Le Private Equity, qui consiste à investir dans des sociétés non cotées, a le vent en poupe au Luxembourg. Selon Nick Tabone, Partner et Private Equity Leader chez Deloitte Luxembourg, ceci s’explique par une série de facteurs; de la stabilité politique du pays aux dispositions légales qui facilitent le travail des acteurs de l’industrie des fonds.

Le constat était posé en mars dernier par Rajaa Mekouar, présidente de la LPEA (Luxembourg Private Equity & Venture Capital Association): le secteur du Private Equity est en plein développement au Luxembourg.

Le pays est devenu un hub européen pour ce type d’investissements et les acteurs qui choisissent la Place luxembourgeoise ne le font plus seulement pour y établir des structures d’administration, mais aussi pour y installer des équipes qui prennent de véritables décisions d’investissement. Nick Tabone, Partner et Private Equity Leader au sein de Deloitte Luxembourg, souscrit complètement à cette vision. Selon lui, trois raisons principales expliquent cette situation privilégiée du Luxembourg.

Une grande stabilité politique

Tout d’abord, à l’inverse de la situation que connaît aujourd’hui le Royaume-Uni, le Luxembourg offre aux investisseurs une très grande stabilité politique. «Il y a eu quelques interrogations au moment où le premier gouvernement Bettel-Schneider a été formé, en 2013. Mais on constate que cette équipe, qui a rempilé suite aux élections d’octobre dernier, a un but commun: elle veut le succès du Luxembourg», analyse Nick Tabone. «Cette vision à long terme, déployée par des dirigeants qui se maintiennent au pouvoir, garantit une forme de stabilité qui est assez rare aujourd’hui et qui donne un avantage indéniable au Luxembourg par rapport à d’autres pays. Cela en fait un endroit particulièrement ‘business friendly’.»

La grande stabilité politique du Luxembourg expliquerait ainsi en bonne partie l’augmentation du nombre de gestionnaires d’actifs présents sur le territoire luxembourgeois, un mouvement qui s’accélère dans la perspective du Brexit.

Des lois qui favorisent l’investissement

Le Luxembourg a également su mettre en place différentes dispositions légales qui constituent autant d’armes de séduction massive pour les investisseurs. «La transposition en droit luxembourgeois de la directive AIFM a notamment permis de faciliter la création de nouveaux fonds au Luxembourg, proches de ceux qu’on connaît aux États-Unis ou au Royaume-Uni», indique Nick Tabone. La directive AIFM (Alternative Investment Fund Managers) permet en effet aux fonds de Private Equity de se domicilier au Luxembourg pour distribuer ensuite leurs produits dans le reste de l’Europe. Cette disposition, prise en 2013, a évidemment contribué au positionnement de la Place luxembourgeoise comme un hub européen pour ce type de fonds.

Le Luxembourg a introduit la «société en commandite spéciale» (SCSp), un véhicule d’investissement qui offre de nombreux avantages en matière de structuration et de fiscalité. 
Nick Tabone

Nick TabonePartner & Private Equity LeaderDeloitte Luxembourg

C’est également à l’occasion de la mise en place de cette réglementation que le Luxembourg a introduit la «société en commandite spéciale» (SCSp), un véhicule d’investissement qui offre de nombreux avantages en matière de structuration et de fiscalité. «Tous ces éléments légaux sont pour beaucoup dans le fait que le Luxembourg est aujourd’hui la deuxième place financière en ce qui concerne les actifs sous gestion, après les États-Unis», poursuit Nick Tabone. «Il ne faut pas sous-estimer ce résultat, qui est tout de même fabuleux au regard de la taille du pays.»

Une expertise multilingue

Enfin, le succès du Private Equity au Luxembourg a aussi un lien avec l’expertise qu’on trouve sur le territoire. Celle-ci est d’autant plus intéressante pour les gestionnaires d’actifs venant de l’étranger qu’elle est très souvent multilingue. «Il est très facile de s’adapter au Luxembourg», explique Nick Tabone. «J’en suis le meilleur exemple: j’étais venu ici pour deux ans, et cela fait 14 ans que je suis là… On trouve ici à la fois les compétences et une vraie culture internationale.»

Le vivier de ressources humaines disponible au Luxembourg est toutefois surexploité, et le problème du recrutement se pose donc pour de nombreuses sociétés. «Il faut en effet pouvoir trouver constamment de nouveaux talents, ce qui n’est pas évident. Mais j’ai confiance dans le pouvoir d’attraction du Luxembourg, surtout au vu de l’évolution positive qui nous attend.»

Les caractéristiques du régulateur luxembourgeois – qui est à la fois fort et pragmatique – commencent à être bien connues à l’étranger.
Nick Tabone

Nick TabonePartner & Private Equity LeaderDeloitte Luxembourg

Pour Nick Tabone, le Private Equity est encore appelé à se renforcer au Luxembourg. «L’arrivée massive de family offices au Luxembourg ainsi que la création de nombreux nouveaux fonds de Private Equity sont des signaux positifs pour le futur», estime-t-il. «En effet, un fonds de Private Equity est un investissement à long terme, sur dix ans. Lorsqu’une telle structure est créée au Luxembourg, elle n’est donc pas destinée à déménager le lendemain. En outre, le fait que l’expertise luxembourgeoise en matière de Private Equity intègre également aujourd’hui le middle et le front office ouvre de nouvelles perspectives pour ce marché. Enfin, les caractéristiques du régulateur luxembourgeois – qui est à la fois fort et pragmatique – commencent à être bien connues à l’étranger. Cela devrait contribuer à attirer de nouveaux investisseurs.»