Les trois syndicats dénoncent une attaque du patronat contre leur droit de négociation, et donc contre les salariés. (Photo : Paperjam)

Les trois syndicats dénoncent une attaque du patronat contre leur droit de négociation, et donc contre les salariés. (Photo : Paperjam)

L’OGBL, le LCGB et la CGFP affichent un front uni contre la volonté de l’UEL de revoir les modalités des négociations sociales.

La mobilisation syndicale s’organise après la première déclaration commune publiée à l’issue de la réunion du Comité permanent du travail et de l’emploi du 18 septembre – au cours de laquelle le président de l’UEL a fait part de sa volonté de revoir le fonctionnement du modèle luxembourgeois en organisant des discussions bipartites (syndicats-gouvernement et patronat-gouvernement) à l’issue desquelles le gouvernement prendrait sa décision.

«Le dialogue social au niveau national, qui se voudrait équilibré, n’est rien d’autre qu’un instrument pour permettre aux syndicats de se positionner en force politique», écrivait encore M. Buck dans une lettre adressée aux membres de l’UEL fin septembre.

L’UEL ne soutient plus le modèle luxembourgeois et remet en question les négociations sociales.
André Roeltgen

André RoeltgenprésidentOGBL

Des propos qui ne passent toujours pas auprès des syndicats (LCGB, OGBL et CGFP), qui étaient réunis ce mardi en conférence de presse. «L’UEL ne soutient plus le modèle luxembourgeois et remet en question les négociations sociales», déplore le président de l’OGBL, ,  sous les yeux de la présidente de la Chambre des salariés,  (pressentie pour être présidente de l’OGBL en décembre prochain). «Nos trois syndicats, eux, se positionnent pour le modèle social luxembourgeois, la paix sociale, le dialogue social, les conventions collectives et un modèle où des accords sont trouvés au niveau du droit du travail.»

Fustigeant la volte-face de l’UEL qu’il accuse de «ne pas prendre ses responsabilités politique, économique et sociale», M. Roeltgen y voit «une position stratégique [du patronat] axée sur la seule compétitivité» au détriment de la politique sociale.

Et de rappeler que l’UEL a déjà, par le passé, «boycotté» certaines négociations ou discussions: le Conseil économique et social en 2010-2012, le retour à l’indexation automatique des salaires en 2014, plusieurs avis du CES…

«Lors des négociations sociales de 2016, le patronat exigeait une flexibilisation totale du droit du travail», poursuit M. Roeltgen, vilipendant également l’UEL pour sa proposition de réforme du financement de l’assurance-maladie, moyennant la fin des cotisations patronales au profit de la CNS en contrepartie d’une prise en charge complète des congés maladie par la Mutualité des employeurs. Compte-épargne temps, réforme du salaire social minimum, télétravail… autant de sujets que l’UEL bouderait.

Nous avons besoin du CPTE pour répondre aux défis énormes auxquels sont confrontés les salariés, et pas seulement en matière de digitalisation.
Patrick Dury

Patrick DuryprésidentLCGB

«La position de l’UEL est une attaque contre le droit des syndicats de négocier au niveau national, que ce soit au sein de la CNS, du CPTE ou encore de la tripartite», tempête M. Roeltgen. «C’est absolument inacceptable pour l’OGBL, le LCGB et la CGFP.»

Le président du syndicat balaie la suggestion de l’UEL de privilégier des négociations au sein des entreprises, «où existe un lien de subordination» entre les délégués du personnel et la direction, «surtout que le patronat fait de l’obstruction contre les conventions collectives de travail», au point que 50% des salariés n’en bénéficient pas.

«Le Premier ministre parlait en 2014 de revitaliser le dialogue social, et le dernier programme gouvernemental comporte une multitude de points de droit du travail qu’il faut discuter et réformer. Or, ils doivent l’être au sein du CPTE», déplore encore M. Roeltgen.

«Nous avons besoin du CPTE pour répondre aux défis énormes auxquels sont confrontés les salariés, et pas seulement en matière de digitalisation», renchérit , président du LCGB. Les trois syndicats représentatifs au niveau national ont donc imaginé une «plate-forme commune intitulée Travailler 4.0» qui recense leurs propositions sur des sujets aussi variés que le travail dans l’économie partagée, le télétravail, la sécurisation des contrats de travail, la réforme de la loi sur le maintien de l’emploi, la reconversion pour les personnes perdant leur emploi à cause de la digitalisation, la conciliation vie privée/vie professionnelle, la santé au travail, un droit au temps partiel et un droit de retour à temps plein, la réforme de la loi sur les conventions collectives de travail…

L’UEL défend un «dialogue séparé du programme gouvernemental»

«Le positionnement de l’UEL est absolument incompréhensible et contre-productif», déplore M. Dury.

L’UEL avait explicité sa position il y a quelques semaines, rejetant l’accusation de vouloir torpiller le dialogue social. «Nous sommes absolument pour le dialogue, mais nous voulons le séparer du programme du gouvernement», déclarait le 18 octobre dernier Nicolas Buck sur RTL dans un face-à-face avec M. Roeltgen. «Nous ne sommes pas dans une crise du dialogue social», estimait-il, avançant que le climat était très souvent constructif au niveau des entreprises. «Nous sommes pour le dialogue, mais nous avons des ministres, un gouvernement, un Parlement, qui ont une légitimité politique pour tirer des conclusions de nos pourparlers et de nos discussions.»

Rendez-vous le 19 novembre à 19h (Parc Hôtel Alvisse à Luxembourg), date de la manifestation de protestation organisée par les syndicats. En attendant une éventuelle prise de position du gouvernement, plus claire que l’allusion faite par Xavier Bettel .