Lorsqu’il cuisine, René Mathieu puise son inspiration dans l’enfant amoureux de la nature qu’il a été...  (Photo: Mickael Williquet /  Horeca Media ) 

Lorsqu’il cuisine, René Mathieu puise son inspiration dans l’enfant amoureux de la nature qu’il a été...  (Photo: Mickael Williquet /  Horeca Media ) 

En cette semaine de mise à l’honneur de la cuisine végétale, le chef étoilé René Mathieu, élu troisième meilleur chef de légumes du monde en 2019 par le «Guide Vert» We’re Smart, se confie sur son parcours, ses envies et ses projets post-confinement...

Pouvez-vous nous raconter votre parcours?

. – «Je dirais que ça fait 45 ans que je fais ce métier! Je l’ai appris avec la vie, dès mes cinq ans, auprès de mes grands-parents dans la région de Marche-en-Famenne, en Belgique. Lui était garde-forestier, elle était cuisinière pour des familles nobles du coin. C’est eux qui m’ont appris le respect de la nature et tout ce qu’elle avait à nous apporter. J’ai commencé mon apprentissage à 13 ans; à 18 ans, je travaillais dans un collège réputé; à 20 ans j’ouvrais mon premier restaurant. Puis un second, le Capucin Gourmand, que j’ai tenu à Baillonville pendant 15 ans. C’est là que j’ai décroché ma première étoile Michelin. Par la suite, j’ai travaillé pour la cour grand-ducale avant d’arriver au Château de Bourglinster en 2005. J’y ai récupéré mon étoile au bout d’un travail de six ans, en 2011. 

La Distillerie est aujourd’hui un restaurant étoilé, troisième meilleur restaurant végétal du monde. Quelle démarche a permis cela?

«Dans une période où ‘tout fout le camp’, j’ai décidé de m’intéresser de très près aux végétaux depuis déjà des années. Je trouvais que les gens avaient perdu le sens du végétal au profit de l’animal, alors que les deux sont absolument essentiels à la recherche de l’équilibre. J’aime aller cueillir mes plantes, voir la culture de beaux légumes que je mets en valeur chaque jour dans ma cuisine. Ils possèdent tellement d’atouts et de variétés en termes de saveurs et de parfums, c’est incroyable. C’est parfois difficile de convaincre une clientèle habituée à la viande et au poisson, mais c’est aussi un beau challenge que je prends plaisir à relever. Et quand cela marche, et que les gens montrent un intérêt d’eux-mêmes pour ce que vous faites, c’est là qu’on commence à se dire qu’on va dans la bonne direction.

Quelles sont vos inspirations du quotidien pour votre cuisine?

«Si je viens d’écoles plutôt classiques comme Bocuse et Robuchon, ce sont des chefs très audacieux comme Ferran Adrià à l’époque El Bulli, mais aussi et surtout René Redzepi de Noma qui ont grandement inspiré ma cuisine d’aujourd’hui. Le chef Redzepi a beau être plus jeune que moi, il m’a donné cette envie et cette possibilité de retourner en enfance, d’aller y puiser cette force dans la nature que j’avais connue à l’époque... De vivre de peu et de vivre mieux.

Comment envisagez-vous la sortie de crise et la réouverture de votre établissement?

«Tout d’abord, j’estime être chanceux et heureux d’être au Luxembourg, où la crise a été vraiment bien gérée par les pouvoirs publics. Mais tout le monde parle du ‘jour d’après’, et je pense qu’il ne faut pas verser dans la remise en question systématique et prendre des résolutions qui ne vont durer qu’un petit temps... Pour ma part, je vais continuer à évoluer dans la direction que j’avais déjà prise, en proposant un menu 100% végétal à La Distillerie. La restera égale à elle-même, ce qui me permettra de pouvoir tout de même proposer un accompagnement de viande ou poisson sur demande exceptionnelle. J’ai une autre chance: pour les deux établissements, nous avons la place nécessaire au respect des distances de sécurité. Mais la vraie question est celle de l’expérience client, si les conditions deviennent aussi drastiques que prévu... Il va falloir travailler dur pour instaurer à nouveau la confiance et l’envie auprès de la clientèle!

Quelle serait la collaboration de rêve de René Mathieu?

«Aujourd’hui, je rêve plutôt de collaborer avec la classe politique afin d’essayer d’aller ensemble vers toujours plus d’équilibre, en prenant en compte l’expérience des gens du terrain, qu’il s’agisse du secteur horeca comme du corps enseignant par exemple, qui aurait aussi un avis intéressant à donner. J'espère pouvoir faire ça avec notre association . Et sur une note plus légère, je ne serais pas contre cuisiner aux côtés d’une personnalité que je trouve superbe: Sophie Marceau!»

 

8, rue du Château, Bourglinster

T. 78 78 78 1

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