Fredrik Skoglund, chief investment officer à la Banque internationale à Luxembourg. (Photo: Bil)

Fredrik Skoglund, chief investment officer à la Banque internationale à Luxembourg. (Photo: Bil)

Alors que le Royaume-Uni se cherche un nouveau Premier ministre, Fredrik Skoglund, chief investment officer à la Banque internationale à Luxembourg, revient sur les enjeux du divorce repoussé à la fin du mois d’octobre.

Depuis trois ans, le Brexit est un risque majeur qui plane sur tout investissement en Europe. À l’approche de la nouvelle date butoir (qui tombe avec beaucoup d’à-propos le jour d’Halloween), le scénario effrayant d’une sortie sans accord devient encore plus crédible.

Theresa May, la chef du parti conservateur, a été obligée de démissionner après que le Parlement britannique a rejeté à trois reprises l’accord de divorce qu’elle avait conclu avec Bruxelles. À présent, son parti doit choisir un nouveau leader parmi les 10 candidats déclarés à sa succession au poste de Premier ministre. Son identité sera dévoilée lors de la semaine du 22 juillet.

Toutefois, en dépit de ce changement, les défis que le prochain Premier ministre est appelé à relever seront les mêmes que ceux auxquels Theresa May était confrontée: il n’y a pas de modèle pour le Brexit et il existe de profondes divisions dans le pays, au Parlement et au sein même des différents partis politiques quant à la marche à suivre.

Dans le même temps, le président de la Commission européenne a déclaré que le traité de sortie de 585 pages «n’est pas un traité entre Theresa May et Jean-Claude Juncker: c’est un traité entre le Royaume-Uni et l’UE. Il doit être respecté par le prochain Premier ministre britannique, quel qu’il soit.»

L’énigme Boris Johnson

Le candidat qui tient la corde pour succéder à Theresa May est l’ancien maire de Londres Boris Johnson, qui s’est montré disposé à franchir le pas, avec ou sans accord, le 31 octobre. Et ce malgré une note confidentielle du cabinet, divulguée mercredi dernier, qui a révélé l’existence d’importantes lacunes dans les préparatifs du gouvernement en vue d’une sortie sans accord, notamment en ce qui concerne l’approvisionnement en médicaments et les contrôles aux frontières.

Boris Johnson a également menacé de ne pas régler à l’UE la facture du divorce, qui s’élève à 39 milliards GBP. Le président français Emmanuel Macron a réagi en déclarant que si le Royaume-Uni n’honorait pas ses obligations de paiement, cela serait assimilé à un non-respect d’engagement international équivalent à un défaut sur sa dette souveraine. Par la suite, les agences de notation de crédit ont indiqué qu’elles n’étaient pas du même avis.

En revanche, elles ont fait savoir que la note AA du Royaume-Uni serait sans doute dégradée à nouveau, possiblement de deux crans, si jamais le pays quitte l’UE sans accord (ce qui pourrait se produire si Londres ne s’acquitte pas comme convenu des 39 milliards GBP).

Les agences de notation (...) ont fait savoir que la note AA du Royaume-Uni serait sans doute dégradée à nouveau.

Fredrik Skoglundchief investment officerBil

Au cœur de la tourmente, Londres essaie de reproduire les accords commerciaux qui existent entre l’UE et les autres pays. À ce jour, selon le ministère du Commerce extérieur britannique, le Royaume-Uni a scellé des accords avec des pays qui représentent 63% de ses échanges, le dernier en date étant la Corée du Sud.

En 2017, le Royaume-Uni a importé 5,1 milliards GBP de biens et de services en provenance de Corée du Sud, principalement des voitures et des pièces détachées, ainsi que des composants destinés à la fabrication de navires et d’aéronefs. Les exportations du Royaume-Uni à destination de la Corée du Sud se sont élevées à 8,2 milliards GBP (principalement des services financiers et commerciaux, des voitures et des carburants).

Autre source d’incertitude: l’Écosse, où le Parti national écossais est arrivé en tête du scrutin des élections européennes, avec 38% des voix. La présidente du parti Nicola Sturgeon a réaffirmé que l’Écosse souhaite rester au sein de l’UE (62% des Écossais ont voté en faveur du maintien au sein de l’UE lors du référendum de 2016) et entretient des contacts étroits avec Bruxelles à ce sujet.

Aujourd’hui, les marchés restent confrontés au même problème du Brexit qu’il y a un an et le risque est peut-être même plus grand si un fervent partisan d’un Brexit «dur» s’installe au 10 Downing Street.