Le discours du Premier ministre était un bon discours, un discours complet qui mettait en évidence les défis que doit relever le pays et donnait les bonnes pistes à suivre estimaient , chef de fraction du CVS et , chef de la fraction DP. Une vision pas forcément partagée par l’opposition.
«Un discours qui manquait d’honnêteté intellectuelle et qui tenait du recyclage» pour (déi Gréng) qui regrettait l’absence d’éléments nouveaux et inspirant. Un discours sans surprises pour (LSAP) qui déplore l’absence d’annonces relatives à une politique globale de lutte contre la pauvreté. «l’aumône n’est pas une politique», a -t-elle insisté. Pour (Piraten), le discours de tenait de l’exercice «d’annonces d’annonces. Je n’ai pas vu de substance. J’ai l’impression que ce sont les annonces qui devaient primer. Plus que l’état de la nation, c’est à l’état des travaux en cours que nous avons été conviés».
Un commentaire qui souligne l’aspect figé et convenu de l’exercice. «Un peu old school» pour (déi Gréng) qui suggère de remplacer cet exercice par un autre expérimenté au Royaume-Uni: l’adresse au Premier ministre. Celui-ci se rends régulièrement devant les députés et doit répondre à toutes les questions posées sur l’état du pays. Un exercice d’une autre volée.
À la tribune, les partis se sont livrés à une sorte de contre-exercice: la présentation de l’état de leurs revendications. Deux sujets ont particulièrement donné lieu à des échanges vifs entre députés: l’état réel du dialogue social au Luxembourg et les effets de la réforme des pensions.
Retraites: inévitable et injuste
La question de la réforme des pensions et ses conséquences a été une source de controverse et d’affrontement verbal entre les députés. Une réforme inévitable d’un côté de l’échiquier politique, une injustice pour l’autre.
Pour Marc Spautz, cette réforme est nécessaire. Et pour le justifier, il convoque sondages «75% des personnes jugent une réforme des pensions importante» et . Il a mis en avant la large consultation menée par la ministre de la Sécurité sociale , «la ministre a discuté non seulement avec les patrons et les syndicats, mais aussi avec les jeunes, ceux qui seront les plus concernés et les plus payés». Des concertations qui ont permis le maintien de l’âge légal à 65 ans, des «baby years» et des années d’études. Chahuté sur les conséquences concrètes des annonces concernant l’allongement de la durée de cotisation, il a dénoncé les calculs «fantaisistes» des uns et des autres et a indiqué que la ministre répondra à toutes ces interrogations en commission. Une date de réunion devrait être annoncée rapidement.
Gilles Baum souligne également la nécessité d’une réforme et soutient le projet du gouvernement, notamment la possibilité d’entrer progressivement en retraite. Et il donne également rendez-vous en commission pour les détails. (déi Lénk) a lui critiqué une réforme qui revient à «travailler plus pour ne pas perdre de l’argent», une réforme qui se fait au détriment des jeunes et des actuels pensionnés.
Du côté du LSAP, la réforme de pensions constitue un casus belli. évoque une durée de cotisation qui passerait de 40 années à 42,5 années et qui du coup ne garantirait plus un âge de départ effectif à 65 ans. Taina Bofferding souligne l’impact qu’aura cette réforme sur les jeunes, «des jeunes qui devront travailler plus longtemps pour recevoir moins. Ils profiteront moins du système que les générations précédentes». Ce qui pour Taina Bofferding met en cause le principe de justice intergénérationnelle. «C’est un recul sociétal», insiste-t-elle. Elle est sur ce point en phase avec (ADR) pour qui cette réforme va se faire «sur le dos des jeunes». «Les jeunes seront les grands perdants de cette réforme, ce qui n’est pas très correct.» Taina Bofferding demande une hausse des pensions de 300 euros.
Pour Sam Tanson (déi Gréng), de nombreuses questions concrètes demeurent sur la mise en œuvre de la réforme, et se pose la question si, de facto, l’augmentation de la durée de cotisation ne va pas obliger les gens à travailler au-delà de 65 ans. C’est surtout la question du financement qui la chagrinait, et plus particulièrement la possibilité évoquée de puiser dans les recettes de la taxe CO2. Des recettes prévues à l’origine pour financer la transition écologique. Une critique reprise par Tania Bofferding.
Dialogue social: rendez-vous ce 28 juin
Controverse également concernant l’état du dialogue social. Luc Frieden l’a affirmé: le dialogue social va bien au Luxembourg. Les syndicats n’ont pas le même ressenti. OGBL, LCGB et CGFP jugent le dialogue social «au point mort». Reprenant le Premier ministre au bond sur sa vision selon laquelle le dialogue social n’est pas un processus de codécision, ils mettent en avant que le modèle social luxembourgeois repose sur la recherche de compromis entre les partenaires sociaux.
La question de la qualité du dialogue social, les députés l’ont également évoquée. Marc Spautz estime qu’il reste «essentiel et décisif pour la paix et la cohésion sociale» qu’il se porte bien – contrairement à ce qu’affirme l’opposition, a-t-il insisté – et il a souligné le fait que le Premier ministre ait organisé «régulièrement» des réunions sociales «hors de la vue des caméras» pour trouver des compromis. Et il se félicite que le Premier ministre souhaite davantage de dialogue social à l’avenir. Revenant sur les dossiers qui fâchent, le travail du dimanche, la négociation des conventions collectives, il rappelle que ce sera aux députés de trancher. Et que des compromis peuvent se trouver grâce au travail en commission.
(LSAP) a douté de la qualité du dialogue social mis en avant par Luc Frieden. Tout comme Taina Bofferding (LSAP) qui estime que Luc Frieden gouverne «avec un cœur froid». «Le dialogue social est sous pression et les partenaires sociaux sont mis devant le fait accompli. Le LSAP se tiendra au côté des syndicats», a-t-elle affirmé. «Le Premier ministre parle d’un bon dialogue social, mais cela ne correspond pas à la réalité perçue par les syndicats», commente Sam Tanson pour qui «les messages entendus par le gouvernement ne sont pas les mêmes que ceux que j’entends sur le terrain». Ce qu’elle perçoit de la situation? «Une situation conflictuelle inédite.»
Le terrain justement, il aura l’occasion de se faire entendre ce 28 juin lors de la. Une journée dont le déroulement sera scruté aussi bien par le gouvernement que par les députés de tous bords.
Le mot de la fin est allé à Luc Frieden. Faisant écho à la réflexion de Seric Mehovic évoquée plus haut, il s’est demandé s’il ne fallait pas repenser l’exercice et le temps de parole . «Neuf heures de débat, c’est long.» Ce qui a suscité un mouvement de mécontentement de Francine Closener (LSAP) qui a rappelé que l’organisation des débats est une compétence de la Chambre des députés. Sur le fond, le Premier ministre est resté droit dans ses bottes.