Pierre Gramegna: «Nous devons continuer à faire notre part, être vraiment à la hauteur et même parfois anticiper les changements.» (Photo: Mike Zenari/Maison Moderne)

Pierre Gramegna: «Nous devons continuer à faire notre part, être vraiment à la hauteur et même parfois anticiper les changements.» (Photo: Mike Zenari/Maison Moderne)

Le ministre des Finances Pierre Gramegna est conscient qu’il faudra encore du temps pour que le Luxembourg se débarrasse de sa réputation de paradis fiscal. Delano s’est entretenu avec lui fin janvier pour son numéro de mars.

Les pôles financiers rivaux tentent d’utiliser l’image précédemment trouble du pays comme un avantage concurrentiel, selon le ministre des Finances  (DP). Et le Luxembourg devra respecter et dépasser les normes fiscales européennes et internationales, tout en étant «patient» quant à l’évolution de cette perception, a-t-il également déclaré lors d’un entretien à la rédaction de Delano.

Des commentaires qui sont intervenus avant la publication de l’enquête sur le registre des bénéficiaires effectifs du Grand-Duché. 

Une chose que vous avez dite au début de l’entretien est que le Luxembourg a évolué vers plus de transparence. Et que, malgré tout, lorsque vous parlez à des gens du monde entier, ils perçoivent toujours le Luxembourg comme un ‘paradis fiscal’. Cela revient encore et encore. Que pensez-vous qu’il faille faire pour faire disparaître cette image? Vous avez fait des réformes, mais ce n’est apparemment pas suffisant, car les gens utilisent encore ce terme. Alors, que faire?

Pierre Gramegna- :  «Je pense qu’une fois que vous avez une réputation bien établie, il faut un certain temps pour changer d’image. J’en suis assez conscient.

Nous avons apporté de nombreux changements au cours des sept dernières années. Au moment où nous parlons, le Luxembourg se conforme à toutes les réglementations de l’UE et à toutes les directives. Nous avons introduit dans notre législation tout ce qui doit être fait en termes de transparence, en termes de modifications fiscales déclenchées par les programmes de l’OCDE. En fait, l’UE va parfois plus loin que les recommandations fiscales de l’OCDE. Et nous avons mis en œuvre tout cela. Nous avons même fait partie de la solution, comme nous l’avons fait [pendant] la présidence luxembourgeoise en 2015, [lorsque nous] avons négocié certains de ces accords. Et pourtant, les gens continuent d’asséner que nous n’en faisons pas assez.

Je pense qu’il faut intégrer le fait que certains sont surpris de voir que nous fonctionnons toujours bien en tant que centre financier. Alors ils essaient évidemment d’utiliser cette mauvaise image que nous avions, ou cette image floue, je ne dirais pas une mauvaise image, une image floue que nous avions autrefois pour des raisons de concurrence. Et nous devons répondre à ces questions, comme je viens de le faire avec vous ici. Nous sommes définitivement au même niveau que toutes les capitales et places financières européennes. Certains pensent que c’est parce que nous trichons, sur la transparence, sur les questions fiscales: ils ont tort.

Mais soit, nous continuerons à rendre des comptes. Et nous devons continuer à faire notre part, être vraiment à la hauteur et même parfois anticiper les changements.

En fait, demain, nous allons par exemple, rendre nos réglementations fiscales plus strictes pour les pays figurant sur la liste noire de l’Union européenne. Nous avons été encouragés par la Commission [européenne] à le faire. Mais nous avons choisi quelques mesures qui vont être plus strictes pour les pays qui figurent sur la liste noire. Nous allons donc continuer dans cette direction.

Et nous devons être patients, car, oui, construire une nouvelle image plus sophistiquée prend du temps.»