Une nouvelle métropole transfrontalière pourrait voir le jour d’ici quelques années autour d’Esch-sur-Alzette.  (Photo: Maison Moderne/Archives)

Une nouvelle métropole transfrontalière pourrait voir le jour d’ici quelques années autour d’Esch-sur-Alzette.  (Photo: Maison Moderne/Archives)

Le Luxembourg s’apprête à organiser, en collaboration avec la France, une Internationale Bauausstellung (IBA) qui portera sur la région frontalière Alzette-Belval. Ce projet de grande envergure commence officiellement sa phase de préfiguration ce jeudi 30 janvier.

La région frontalière située au niveau d’Esch-sur-Alzette attire l’attention depuis déjà quelques années: le groupement européen de coopération territoriale (GECT) travaille depuis 2014 à promouvoir l’émergence et la reconnaissance d’une agglomération transfrontalière et novatrice fondée sur les principes du développement durable.

Cette zone Alzette-Belval va connaître, dans les années à venir, un nouveau développement qui pourrait être soutenu par un outil nouveau au Luxembourg: une Internationale Bauausstellung (IBA). Sont engagés financièrement dans cette démarche le ministère de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire, le ministère du Logement pour le Luxembourg, et le ministère de la Transition écologique et solidaire et la Région Grand Est pour la France. D’autres partenaires, plus opérationnels, sont également engagés: l’Université du Luxembourg, le Luca – Luxembourg Center for Architecture, et l’Établissement public d’aménagement Alzette-Belval (EPA).

Une IBA, qu’est-ce que c’est?

Les IBA sont un projet allemand de renommée mondiale dont l’origine remonte au début du 20e siècle, une époque où les grandes villes comme Berlin, Munich et Cologne connaissaient une grande dynamique économique et financière, conjuguée à un développement urbain important.

Il s’agit d’un outil qui offre l’opportunité de travailler à l’échelle d’un territoire déterminé sur une longue durée, puisque chaque IBA dure environ 10 ans. «Les IBA permettent de poser des questions sur les sujets urbanistiques, architecturaux et de développement du territoire, d’élaborer des concepts créatifs et innovants et de tirer les réalisations vers le haut», explique Claude Turmes, ministre de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire, convaincu de l’intérêt positif d’un tel projet pour ce territoire.

Plusieurs IBA ont déjà été organisées, comme à Heidelberg, Stuttgart, Hambourg, et ont démontré à chaque fois le grand potentiel novateur, voire avant-gardiste, que cet outil permet pour inventer l’avenir urbain ou métropolitain. À l’heure actuelle, seule la ville de Bâle a mené un projet hors de l’Allemagne, une IBA qui porte également sur une zone transfrontalière. Luxembourg pourrait donc devenir la seconde IBA transfrontalière et hors d’Allemagne.

En plus de ces ambitions territoriales et urbanistiques, les IBA visent aussi à impliquer pleinement les citoyens dans les processus de réflexions. «Nous tenons beaucoup à l’implication des citoyens dans l’élaboration de ce projet. Des ateliers de participations citoyennes sont prévus, et nous souhaitons aussi travailler main dans la main avec les associations locales», affirme Claude Turmes.

Claude Turmes explique les principes de l’IBA Alzette-Belval. (Photo: Matic Zorman) 

Claude Turmes explique les principes de l’IBA Alzette-Belval. (Photo: Matic Zorman) 

Une IBA franco-luxembourgeoise

L’IBA Alzette-Belval envisagée permettra de travailler sur un territoire situé de part et d’autre de la frontière franco-luxembourgeoise et comprenant les communes d’Esch-sur-Alzette, Schifflange, Mondercange, Sanem, Rédange, Russange, Thil, Villerupt, Audun-le-Tiche, Ottange, Aumetz et Boulange. L’objectif est de construire une agglomération transfrontalière, avec une identité propre et de déterminer comment utiliser ce sol commun.

L’IBA est pour nous un instrument qui permet de créer de l’excellence.

Claude Turmesministre de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire

«Nous sommes face à une agglomération qui, par le fait de l’Histoire, est traversée par une frontière. L’IBA est pour nous un instrument qui permet de créer de l’excellence, rassemblant des experts internationaux de très haut niveau, et de stimuler positivement la réflexion dans cet espace transfrontalier urbain pour aller vers un aménagement plus coordonné, plus organisé, partageant une identité commune.»

L’IBA permettrait de développer des projets sur les anciennes friches d’ArcelorMittal, le quartier Alzette, sur la Lentille Rouge, ou encore sur le futur projet Terres Rouges à cheval entre le Luxembourg et la France. «L’idée est de voir s’il est possible de créer un deuxième pôle de développement qui s’établirait dans le sud du Luxembourg, en parallèle de celui de Luxembourg, comparable en nombre d’habitants et de dynamisme économique.

C’est une zone qui connaît un très grand nombre d’interactions transfrontalières, et il est important de créer un territoire avec une identité propre où la frontière ne joue plus de rôle», affirme Claude Turmes. «Au 19e siècle, cette zone occupait une place de premier ordre au niveau architectural et urbanistique, avec un passé commun qu’il convient de faire ressortir, de recréer cet esprit pionnier qui était présent sur ce territoire. Il s’agit aussi de mettre en lumière la transition écologique, qui a des impacts sur la mobilité, l’énergie, ou encore les matériaux de construction.»

Une phase de préfiguration de deux ans

Dans un premier temps, une phase de préfiguration doit permettre de valider la faisabilité et potentialité d’un tel projet. Cette préfiguration démarre officiellement ce 30 janvier et durera deux ans, jusqu’en 2022, année où Esch sera Capitale européenne de la culture. Elle est financée à parts égales entre le Luxembourg (ministère de l’Aménagement du territoire et de l’Énergie et le ministère du Logement) et la France (ministère de la Cohésion territoriale et Région Grand Est) à hauteur de 310.000 euros. Par la suite, d’autres financements viendront si le projet est retenu.

Cette phase de préfiguration vise à fixer les thématiques fédératrices, à figer le territoire concerné, mobiliser les financements nécessaires, lever les questions juridiques et réglementaires. Si cette phase de préfiguration s’avère positive, alors l’IBA pourra démarrer, et avec elle, la concrétisation de projets novateurs, notamment architecturaux, avec une forte attention portée au logement abordable. C’est la raison pour laquelle le ministère du Logement est également impliqué dans ce projet.

Avec un peu de chance, cette IBA pourrait également correspondre à l’adoption de l’European Cross-Border Mechanism (ECBM), une nouvelle législation européenne initiée par Camille Gira, l’ancien secrétaire d’État à l’Aménagement du territoire, qui permettrait de rendre plus facile la coopération au niveau juridique, légal et organisationnel dans les régions frontalières. Cela faciliterait grandement la mise en place d’infrastructures communes au-delà des frontières, et donc de cette IBA.