu plus vite que le gouvernement, respectivement les communes», lançait Flavio Becca. «Depuis 15 ans, il est question de simplification administrative, sans qu’elle soit devenue une réalité», ajoutait l’homme d’affaires en substance.

Aux tracasseries administratives s’ajoute un différend entre les deux associés, Flavio Becca et . Les deux hommes d’affaires avaient regroupé leurs forces autour du fonds Olos pour y loger des terrains et des immeubles du «Ban», pour un montant estimé à près de 700 millions d’euros. Au cœur de la bataille devenue judiciaire: la répartition équitable des actifs entre les deux parties.

En juillet dernier,  en tranchant en faveur d’une répartition à 50% entre les deux parties, alors que M. Becca défend un apport de 90% des actifs immobiliers et plaide pour une répartition suivant cette proportion.

Interrogé en marge de la visite de presse de mardi, Flavio Becca a confirmé s’être pourvu en cassation de ce jugement de la Cour d’appel. La Cour statuera en octobre prochain. Suite au prochain épisode.