Connu pour ses fonds UCITS, le Luxembourg a réussi à se positionner sur le marché du private equity et attirer les grandes maisons. Le pays est parvenu à mettre en place des véhicules et outils flexibles ajustés aux besoins du PE qui, déjà bien établi, est amené à se développer davantage.

Nous avons parfois l’impression que l’industrie du private equity est née récemment. Elle existe pourtant depuis des centaines d’années et dispose d’un track record important dans le système économique global afin de financer des projets et sociétés. «Cette industrie est devenue beaucoup plus visible pour un public plus large. Ce segment du marché a une place très importante et comble un trou de financement laissé par les banques», précise Robert Brimeyer, country executive Luxembourg chez Alter Domus.

Une standardisation nécessaire

Si elle n’est pas encore tout à fait mature, l’industrie du private equity a tout de même atteint un niveau de professionnalisme et de standardisation qui permet de parler de maturation. La standardisation est d’ailleurs un moyen pour le PE de se développer davantage. «Nous voyons aujourd’hui que de plus en plus de processus sont en train d’être standardisés, car les acteurs du marché se rendent compte qu’ils utilisent tous les mêmes ingrédients. Essayer de se différencier grâce à des clauses distinctes n’est pas la meilleure solution.» Au niveau du reporting par contre, du travail reste à faire pour mettre en place des standards. «Nous, prestataires de services, en avons besoin pour avancer vers une industrie qui est mature et dans laquelle nous allons pouvoir automatiser davantage, être plus efficaces et donc fournir un service à des prix encore plus attractifs.»

Pour soutenir cette croissance et cette évolution, les clients ont eux aussi un rôle à jouer. «De gros investisseurs institutionnels poussent dans cette direction et certaines associations proposent un reporting standardisé. Nos clients se tournent vers nous pour fournir du reporting conforme aux lignes directrices de ces associations.»

Des challenges à venir pour le Luxembourg

Au Luxembourg, l’industrie du PE en pleine croissance devra relever plusieurs défis, comme l’accès aux talents. «Nous recherchons des employés qui ont les connaissances et l’expérience dans cette classe d’actifs afin de fournir un service de qualité. Nous nous retrouvons sur un marché où les salaires augmentent fortement parce qu’il y a une pénurie.» Face à la situation, deux solutions s’offrent aux acteurs du PE: aller chercher ces talents à l’étranger ou outsourcer dans des juridictions où la main-d’œuvre est disponible. «La combinaison entre la standardisation et le besoin de ressources va augmenter le niveau d’externalisation vers d’autres pays.»

Le second défi concerne, quant à lui, l’innovation et une meilleure utilisation des nouvelles technologies, comme la signature électronique. En innovant davantage, la Place pourrait en effet gagner en efficacité.

Un investisseur qui place des capitaux dans cinq fonds PE administrés par cinq prestataires différents va devoir fournir autant de fois la même documentation pour s’identifier.
Robert Brimeyer

Robert Brimeyercountry executive LuxembourgAlter Domus

Enfin, appliquer les règles internationales de manière plus pragmatique est le dernier challenge à relever pour l’industrie du PE. Les acteurs du marché passent énormément de temps à assurer leur conformité avec ces règles. «L’identification des investisseurs par exemple est un processus lourd. Un investisseur qui place des capitaux dans cinq fonds PE administrés par cinq prestataires différents va devoir fournir autant de fois la même documentation pour s’identifier. Cet exemple montre que le marché devra travailler de manière plus collaborative pour être efficace.»

Des investisseurs aux profils toujours plus variés

Pour implémenter ces changements, une masse critique est nécessaire. Or, à l’intérieur du private equity se trouvent diverses sous-catégories avec des besoins distincts. «Les fonds de fonds et fonds directs ont par exemple des caractéristiques très différentes. Ces sous-segments deviennent aujourd’hui assez grands pour nous permettre d’implémenter une spécialisation et de nous diriger vers un environnement plus mature.»

Jusqu’où peut-on aller pour garder les avantages du PE et créer un produit ajusté aux besoins de cette nouvelle catégorie d’investisseurs?
Robert Brimeyer

Robert Brimeyercountry executive LuxembourgAlter Domus

Les investisseurs sont eux aussi toujours plus divers. Historiquement, le PE attirait des clients institutionnels. Aujourd’hui, l’industrie suscite l’intérêt d’autres profils: les family offices, banques privées et investisseurs individuels. «Les caractéristiques des fonds, tout comme les horizons d’investissement ne sont toutefois pas alignés avec les besoins de ces derniers.» Face aux demandes toujours nombreuses de ces profils pour cette classe d’actifs et l’envie des gestionnaires de fonds de structurer des produits adaptés aux besoins de cette nouvelle catégorie, une question se pose. «Jusqu’où peut-on aller pour garder les avantages du PE et créer un produit ajusté aux besoins de cette nouvelle catégorie d’investisseurs? Aujourd’hui, le produit n’est pas idéal pour l’investisseur individuel, qui n’a pas la capacité de planifier sa situation financière sur une longue durée. Ou alors le gestionnaire met en place tellement de mécanismes pour assurer la liquidité qu’il perd en performance.»

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