Doit-on s’inquiéter de l’abandon de l’implantation de l’usine Fage pour l’industrie et l’emploi dans le pays?
– «Créer des emplois est-il un objectif en soi? Posons la question. Car cela est lié au besoin de croissance. Et avec cette croissance, ce modèle, où veut-on aller? Un ou deux millions d’habitants? Déjà, nous n’arrivons pas à loger les 650.000 résidents que nous sommes, donc c’est une fuite en avant.
Si une industrie n’a pas de réelle valeur ajoutée et est très utilisatrice de ressources, alors il faut voir le problème de manière systémique et holistique et ne pas juste le réduire à 100 emplois et des revenus fiscaux.
Quelles conclusions devons-nous tirer de cette expérience?
«Je crois qu’un entrepreneur a besoin d’un cadre clair, dans lequel il peut choisir de développer son entreprise ou non. Pour une entreprise, c’est important. Ce n’est pas possible de laisser les entrepreneurs dans des incertitudes comme celles-là, de l’annoncer deux ou trois ans après.
Il est donc fondamental que l’entreprise ait un cadre clair, et qu’on se pose la question: Qu’est-ce qu’on veut? Qu’est-ce qu’on ne veut pas? Et aussi, qu’est-ce qu’on peut? Car on ne peut pas tout faire, il y a des régions davantage prédisposées que d’autres pour certaines activités.
Si on déclare l’eau potable, ou l’air qu’on respire, ou la terre qu’on cultive comme un bien commun qui est disponible prioritairement à ses citoyens, alors c’est clair.
Mais ce principe n’est aujourd’hui pas clairement inscrit dans une stratégie qui permette à l’entreprise de le savoir dès le début.
L’implantation d’une industrie verte est-elle possible dans le pays selon vous?
«Il existe énormément d’industries qu’on peut attirer au Luxembourg et qui sont compatibles avec l’économie verte. Des industries qui exercent moins de pression sur les ressources, qui sont dans le recyclage, dans la réutilisation ou qui, dans leur processus de fabrication, ne font pas de destruction de matière première, de ressources vitales pour le citoyen.
Cela est possible dans plein de secteurs: la permaculture, le bâtiment, la mobilité – qui est un réel sujet pour tout le monde –, dans la recherche ou dans le secteur de l’investissement financier, dont on parle déjà beaucoup mais dans lequel on peut aller plus loin encore et prendre un lead réel.
Je pourrais donner plein d’exemples, mais je ne veux pas en exclure. En dehors des industries hypercarbonées, pour lesquelles il est difficile d’intégrer la logique de l’économie verte, chaque industrie peut potentiellement avoir un modèle vert. Personne n’est au départ exclu.»