Mobilité, commerce, travaux... Voici quelques-uns des thèmes abordés avec l’échevin de la Ville de Luxembourg. Il était ce jeudi l’invité de la rédaction de Paperjam afin de partager un petit-déjeuner.

Cela fait 20 ans que  (DP) est entré en politique. Un peu par hasard. «J’étais malade, et je me suis rendu chez le docteur  (DP). Il m’a expliqué que le DP, qui avait gagné les élections en juillet 1999, cherchait de nouveaux visages pour les scrutins suivants, et il ne m’a plus lâché!», confesse-t-il. Finalement, il se lance. «Mais je ne viens pas d’une famille ‘politique’, je n’ai donc pas été de suite en ordre utile. C’est au fil des scrutins que j’ai figuré de plus en plus haut sur les listes.»

Un mi-temps qui l’occupe quasi à plein temps

Il est élu en 2009, devient échevin en 2013 et l’est resté depuis lors. Ses compétences sont larges: mobilité, environnement, Service espaces publics, fêtes et marchés, intégration pour personnes à besoins spécifiques... Sous sa responsabilité, on compte une petite armée d’agents municipaux. «Le Service des bus compte environ 500 personnes, le Service hygiène approche des 400 agents et le Service circulation emploie environ une centaine de personnes», note-t-il.

Officiellement, son poste d’échevin est un mi-temps professionnel. Mais dans la réalité, «c’est quasi 100%. Cela devient assez compliqué, notamment au niveau de la fiduciaire que j’ai créée en 2006. Beaucoup de clients veulent que je m’occupe moi-même de leur dossier, mais j’ai de moins en moins de temps.» Ce père de trois enfants essaye cependant d’«être à la maison entre 18h et 20h, pour aller chercher les enfants au sport, et tout cela. C’est aussi important.»

Celui qui est toujours trésorier de son parti a pris goût à la politique. Attaché à sa ville, pourrait-il avoir des ambitions nationales? «J’avoue que ce serait compliqué de concilier cela avec mon travail d’échevin à Luxembourg. Techniquement, je pense avoir les compétences, mais faire les deux me semble impossible. Je suis content de ne pas devoir assumer cela pour le moment. Ministre? La question ne se pose pas, et personne ne me l’a demandé. Mais être élu demeure toujours un honneur.»

Cela fait 10 ans qu’on demande des pôles d’échange afin d’éviter que les bus RGTR entrent dans la ville.
Patrick Goldschmidt

Patrick Goldschmidtéchevin de la Ville de Luxembourg

Il est vrai que le travail ne manque pas au niveau local, notamment dans le domaine de la mobilité. La cohorte de ceux qui se plaignent de l’engorgement de Luxembourg-ville ne cesse de grossir. «On fait des choses, mais on est et on restera toujours à la traîne. Il est vrai aussi que, d’un côté, on se plaint des embouteillages, mais de l’autre, on veut une économie qui tourne», souligne Patrick Goldschmidt.

Qui doit souvent travailler avec le ministère de la Mobilité. Que pense-t-il de l’action de  (Déi Gréng), le ministre titulaire? «Il fait ce qu’il peut. Je suis content de beaucoup de choses. Moins content d’autres, notamment le réseau de bus extra-urbain. Cela fait 10 ans que Luxembourg demande qu’il y ait des pôles d’échange pour éviter que les bus RGTR entrent dans Luxembourg. On devrait tenir compte beaucoup plus de ce dont les gens ont vraiment besoin», avance encore l’échevin.

«On va inaugurer un nouveau stade national... sans parking. C’est quand même incroyable», relève Patrick Goldschmidt. (Photo: Romain Gamba)

«On va inaugurer un nouveau stade national... sans parking. C’est quand même incroyable», relève Patrick Goldschmidt. (Photo: Romain Gamba)

Patrick Goldschmidt souligne encore que la prochaine grande échéance aura lieu début novembre quand les bus «n’iront plus avenue de la Liberté». L’échevin aimerait aussi libérer la place de la Constitution des bus touristiques. «Mais les bus vont toujours quelque part d’autre. Il faut surtout réfléchir à créer des zones où ils pourraient stationner durant les heures creuses. Le ministère avait demandé de manière informelle si cela serait possible au Glacis. Mais si on crée un parking à cet endroit, tous les bus vont venir dans cette zone déjà très fréquentée...»

Certaines autres incongruités donnent aussi des démangeaisons à Patrick Goldschmidt. Un exemple? «Le futur stade... Le ministre voulait un parking de 500 places, nous de 2.000. Résultat: on va inaugurer un stade... sans parking, car le dossier en est resté là! Il nous aurait pourtant fait du bien, en dehors des rencontres, dans l’attente de l’arrivée du tram. La mobilité, ce n’est pas que le vélo, les bus, le tram...»

