Sam Tanson: «Il faut construire en tant qu’autorité publique, pour les gens qui n’arrivent pas à avoir leur propre bien. On doit trouver des solutions.» (Photo: Nader Ghavami)

Sam Tanson: «Il faut construire en tant qu’autorité publique, pour les gens qui n’arrivent pas à avoir leur propre bien. On doit trouver des solutions.» (Photo: Nader Ghavami)

Avoir comme ressort la Culture, c’est un privilège?

Sam Tanson. – «C’est un rêve. Si j’avais dû choisir parmi tous les ressorts, c’est celui-là qui aurait retenu mon attention en premier lieu. Alors, quand on me l’a proposé, j’ai évidemment vu cela comme un privilège et comme une chance. Quand je vais voir le concert d’un artiste que j’aime, je peux avoir la chair de poule. Je fréquente les théâtres et, mis à part en famille, je ne me sens jamais aussi bien qu’avec un livre en main. Dans le vaste domaine de la culture, il n’y a pas de domaine que je n’aime pas.

D’autres n’ont pas eu cet enthousiasme avant vous, semble-t-il?

«Je ne sais pas. Des choses ont été faites en tout cas. Moi, je suis là pour aller de l’avant.

L’acte de coalition entre les trois partenaires du gouvernement sera votre feuille de route?

«Il y a évidemment cet acte qui a été rédigé, approuvé et signé. Mais il y a surtout le plan de développement culturel, le KEP 1.0. C’est un plan qui était nécessaire et qui rassemble tous les éléments du secteur. C’est grâce à lui qu’on identifie ce qu’il faut faire, à quel rythme, avec quels moyens. Il est en réalité plus détaillé que l’acte de coalition lui-même.

On a le sentiment que la scène culturelle est en pleine effervescence au Luxembourg?

«Il y a certainement un bel essor, avec des artistes qui font parler d’eux. Mais aussi des institutions dont le renom ne cesse de croître. On a dans notre pays un cadre qui est génial, de très nombreuses possibilités... Maintenant, le défi est que la culture puisse avoir droit à la reconnaissance qui lui est due.

Cela passera par la concrétisation de plusieurs chantiers. Quels seront ceux qui sont prioritaires?

«Il va falloir revoir le statut des intermittents du spectacle. C’est une nécessité, car la société évolue. Ensuite, il faut accentuer la promotion des artistes à l’étranger. Le Luxembourg est beaucoup trop petit pour rester dans nos frontières. On doit faire rayonner notre secteur culturel au-delà.

Mais des choses se font déjà à ce niveau?

«Oui, notamment music:LX, mais pas pour toutes les disciplines. Enfin, je veux m’attaquer à la question des locaux. L’immobilier est cher au Luxembourg, et il y a peu d’espace pour l’expression artistique. Il y a là un vrai défi, celui de proposer des espaces de travail qui seront accessibles.

Baisser la TVA? C’est une matière complexe, et je souhaite une analyse. Car c’est un moyen efficace et rapide d’augmenter le revenu des artistes.

Sam Tanson, ministre de la Culture

Comme la Villa Louvigny?

«C’est un endroit parmi d’autres, en effet. Mais attendons encore un peu, tout cela est à l’étude.

On a aussi beaucoup évoqué une baisse de la TVA sur les prestations culturelles?

«C’est dans l’air depuis des années, en effet. Moi, je ne veux pas annoncer n’importe quoi, car c’est complexe. D’autant plus que c’est en lien avec la législation européenne. Ce que je veux, c’est une analyse: a-t-on une marge ou pas? De combien? Pour qui? Mais je suis bien consciente que c’est une piste intéressante pour augmenter de manière efficace et immédiate le revenu des artistes.

Quid du mécénat privé, qui peut être un soutien important?

«C’est un dispositif ancien, de 1982, qui doit être revu. Il faut l’aménager afin d’inciter les gens à pouvoir en effet faire des dons.

La culture contribue au «nation branding»?

«Sans doute, mais on ne va pas recevoir un Oscar ou un Lion d’Or tout de suite, chaque année. Donc, pour un pays développé comme le nôtre, il faut avant tout bien faire notre travail ici, aider les artistes et valoriser leur travail. Le reste suivra.

La Culture, vous l’avez dit, c’est un ressort qui vous tenait à cœur. Mais en plus, vous avez hérité du Logement. Pourquoi?

«La plupart des ministres ont deux ressorts. Cela devait aussi être mon cas, donc. Le Logement, c’est une priorité du gouvernement, un grand défi. Mais je prends mes responsabilités politiques et je veux faire bouger les choses.

Comment?

«Pas toute seule, c’est une certitude. Mais avec les communes, que je veux encore plus associer aux réflexions.

Quelles seront vos priorités?

«Tout d’abord, mobiliser plus de terrains existants qui sont constructibles. Il faut convaincre les propriétaires de les mettre à disposition. Ensuite, il faut expliquer l’intérêt de travailler avec des organismes publics, comme le Fonds du logement.

C’est donc la construction publique qui retient votre attention?

«Oui, il faut construire en tant qu’autorité publique, pour les gens qui n’arrivent pas à avoir leur propre bien. On doit trouver des solutions.

Avez-vous fixé un objectif chiffré?

«Non. Mais je veux mettre plus de logements sur le marché public, avec un accent mis sur le locatif. Il faut aussi une plus grande mixité sociale, ce qui passera par une offre diversifiée. Il faut des biens divers à des prix abordables pour toutes les catégories de personnes.

Il est nécessaire de bien cibler où exercer notre action.

Sam Tanson, ministre du Logement

Ce sera aussi, selon vous, une des manières de répondre aux problèmes de mobilité?

«Je crois beaucoup à cela. Si, au Kirchberg, on a plusieurs projets, il faudra voir quoi faire et pour qui. Mais les gens qui y vivront n’auront plus à se déplacer pour y venir. C’est pour cela que la matière ‘logement’ est aussi en partie transverse à plusieurs ressorts.

Vos premiers interlocuteurs vont être les communes?

«Au Luxembourg, il y a ce principe de l’autorité communale, donc c’est indispensable. Je veux travailler avec les communes, car ce sont elles qui sont en première ligne pour identifier les terrains, les lieux constructibles, qui ont un œil sur les projets. Il faudra aussi travailler avec le Fonds du logement, qui a un tableau qui analyse les besoins en logements en fonction de différents paramètres. Il est nécessaire de bien cibler où exercer notre action.

Vous allez réunir les autorités communales?

«La moitié des communes du pays n’ont jamais travaillé avec nous, donc il y a un travail d’information. On va voir quelles sont les communes où il y a une urgence, une priorité. Et c’est moi qui m’y rendrai.»