Les ministres Carole Dieschbourg et Claude Turmes ont présenté un premier bilan de la politique climatique et énergétique du pays depuis l’adoption de la loi climat et des objectifs sectoriels de réduction des émissions de gaz à effet de serre. (Photo: SIP/Julien Warnand/archives)

Les ministres Carole Dieschbourg et Claude Turmes ont présenté un premier bilan de la politique climatique et énergétique du pays depuis l’adoption de la loi climat et des objectifs sectoriels de réduction des émissions de gaz à effet de serre. (Photo: SIP/Julien Warnand/archives)

La hausse des températures au Luxembourg (+1,6°C par rapport au niveau préindustriel) ne pourra être freinée qu’avec un redoublement des efforts pour réduire les émissions de gaz à effet de serre. Pour l’instant, le pays reste dans les clous des objectifs, mais seulement grâce à l’effet de la pandémie.

L’augmentation des , et surtout les , l’aura fait comprendre: le Luxembourg n’est pas épargné par le . Une conséquence directe de la hausse des températures qui frappe le pays: celles-ci ont augmenté de 1,6°C entre 1861-1890 et 1991-2020 – davantage que l’augmentation globale dans le monde (+1,1°C, selon le Giec).

Passé ce constat, les ministres de l’Environnement, (déi Gréng), et de l’Énergie, (déi Gréng), avaient néanmoins un motif de réjouissance lors de la présentation, mardi matin, du premier état des lieux de la politique climatique et énergétique du pays: en termes d’émissions de gaz à effet de serre (GES), le Luxembourg est dans les clous.

Avec 7,86 millions de tonnes de COéquivalent émises en 2020, la baisse est en effet de 22% par rapport à 2005. Or, selon la réglementation de l’UE – en particulier la directive 2006/49/CE –, la baisse devait être de 20% sur cette même période.

L’effet pandémie

Mission accomplie, donc? Rien n’est moins sûr, la pandémie étant passée par là. Car c’est la diminution des émissions de GES liées au transport – une conséquence directe des mesures de confinement – qui est la cause de cette victoire en demi-teinte.

De fait, au regard des années précédentes, la trajectoire des émissions de GES dans le pays ne laisse en aucun cas présager une telle baisse. Au contraire, les émissions n’ont cessé d’augmenter dans le pays depuis 2016, pour passer de 8,5 millions de tonnes de COéquivalent à 9,2 en 2019.

Avec la reprise économique, le risque d’une forte recrudescence des émissions en 2021 est donc bien réel. «Probablement, les émissions vont augmenter un peu», reconnaît, du bout des lèvres, Claude Turmes. «Mais, ce qu’il faut comprendre, c’est que nous avons réussi à mettre en place en une année une batterie de lois et d’instruments pour que l’économie luxembourgeoise se place sur le chemin de la neutralité climatique.» Or, de ce point de vue-là, «nous sommes parmi les premiers de la classe», assure le ministre.

Redoubler d’efforts

Cela ne sera pas de trop pour atteindre la neutralité climatique d’ici 2050 – et, dans un premier temps, la réduction de 55% des émissions de GES d’ici 2030. À regarder les courbes, les efforts devront en effet être redoublés.

Disparité entre secteurs

Et davantage dans certains secteurs que dans d’autres. En juillet dernier, le gouvernement a défini établis dans . Et certains semblent mieux partis que d’autres.

Si le transport – de loin le plus important émetteur de GES – a déjà entamé sa baisse, ce n’est pas le cas des autres secteurs. Le devra jouer son rôle dans un secteur qui n’a pas connu de diminution depuis 2005.

Les émissions dans le secteur de l’agriculture ont quant à elles augmenté. Très difficile à réformer, l’objectif de réduction n’est d’ailleurs ici que de 20% – les objectifs variant selon les secteurs. «Il fallait trouver un compromis qui oblige le secteur à bouger, mais qui soit réaliste par rapport à la matière première de l’agriculture dans le pays, qui est l’animal – les vaches ne sont pas des machines», explique Claude Turmes.

Dans le bâtiment, dont les émissions n’ont pas bougé en 15 ans, un «game changer» pourrait permettre d’atteindre une réduction de 64% d’ici 2030: la loi imposant que chaque nouveau bâtiment soit «zéro carbone». «Il n’y a pas d’autre loi, dans aucun pays en Europe, qui va dans ce sens d’une manière aussi conséquente», s’enthousiasme le ministre de l’Énergie, qui ajoute qu’en outre la révolution industrielle de la pompe à chaleur pourra jouer un rôle très fort dans le secteur.

Volontarisme

Mais, à l’avenir, pour avoir une chance d’atteindre les objectifs, trois domaines devront fortement évoluer, selon Claude Turmes. Tout d’abord, l’industrie: si l’arsenal est «très bon» sur l’efficacité énergétique, il faudra aller plus loin pour remplacer le fossile par de l’électricité ou de l’hydrogène vert.

D’autre part, le secteur de la logistique, fort émetteur en carbone, pourrait, quant à lui, évoluer grâce au camion électrique ou au camion à hydrogène, selon le ministre. Enfin, si des primes sont accordées concernant la rénovation thermique des bâtiments, la bureaucratie qui l’encadre devra être réduite.

Dans tous les cas, le travail à réaliser sera «titanesque», admet Claude Turmes. Et il devra être effectué dans l’urgence: «Nous n’avons plus de temps à perdre, nous avons 10 ans pour redresser la barre», prévient le ministre.