Étendre le réseau Vel’oh

Néanmoins, les vélos électriques sont un succès. Les abonnés ont doublé grâce à eux. «Mais tout n’est pas parfait: des problèmes techniques existent encore, même si les plaintes baissent. Decaux est occupé à les résoudre en remplaçant des pièces. Donc, je suis heureux du succès, mais j’aurais aimé un produit techniquement plus mûr.»

Ambitieux, Patrick Goldschmidt souhaite que le nombre de stations augmente et que le réseau se développe dans Luxembourg, «notamment vers Beggen et Dommeldange». Mais aussi en dehors, puisque les demandes des communes périphériques existent. «Même [la Ville de] Kopstal est venue nous demander d’installer des Vel’oh chez elle... Des Vel’oh à Bertrange, Mamer, Hesperange, on sait que cela va s’organiser à terme.»

Les trottinettes, elles, semblent être un autre sujet. «On a reçu beaucoup de demandes de différentes sociétés qui toutes disent avoir le meilleur matériel, la meilleure solution et souvent, souhaitaient une collaboration financière, ce qui ne nous intéresse pas. On a été voir ailleurs comment cela se passait, et tout ne nous a pas convaincus. Ces sociétés doivent se conformer au Code de la route. En ce qui concerne Bird, on aurait aimé avoir un vrai contact préalable. On avait juste reçu un e-mail disant qu’ils comptaient déposer une petite flotte. Soit 250 trottinettes! Il faut réglementer l’usage sur la voie publique et aussi voir qui est compétent pour donner son accord à un dépôt de ce genre sur le trottoir. Sinon, personnellement, je n’ai rien contre les trottinettes électriques, j’en utilise d’ailleurs une moi-même.»

Il est lui-même utilisateur d’une trottinette électrique. (Photo: Romain Gamba)

Il est lui-même utilisateur d’une trottinette électrique. (Photo: Romain Gamba)

La fin des grands chantiers en cours est aussi très attendue. Ceux-ci amélioreront sans doute un peu la fluidité du trafic en ville, mais en attendant, certains commerçants souffrent. «Dans le quartier de la Gare, je pense que seulement deux commerçants, pour le moment, on introduit un dossier d’indemnisation auprès de Luxtram. C’est plus la mendicité, la drogue et l’insécurité qui suscitent des problèmes.»

Les mendiants semblent en effet de plus en plus nombreux. «Cela relève de l’échelon national. Il y a, au gouvernement, deux ministres de Luxembourg qui connaissent bien ces problèmes. Maintenant, il faut avoir le courage d’agir. La rue Louvigny est extrêmement sale à certains endroits. Certains commerçants, selon moi, doivent aussi investir et prendre des mesures pour, par exemple, fermer leur devanture. Mais il y a des limites à tout. Oui, je suis en faveur d’un périmètre dans lequel la mendicité serait interdite.»

Oui, je suis en faveur d’un périmètre dans lequel la mendicité sera interdite.
Patrick Goldschmidt

Patrick Goldschmidtéchevin de la Ville de Luxembourg

Quant à la consommation de drogue, qui entraîne les trafics et un sentiment d’insécurité dans le quartier de la Gare, , l’échevin déclare: «J’ai entendu qu’il y aurait plus de policiers. Mais si la police n’a pas les moyens nécessaires, nous ferons appel à des sociétés privées, même si leur action est limitée». La charge financière retombera alors sur la Ville, et donc les contribuables locaux. «Il en sera ainsi, en effet. On verra dans trois mois. Ce n’est pas mon domaine de compétence, mais je dis souvent à mes collègues d’aller voir là-bas afin de comprendre pourquoi les gens se plaignent.»

La saturation commerciale est atteinte

Fils de commerçants, Patrick Goldschmidt garde évidemment un œil vigilant sur ce secteur. Que pense-t-il de la récente  et du projet Royal-Hamilius, qui ouvrira ses portes dans quelques semaines? «À la Cloche d’Or, j’entends que c’est difficile pour certains commerçants. Quant à Hamilius, ce sera, selon moi, une locomotive pour les commerces du centre, pas un concurrent. Bien sûr, certains magasins ferment. Mais d’autres ouvrent, de nouvelles enseignes arrivent. . , mais ils reviendront un jour. Tout n’est pas toujours une catastrophe. Mes parents ont été commerçants dans le centre avant d’aller route de Longwy. Ils viennent de cesser leur activité. Non pas car cela ne marchait plus, mais parce qu’ils ont 74 et 76 ans...»

Par contre, Patrick Goldschmidt estime que l’offre commerciale est suffisante désormais. «Luxembourg a beaucoup gagné en population. Mais même avec cela, je pense que nous avons atteint la saturation commerciale.»