Quatrième supercalculateur au monde en termes d’efficacité énergétique, Meluxina, le HPC luxembourgeois, est un des premiers pas marquants vers l’exascale et ses supercalculateurs 100.000 fois plus puissants encore. (Photo: Luxprovide)

Quatrième supercalculateur au monde en termes d’efficacité énergétique, Meluxina, le HPC luxembourgeois, est un des premiers pas marquants vers l’exascale et ses supercalculateurs 100.000 fois plus puissants encore. (Photo: Luxprovide)

Trois ans après avoir décidé de consacrer 1,5 milliard d’euros à l’achat des sept premiers supercalculateurs européens, dont le HPC luxembourgeois Meluxina, le Conseil de l’Union européenne a officiellement doté, mardi, l’entreprise EuroHPC de 7 milliards d’euros. Objectif: l’exascale dès 2023.

Avec dix millions de milliards d’opérations par seconde, un chiffre impossible à imaginer pour le commun des mortels, Meluxina, l’ordinateur luxembourgeois à haute performance (HPC), en phase de test depuis le début du mois, est le deuxième supercalculateur européen de l’initiative EuroHPC, mise sur les rails en 2018 et dotée de 1,5 milliard d’euros pour un réseau de sept ordinateurs de ce type.

Avec la décision prise ce mardi par la formation «Affaires économiques et financières» du Conseil des ministres de l’Union européenne, l’UE se prépare à passer à des ordinateurs qui peuvent effectuer jusqu’à 1 milliard de milliards d’opérations par seconde, soit 100.000 fois plus que le HPC luxembourgeois, qui est déjà dans le top 50 mondial des supercalculateurs les plus puissants. Pour cela, l’UE pourra puiser dans différentes lignes budgétaires pour atteindre 7 milliards d’euros afin de financer cette infrastructure. Les deux premiers ordinateurs en exascale doivent être mis en service en 2023-2024.

L’exascale, ces mille milliards d’opérations à chaque seconde, est l’objet d’une compétition mondiale entre Américains, Chinois et Européens, parce que ces machines, en réalité des nœuds de microprocesseurs ultraperformants, pourront révolutionner toute une série d’activités, de la découverte scientifique à la sécurité nationale en passant par la médecine de précision, le climat régional, la fabrication additive, la conversion de plantes en biocarburants, la relation entre l’utilisation de l’énergie et de l’eau, l’invisible, la physique dans la découverte et la conception des matériaux, et les forces fondamentales de l’univers. Pouvoir tout calculer, tout tester et conserver les meilleurs choix dans une optique de sécurité nationale ou d’efficacité pour un médicament, par exemple, est l’enjeu final de cette bataille.

Cette échelle nécessite, selon une étude américaine, au moins 2 milliards d’euros pour l’infrastructure et des dizaines de millions d’euros pour son fonctionnement annuel.

La décision prise ce mardi autorise l’Union européenne à pouvoir se mêler à la compétition mondiale, en entérinant l’entreprise commune européenne EuroHPC, née en 2018 et qui avait été dotée de son indépendance en 2020.

Souveraineté européenne et microprocesseurs

La Commission européenne prévoit de développer les premiers ordinateurs utilisant les propriétés qui sous-tendent la mécanique quantique d’ici 2025. Ces ordinateurs agiraient comme des accélérateurs interconnectés avec les supercalculateurs de l’EuroHPC JU, formant des machines «hybrides» qui allient le meilleur des technologies informatiques quantiques et classiques. L’entreprise commune, dit aussi le communiqué de presse, investira à la fois dans l’interconnexion via des réseaux térabit de cette infrastructure de calcul intensif et dans l’accès depuis le cloud à un grand nombre d’utilisateurs publics et privés depuis n’importe où en Europe.

L’Europe mettra en place des centres de compétences spécifiques sur ces technologies, et avec Meluxina, le Luxembourg se retrouve déjà bien placé.

Enfin, et le sujet est loin d’être anodin, l’Union européenne doit aussi retrouver sa souveraineté dans le domaine des microprocesseurs, sans quoi cela reviendra à construire des autoroutes sans avoir de voitures… L’European Processor Initiative, lancée en 2018, est elle aussi en phase d’accélération, avec le développement des activités d’une «start-up» sur mesure créée avec cet objectif et le soutien des États membres. SiPearl, 50 salariés, 3.000 d’ici dix ans, deviendrait sans aucun doute la success-story européenne. L’idée est de pouvoir à la fois équiper les supercalculateurs les plus puissants en se passant des fournisseurs de processeurs américains ou asiatiques.