Fabio Mandorino, conseiller en charge du métier Banque Privée à l’ABBL. (Photo: Maison Moderne)

Fabio Mandorino, conseiller en charge du métier Banque Privée à l’ABBL. (Photo: Maison Moderne)

L’avenir de la banque privée sera davantage «phygital» selon Fabio Mandorino, conseiller en charge du métier Banque Privée à l’ABBL. La clientèle très fortunée et internationale que servent les métiers de la gestion de fortune souhaite encore et avant tout pouvoir compter sur un conseiller tout ce qu’il y a de plus humain. La technologie, derrière le conseiller, sert cette relation et l’amélioration du service.

Qu’en est-il de la transformation digitale de la banque privée au Luxembourg? Récemment, le Cluster Banque Privée de l’ABBL (Private Banking Group, Luxembourg – PBGL) a souhaité évaluer la perception des acteurs du métier au Luxembourg vis-à-vis de ces enjeux.

«La digitalisation de la banque privée figure en effet parmi les priorités de nos membres. Toutefois, avec la volonté de mesurer l’ampleur du chantier en la matière, il nous semblait opportun de faire un état des lieux de la situation», confie Fabio Mandorino, conseiller en charge du métier Banque Privée à l’ABBL. «Nous avons donc demandé à KPMG de réaliser une étude pour voir comment les acteurs du secteur appréhendaient les enjeux numériques.»

Combiner interactions humaines et digitales

Le cabinet de conseil est allé à la rencontre d’une vingtaine de banques privées qui, ensemble, représentent trois quarts des actifs sous gestion confiés à des acteurs luxembourgeois.

«Il en ressort que les banques privées s’engagent progressivement dans une démarche de transformation digitale. La démarche de transformation digitale, d’ailleurs, ne dépend pas de la volonté des acteurs au Luxembourg, mais souvent de leur maison mère à l’étranger. La maturité des acteurs vis-à-vis du numérique peut donc varier sensiblement de l’un à l’autre», poursuit Fabio Mandorino. «En outre, si transformation digitale il y a, celle-ci est progressive. La volonté est de parvenir à établir de meilleures combinaisons entre interactions physiques et digitales. On parle donc davantage de transformation ‘phygitale’.»

La gestion de la complexité passe par l’humain

La clientèle de la banque privée, en effet, tient toujours beaucoup à la relation qu’elle entretient avec son gestionnaire. «On constate d’ailleurs que plus le volume d’actifs sous gestion est important, plus la relation humaine compte pour le client», poursuit Fabio Mandorino.

Or, aujourd’hui, la banque privée luxembourgeoise sert avant tout des clients disposant d’un très large patrimoine. 90% des clients des banques privées luxembourgeoises ont un volume d’actifs sous gestion supérieur à 1 million d’euros.

Plus le patrimoine est important, plus sa gestion est complexe et plus elle exige une approche personnalisée, basée sur l’interaction humaine.
Fabio Mandorino

Fabio MandorinoConseiller en charge du métier Banque PrivéeABBL

«Plus le patrimoine est important, plus sa gestion est complexe et plus elle exige une approche personnalisée, basée sur l’interaction humaine. Une technologie comme le robo-advising s’inscrit davantage en réponse à des besoins standards», poursuit Fabio Mandorino. «Toutefois, il apparaît évident que l’humain peut s’appuyer sur la technologie afin de gagner en efficacité. En automatisant la gestion d’une partie du portefeuille, le banquier privé pourra concentrer ses efforts sur les éléments les plus complexes à gérer et s’impliquer davantage dans la relation client.»

Mieux servir la relation à distance

Si le métier de la banque privée se digitalise progressivement, le changement générationnel à l’œuvre l’amène à proposer de nouveaux outils à une clientèle plus jeune, qui a grandi avec un smartphone dans la main. «De plus en plus, le client souhaite pouvoir accéder à son portefeuille quand il en a  envie, disposer d’une information actualisée en permanence», explique Fabio Mandorino. «Il souhaite aussi pouvoir analyser lui-même certaines opportunités, mieux interagir directement avec son portefeuille.»

Le client de la banque privée luxembourgeois est avant tout international. 80% des assets sont détenus par une clientèle ne résidant pas au Luxembourg, les outils digitaux doivent aussi contribuer à entretenir plus facilement le lien entre le client et son conseiller. «La base du métier, c’est la communication. Aujourd’hui, des solutions de vidéoconférence ou de messagerie sécurisées doivent permettre de construire une relation à distance», poursuit Fabio Mandorino. «Ces outils permettent aujourd’hui au banquier, et même à toute une équipe autour de lui, d’être beaucoup plus proche du client quand il a besoin d’un conseil, où qu’il soit.»

Collaborer avec la fintech

L’investissement dans la technologie, quand on parle de «wealth management», doit donc avant tout aider le banquier à mieux s’impliquer dans la relation et mieux servir chaque client. Des solutions innovantes doivent désormais permettre d’améliorer l’expérience vécue par chaque client, comme celles permettant de faciliter l’entrée en relation («on-boarding») par exemple.

«Les banques privées luxembourgeoises doivent évidemment innover si l’on veut que la place financière préserve sa position dans le domaine de la gestion de fortune. Il faut qu’elles investissent davantage dans la technologie en veillant à renforcer la confiance que l’on place en elles», précise Fabio Mandorino.

Le développement de la fintech doit par ailleurs faciliter l’évolution des métiers du wealth management.
Fabio Mandorino

Fabio MandorinoConseiller en charge du métier Banque PrivéeABBL

L’ambition de la communauté des banquiers privés est de faire du Luxembourg une des places les plus sûres au monde pour tout ce qui touche à la gestion du patrimoine. «L’environnement actuel, avec d’importants investissements du gouvernement dans le secteur ICT, particulièrement dans le domaine de la cybersécurité, contribue à cette image», ajoute Fabio Mandorino. «Le développement de la fintech doit par ailleurs faciliter l’évolution des métiers du wealth management. Il est aujourd’hui important que les banquiers privés se rapprochent des start-up pour mieux envisager les solutions de demain.»

Renforcer la confiance

S’il est difficile pour un banquier privé de mettre en place une culture de l’expérimentation, le développement d’une relation gagnant-gagnant entre les banques privées et les acteurs innovants doit permettre de placer plus facilement la technologie au service du renforcement de la confiance qu’une clientèle fortunée peut avoir envers le «wealth management made in Luxembourg».