Malgré des chiffres d’affaires importants, les marges des entreprises seraient très faibles, estime Carlo Thelen. (Photo : Sebastien Goossens)

Malgré des chiffres d’affaires importants, les marges des entreprises seraient très faibles, estime Carlo Thelen. (Photo : Sebastien Goossens)

Ce qui préoccupe le plus la Chambre de commerce, c’est «l’absence d’une croissance véritablement qualitative». Lors de la présentation de ses «perspectives économiques» pour 2018 ce jeudi, les représentants de l’économie luxembourgeoise expliquaient que la croissance économique soutenue serait avant tout «quantitative», étant donné qu’elle serait tributaire de la croissance quasi-équivalente en termes d’emploi.

Afin d’atteindre l’objectif affiché d’une croissance qualitative, la Chambre de commerce plaide pour une augmentation de la productivité, qui elle seule saurait dégager «un surplus de richesse qui se partage entre hausse des salaires, hausse des profits et baisse des prix».

Devant le constat d’une productivité qui stagne depuis l’an 2000 et qui devrait continuer à stagner jusqu’en 2021, le directeur de la Chambre de commerce, Carlo Thelen, mettait la politique en garde devant une augmentation du salaire social minimum (SSM) qui «ne serait pas une surprise en phase préélectorale».

À Paris aussi, quelqu’un qui gagne le Smic ne peut pas se payer un appartement à trois chambres dans le centre. Malheureusement, c’est partout comme ça.

Carlo Thelen, directeur de la Chambre de commerce

En effet, Carlo Thelen expliquait que compte tenu de marges très faibles du côté des entreprises luxembourgeoises hors secteur financier, une telle hausse pourrait être «fatale» pour des petites et moyennes entreprises qui peinent d’ailleurs à trouver assez de main-d’œuvre qualifiée.

Par ailleurs, une telle hausse risquerait d’impacter toute la structure des salaires et mener à une augmentation globale des coûts, y compris les cotisations. Ces coûts supplémentaires pourraient ensuite pousser des entreprises à embaucher davantage de frontaliers qualifiés prêts à venir travailler pour le SSM, et ce au détriment des résidents peu qualifiés.

Face aux observations que le SSM à lui seul ne suffit pas à joindre les deux bouts, Carlo Thelen estime que la politique a échoué à régler le problème du logement au cours des 25 dernières années et plaide pour une forte augmentation de l’offre de logements notamment sociaux.

Et d’ajouter: «À Paris aussi, quelqu’un qui gagne le Smic ne peut pas se payer un appartement à trois chambres dans le centre. Malheureusement, c’est partout comme ça.»

Assise du terrain

Tandis que Carlo Thelen reconnaît qu’à plus longue échelle temporelle, la productivité a fortement augmenté au Luxembourg, il estime que «la transformation et la digitalisation nous offrent de nouveaux moyens d’améliorer notre productivité dans l’intérêt des salariés». Il y aurait encore de quoi puiser tout en réduisant la pénibilité de certaines tâches de travail.  

Et de formuler la métaphore: «C’est comme dans le sport: quand vous êtes premier, il est difficile de rester au top et les concurrents vous rattrapent.»

En ce qui concerne les inégalités de revenu et de patrimoine, le directeur des affaires économiques, Marc Wagener, estimait que ces «polarisations» s’observeraient davantage à l’étranger qu’au Luxembourg qui «a une structure de salaires très équitable».

En revanche, l’économiste pointait – à titre personnel - les grandes divergences au niveau de la propriété des terrains, qui mériterait une discussion sociétale: «historiquement 80% des habitants avaient l’assise sur le territoire et aujourd’hui des gens arrivent au Luxembourg qui n’ont pas cette assise.» Du coup ce serait «toujours les mêmes à qui le terrain appartient».