Luc Rasschaert craint que les législations changent dans certains pays. (Photo: Romain Gamba / Maison Moderne)

Luc Rasschaert craint que les législations changent dans certains pays. (Photo: Romain Gamba / Maison Moderne)

Depuis le début de l’année, les primes dans l’assurance-vie ont chuté de 34%. Tentative d’explication avec Luc Rasschaert, CEO de l’assureur Wealins.

Comment expliquez-vous la chute importante des primes en assurance-vie sur l’année 2020?

. – «Elle est en partie causée par un élément exceptionnel survenu au cours de l’année 2019 — un transfert de portefeuille de plus de deux milliards d’euros. Mais je ne vois pas de problème d’attractivité des contrats d’assurance-vie à l’international. Nos clients reconnaissent toujours l’intérêt des produits d’assurance-vie.

Où se situe le problème, dès lors?

«Il est plutôt lié à l’offre. L’assurance-vie à l’inter­national en libre prestation de services (passeport européen) a été dopée par les solutions en fonds euros – à taux garantis – proposées par certaines compagnies. Ces produits ont provoqué une forte croissance du marché de la LPS ces dernières années.

Mais la situation a changé…

«La faiblesse des taux d’intérêt a fait que les fonds euros connaissent de plus en plus de difficultés à fournir un rendement attractif. La crise liée au coronavirus n’a pas amélioré la situation. On a donc observé une forte réduction de l’offre de produits à taux garantis.

L’autre solution, c’est l’offre en unités de compte avec des placements à risque. Comment évolue-t-elle?

«Elle a été poussée dans le dos par la réduction de l’offre en fonds euros. Si, aujourd’hui, on constate une baisse des produits en unités de compte (-10,91% sur 2020 par rapport à une baisse de 62,5% pour les produits à rendement garanti, ndlr), c’est à cause de produits combinés qui offraient un mix des deux solutions. Chez Wealins, nous sommes un pure player en unités de compte et nous connaissons une année positive.

La crise a-t-elle modifié le comportement des clients?

«Oui, il est clair que pas mal de personnes, conscientes qu’elles peuvent être atteintes par ce virus, se deman­dent si elles doivent accélérer leurs projets de transmission du patrimoine et adapter la manière dont elles gèrent leurs portefeuilles. Elles regardent dans quels actifs investir pour obtenir un rendement qui leur convient par rapport aux risques qu’elles sont prêtes à prendre.

Leurs portefeuilles évoluent fortement?

«On voit une tendance à se diriger vers des actifs plus complexes, comme des actifs non cotés ou le private equity. Les clients cherchent des compagnies qui peuvent leur offrir un conseil sur le planning successoral, mais qui sont aussi capables de gérer des actifs plus complexes. Sans connaître les détails par compagnie, je pense que ce sont les pure players en unités de compte et qui ont su investir dans des actifs complexes qui ont subi le moins de conséquences de cette crise.

Les taux bas impactent donc plus le secteur que la crise sanitaire?

«C’est en tout cas ma lecture des chiffres du CAA (Commissariat aux assurances) et de la situation chez Wealins. Nous ne proposons pas de produits à taux garantis et nous évoluons favorablement.

Les produits à taux garantis sont appelés à disparaître?

«Je ne pense pas. Les assureurs sont assez créatifs et intelligents pour trouver de nouvelles solutions pour maintenir ces taux garantis. Mais comme cela coûte cher aux compagnies en termes de marges de solvabilité, il est possible que certaines adaptent leur offre et le volume de fonds euros à taux garantis.

Comment envisagez-vous l’année 2021?

«Positivement, grâce à l’arrivée prochaine de vac­cins et au résultat de l’élection américaine, qui devrait permettre de retrouver plus de stabilité sur les marchés financiers. Ceci dit, il faut s’attendre à ce que certains gouvernements, à la recherche de nouvelles sources de revenus, modifient la fiscalité.

Un nouveau type de risque?

«Il leur faudra sans doute un peu de temps, mais à moyen terme, je crains de voir disparaître les avantages liés aux contrats d’assurance-vie dans certains pays. Nous avons déjà un exemple en Belgique avec la nouvelle taxe sur les comptes-titres.

Mais le modèle d’assurance-vie luxembourgeois garde son attractivité?

«Oui, rien n’a changé. Au contraire, l’écosystème luxembourgeois, très compétitif, permet d’investir dans des produits plus complexes que je citais plus tôt, ce qui n’est pas le cas dans certains pays ­importants pour la Place luxembourgeoise.»

Cet article a été rédigé pour l’édition magazine de  qui est parue le 25 novembre 2020.

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