Xavier Bettel a tenté de satisfaire tout le monde en concluant qu’«il faut soutenir le luxembourgeois, sans nuire au multilinguisme» et que «soutenir le luxembourgeois ne veut pas dire qu’on veut nuire au multilinguisme». (Photo: Eric Chenal/archives)

Xavier Bettel a tenté de satisfaire tout le monde en concluant qu’«il faut soutenir le luxembourgeois, sans nuire au multilinguisme» et que «soutenir le luxembourgeois ne veut pas dire qu’on veut nuire au multilinguisme». (Photo: Eric Chenal/archives)

Deux pétitions sur la langue luxembourgeoise étaient débattues ce lundi après-midi, lors d’une séance publique des commissions parlementaires des pétitions et des institutions. La pétition publique 698, qui demande que le luxembourgeois devienne la première langue officielle du Grand-Duché, avait récolté près de 15.000 signatures. Soit presque trois fois plus que la pétition publique 725 demandant que le luxembourgeois ne soit pas la première langue.

«Ma langue maternelle m’est sacro-sainte.» C’est avec ces mots, prononcés en luxembourgeois, que l’auteur de la pétition pour le luxembourgeois (698), Lucien Welter, a conclu le premier débat. À son côté, entre autres, Daniel Rinck, un activiste sur internet, qui depuis 2013 réclame des nouvelles élections. Les deux hommes ont à plusieurs reprises évoqué leur crainte que le luxembourgeois finisse par disparaître. Tandis qu’ils ont été rejoints dans cette crainte par le député du parti conservateur ADR Gast Gibéryen, les autres députés ont évoqué les dernières statistiques, selon lesquelles la langue luxembourgeoise n’aurait jamais autant été parlée qu’aujourd’hui.

T’ass keng Sau, déi et ka schreiwen.

Lucien Welter, auteur de la pétition 698

Lucien Welter a tout de même demandé plus de place au luxembourgeois dans l’enseignement. Actuellement, les élèves au lycée auraient «13 fois plus de cours d’allemand ou de français que de cours luxembourgeois» et à cause de ça, selon lui, «pas un chat ne sait écrire le luxembourgeois» (en luxembourgeois: «T’ass keng Sau, déi et ka schreiwen»). Le principal auteur de la pétition 698 a par ailleurs critiqué que les élèves luxembourgeois apprennent les maths d’abord en allemand à l’école primaire, puis en français au lycée.

Des doutes quant à une augmentation des cours de luxembourgeois, au détriment logique des autres langues (allemand, français, anglais), ont été exprimés notamment par le député Claude Adam (Déi Gréng): «Dans l’état des choses actuel, il faut sérieusement se poser la question.» Selon lui, apprendre les langues étrangères serait plus important pour permettre par exemple d’étudier à l’étranger.

Le Premier ministre a, quant à lui, souligné que son gouvernement a introduit l’apprentissage multilingue précoce dans les crèches, et qu’à partir de la prochaine rentrée, une option en langue luxembourgeoise serait introduite dans les lycées.

Motifs nationalistes

Xavier Bettel a tout de même reconnu l’importance du luxembourgeois et rappelé que son gouvernement étudie en ce moment la possibilité de demander la reconnaissance de la langue en tant que langue officielle au niveau de l’Union européenne. La grande majorité des députés et le Premier ministre ont en revanche exprimé des doutes quant à la rédaction de lois en luxembourgeois. Tandis que les auteurs de la pétition 698 ont admis que cela «ne pourrait pas être fait du jour au lendemain», les députés ont estimé que le vocabulaire luxembourgeois ne serait pas assez riche pour donner la «sécurité juridique» nécessaire.

Les auteurs de la pétition 725, réaction contre la pétition 698, ont quant à eux averti contre les motifs «nationalistes» qui alimentent une certaine «recherche d’identité». Pour les deux auteurs, Joseph Schloesser et Henri Werner, l’identité ne se limiterait pas à la langue. L’identité se définirait selon eux également par la géographie et la culture. Si le succès de la pétition en faveur du luxembourgeois serait, selon les auteurs, dû à un malaise envers le français, il importerait de signaler que le français était présent sur le territoire grand-ducal depuis des siècles et ferait donc partie de l’identité nationale.

Suite aux deux débats contradictoires, le Premier ministre a tenté de satisfaire tout le monde en concluant qu’«il faut soutenir le luxembourgeois, sans nuire au multilinguisme», mais qu’à l’inverse, «soutenir le luxembourgeois ne veut pas dire qu’on veut nuire au multilinguisme». Pour finir, il a rappelé qu’à l’étranger, les Luxembourgeois seraient admirés pour leur multilinguisme.