La ministre de la Justice compte ramener les représentants des pouvoirs législatif et judiciaire à des relations plus calmes. (Photo: Jan Hanrion/Archives Maison Moderne)

La ministre de la Justice compte ramener les représentants des pouvoirs législatif et judiciaire à des relations plus calmes. (Photo: Jan Hanrion/Archives Maison Moderne)

La ministre de la Justice appelle au retour au calme dans les relations entre la Justice et la Chambre des députés après plusieurs semaines de vives tensions épistolaires et médiatiques.

Officiellement investie ,  (Déi Gréng) doit déjà jouer au pompier pour tenter d’apaiser les tensions croissantes entre les représentants de la justice et la Chambre des députés.

Interrogée par Paperjam, la ministre de la Justice veut faire la part des choses dans les différentes discussions en cours. Concernant la lettre du procureur général d’État, , répondant en juillet dernier au député  (CSV) qui lui signalait de possibles malversations au sein du Film Fund, «je pense que le procureur général d’État avait raison de demander l’origine du document, non pas pour savoir qui l’avait communiqué, mais pour pouvoir se faire une idée si le document avait été obtenu de manière licite ou non». En effet, l’obtention illicite d’une preuve «aurait risqué d’annuler toute la procédure par la suite». Toutefois, «il y a eu une incompréhension de part et d’autre», reconnaît la ministre, soulignant que Martine Solovieff avait précisé sur RTL lundi qu’«elle ne voulait en aucun cas mettre en doute» l’opportunité de la déclaration du député, «mais qu’elle devait s’assurer de l’origine du document».

La mise au point de la magistrate n’avait vraisemblablement pas suffi au CSV puisque le député évoquait encore mardi matin sur RTL l’«intimidation» dont les députés seraient la cible. La chef de fraction chrétienne-sociale, , rappelait de son côté l’arrêt Gibéryen – le député ADR avait été blanchi en juin dernier pour ne pas avoir signalé des écoutes illégales par le Srel et ne pas avoir cité sa source. Sur ce point, le procureur général d’État peut compter sur le soutien de la ministre de la Justice. «Je comprends absolument sa démarche», souscrit la ministre Déi Gréng.

C’est à moi, ministre de la Justice, qu’il appartient de dire où sont les limites de la séparation des pouvoirs.
Sam Tanson

Sam Tansonministre de la Justice

C’est moins le cas au sujet de l’autre lettre qui a fait la une des médias ces dernières semaines, à savoir , , au président de la Chambre des députés, (DP), le 21 août dernier – mais portée à la connaissance de l’opinion publique le 16 octobre dernier.

«Ce volet est très délicat», avance Mme Tanson, rappelant que le système démocratique consacre le principe de la séparation des pouvoirs entre «celui qui fait les lois, celui qui les exécute et celui qui contrôle leur application», mais une séparation qui n’empêche pas une «certaine interdépendance» entre ces pouvoirs puisqu’aucun ne peut exister indépendamment des autres. «Il est très important de ne pas empiéter sur un autre pouvoir, par exemple que le pouvoir législatif ne s’immisce pas dans les affaires de la justice en ce qui concerne l’exercice du pouvoir judiciaire» et inversement.

«Le fait de mettre en cause l’opportunité d’une question ou le fait que le président de la Chambre laisse passer une question est quand même à mes yeux malencontreux», estime Mme Tanson en pesant ses mots. «J’estime que l’opposition et tous les députés font leur devoir en posant des questions parlementaires. C’est à moi, ministre de la Justice, qu’il appartient de dire où sont les limites de la séparation des pouvoirs.»

Il est maintenant important de revenir à la sérénité pour que les institutions puissent fonctionner ensemble de manière calme et sereine sans avoir l’impression que l’autre empiète sur ses plates-bandes.
Sam Tanson

Sam Tansonministre de la Justice

Il ne faut toutefois pas y voir un désaveu de Mme Solovieff. «Je pense que ce dont se plaignaient surtout Mme Solovieff et M. Wiwinius, c’est le fait qu’une question parlementaire mettait en cause l’honorabilité du procureur général d’État en se basant sur des informations issues de messages postés sur Facebook, c’est la goutte qui a fait déborder le vase alors que le contexte était déjà bien échauffé», tempère Mme Tanson. «Il est maintenant important de revenir à la sérénité pour que les institutions puissent fonctionner ensemble de manière calme et sereine sans avoir l’impression que l’autre empiète sur ses plates-bandes.»

Le ministère de la Justice en période d’inventaire

La ministre se garde bien de tancer l’opposition – qui en ressortant un courrier de Mme Solovieff datant du mois de juillet pourrait être soupçonnée d’attiser les tensions avec la justice –, préférant exposer les efforts de son administration pour résoudre les difficultés mises au jour par l’affaire du «casier bis». «Il est primordial d’essayer de nous donner les règles nécessaires à la protection des données des citoyens. Nous sommes en train de dresser la liste de tous les domaines dans lesquels je dois donner mon agrément sur la base d’un contrôle d’honorabilité (agents de sécurité, asbl s’occupant d’adoption…). Pour ces lois et pour le recrutement au sein de la magistrature [comme le référendaire-bibliothécaire »], je pense qu’il est primordial de créer un cadre légal afin que tous les citoyens sachent dans quelles circonstances sont utilisées leurs données. Le recours au casier judiciaire est-il suffisant ou faut-il consulter le fameux , dont l’encadrement doit être très clair?»

Là encore, la ministre en appelle à des «discussions dans la sérénité», à l’image de celles qui ont déjà lieu dans le groupe de travail interministériel réunissant des agents des ministères de l’Intérieur et de la Justice. Le vice-Premier ministre et ministre de l’Intérieur, (Déi Gréng), a promis un texte réglant l’utilisation des banques de données .