Les investissements publics ont la double vertu de générer des recettes additionnelles et de créer des emplois. (Photo: Romain Gamba/ Archives Maison Moderne)

Les investissements publics ont la double vertu de générer des recettes additionnelles et de créer des emplois. (Photo: Romain Gamba/ Archives Maison Moderne)

Le Luxembourg va augmenter en 2021 ses investissements publics, l’austérité «n’étant pas une réponse» a expliqué le Premier ministre lors de son discours sur l’état de la Nation. Plusieurs exemples lui donnent raison.

La crise est là et il faut donc… investir. Au Luxembourg, la stratégie des mois à venir sera de doper les investissements publics afin d’en faire un instrument de la relance économique. En 2021, le taux d’investissement sera de 4,3% du PIB, contre 3,7% du PIB en 2020. Et tant pis si le niveau d’endettement augmente, pour atteindre les 27,4% du PIB.

«Pour ma part, je vais même encore plus loin en disant qu’il ne faut pas opposer investissements et endettement. Dans les périodes de faible conjoncture, les investissements publics ont un effet d’entraînement, cela aide à relancer la croissance», explique Muriel Bouchet, senior economist à la Fondation Idea. Les investissements publics se traduiront par des recettes additionnelles et des embauches, donc moins d’indemnités de chômage à payer. Idea a ainsi calculé, , qu’un investissement de 700 millions d’euros générerait 260 millions d’euros en effet retour. «Ce qui signifie que le «paquet d’investissement» coûterait aux Administrations publiques non pas 700 millions comme l’inférerait un observateur trop pressé, mais 440 millions (700 millions moins 260 millions). En termes de déficits publics, la mesure serait donc déjà autofinancée à près de 40%», écrivait alors Muriel Bouchet.

Mais ce n’est pas tout: cet investissement va certes faire croître le montant absolu de la dette publique, mais, surtout, faire bondir le PIB de 0,9%. Dès lors, et en tenant compte dans les calculs d’un multiplicateur réduit (1 euro investi génère 0,8 euro d’accroissement du PIB), le plan d’investissement s’autofiancerait à hauteur de 60%. «Or il serait possible de «doper» ce multiplicateur, en sélectionnant des investissements publics particulièrement efficaces et riches de retombées pour l’économie grand-ducales», écrivait encore Muriel Bouchet. Un multiplicateur de 1,4 permettrait donc de faire du surplace, l’effet de relance serait alors… gratuit.

Belgique et Japon: les parfaits contre-exemples

Tout cela est théorique. Mais si l’histoire récente n’a pas permis de valider cette analyse puisque rares sont les pays à avoir pu augmenter leurs investissements publics, plusieurs contre-exemples plaident en sa faveur. «En Belgique, on a baissé quasi de moitié les montants des investissements publics et les effets ont été très négatifs, comme on le sait», explique encore Muriel Bouchet. Le Japon n’a pas non plus été très inspiré «en diminuant ses investissements, à partir de 1996, de 8 à 4% en quelques années. Le FMI a indiqué que cela faisait partie des causes du ralentissement de l’économie nippone.»

Investir plus est donc idéal. Reste à en avoir la capacité. Muriel Bouchet voit là |’occasion de retenir plusieurs leçons. «Tout d’abord que la bonne santé des finances publiques avant crise a été un important avantage. La Belgique et la France avaient un endettement de plus de 110%, le Luxembourg entre 19 et 22% selon la méthode de calcul. Cela signifie que s’il faut investir, il ne faut pas non plus faire tout et n’importe quoi», dit-il.

Ensuite, que «vu les taux bas, pouvoir emprunter sur les marchés est un atout de plus. Conserver la note Triple A sera donc un objectif à avoir pour le Luxembourg.»

Et à nouveau, le niveau d’endettement ne devra pas être une obsession. «Sans doute va-t-on dépasser très légèrement les 30% en 2022 ou 2023. Dans un contexte de crise et totalement exceptionnel, cela reste plus que raisonnable», conclut-il.