Les gouvernements ont certes mobilisé des montants faramineux pour soutenir les entreprises et les ménages – 16.000 milliards de dollars selon l’AIE –, mais seulement 2% du total est consacré à la transition énergétique. (Illustration: Maison Moderne)

Les gouvernements ont certes mobilisé des montants faramineux pour soutenir les entreprises et les ménages – 16.000 milliards de dollars selon l’AIE –, mais seulement 2% du total est consacré à la transition énergétique. (Illustration: Maison Moderne)

À l’échelle internationale, les plans de relance post-Covid n’accordent qu’une très faible part – 2% environ – à la transition verte. Un niveau très insuffisant pour espérer atteindre la neutralité carbone d’ici 2050. Le problème est que seuls les pays riches se permettent une relance verte.

Avec les plans de relance post-Covid actuels, les émissions de gaz à effet de serre (GES) dans le monde devraient atteindre de nouveaux records en 2023, et continuer d’augmenter les années suivantes, selon une analyse de l’Agence internationale de l’énergie (AIE) publiée le 15 juillet. «Non seulement les investissements dans les énergies propres sont très loin de placer le monde sur le chemin de la neutralité carbone au milieu du siècle, mais ce n’est même pas suffisant pour éviter que le niveau global d’émissions n’atteigne un nouveau record», s’inquiétait le directeur de l’AIE, Fatih Birol, suite à ce constat.

En cause, la faible importance des mesures dédiées à la transition énergétique dans les plans de relance. Les gouvernements ont certes mobilisé des montants faramineux pour soutenir les entreprises et les ménages – 16.000 milliards de dollars selon l’AIE –, mais seulement 2% du total est consacré à la transition énergétique.

Le constat avait d’ailleurs été similaire quelques mois plus tôt dans une étude publiée le 10 mars par le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE) et l’université d’Oxford: sur les 14.600 milliards de dollars consacrés à la réponse à la crise du Covid, seuls 368 milliards de dollars – soit 2,5% du total des dépenses – étaient consacrés à des initiatives de relance verte, évaluait le rapport intitulé «Are we building back better?».

Une relance verte inégalitaire

Surtout, les deux études s’accordent sur un autre point inquiétant: les mesures dédiées à la relance verte ont été exclusivement annoncées par un petit groupe de pays riches – les mêmes qui ont pu se permettre de mettre en place des plans de relance généreux.

C’est d’ailleurs le cas de l’Union européenne. pose une condition à l’octroi des subventions européennes aux États membres: que leur plan de relance national consacre au moins 37% des aides à des mesures vertes.

Le Luxembourg fait d’ailleurs figure de bon élève: 61% des sont consacrés à des mesures vertes. Dans son évaluation du plan de reprise et de résilience (PRR) du Luxembourg publiée le 18 juin, la Commission a ainsi conclu que celui-ci «devrait, dans une large mesure, jouer un rôle majeur dans la transition verte» du pays, une part importante des investissements étant «axée sur la transition climatique et énergétique».

53% dédiés au vert

Toutefois, le FRR – à savoir – ne constitue que la moitié des 183 millions d’euros du PRR, le plan de relance dans son ensemble. L’État luxembourgeois prend en charge l’autre moitié.

En considérant l’intégralité du PRR luxembourgeois, ce sont finalement près de 97 millions d’euros, soit environ 53% du PRR, qui sont dédiés à des initiatives vertes. Et ces 97 millions sont quasi exclusivement consacrés à deux projets.

Tout d’abord, 51 millions seront versés au titre du projet «Neischmelz» à Dudelange. Ce projet d’écoquartier, soit bien avant la pandémie, sera désormais financé à hauteur de 24 millions d’euros par l’UE, avec l’objectif de créer 1.000 logements alimentés par de l’énergie renouvelable.

63,07 millions d’aides «Neistart»

40 millions seront par ailleurs consacrés à un régime d’aides pour favoriser l’installation de bornes de recharge pour véhicules électriques, dont 30,5 millions seront pris en charge par l’UE. Ce qui laisse 13 millions consacrés au régime d’aides «Naturpakt» en faveur de la biodiversité (avec une contribution de 6 millions versés par l’UE), dont 40% sont considérés par l’UE comme des mesures vertes effectives.

Le PRR n’est pas le seul outil de relance verte auquel a eu recours le Luxembourg. Si le gouvernement est fier (soit 18,6% du PIB) en mesure de soutien étatique pour faire face à la crise – chômage partiel et aides aux entreprises – et plus de 3 milliards en investissements publics, il a aussi mis en place

À destination des entreprises, ce programme propose des aides à l’investissement dont le niveau de soutien est plus élevé en matière de digitalisation, d’environnement ou d’économie circulaire. «Un succès formidable!», s’est réjoui récemment le ministre de l’Économie, (LSAP), Mis en place en juillet 2020, ce programme avait permis, à la date du 21 mai 2021, de verser 63,07 millions d’euros en réponse à 219 demandes d’aides.

1.000 milliards nécessaires

Mais si les pays riches, dont le Luxembourg, peuvent se permettre de verdir leur plan de relance, l’écueil reste que les efforts des seuls pays riches ne suffiront pas pour limiter à 2°C la hausse des températures par rapport au niveau préindustriel – objectif fixé par l’accord de Paris. Et les niveaux de dépenses globaux accordés aux mesures vertes devront être sérieusement revus à la hausse: selon l’AIE, si seulement 350 milliards de dollars ont été pour le moment consacrés à la relance verte, il faudrait que ce montant atteigne 1.000 milliards pour permettre de se donner une chance d’atteindre les objectifs de l’accord de Paris.

Pour compenser les inégalités, la solidarité internationale est inévitable, avec «la fourniture vitale de financement par les économies avancées aux pays en développement», insiste Fatih Birol. Dans ce sens, le ministère de l’Environnement luxembourgeois a présenté, lundi 26 juillet, sa stratégie pour le financement climatique international (FCI), avec une enveloppe de 200 millions d’euros en direction des pays en développement pour la période 2021-2025 – un montant en hausse par rapport aux 120 millions de la période 2014-2020.