L’activisme économique de Joe Biden sur les 100 premiers jours de son mandat dope la croissance américaine. (Photo: Shutterstock)

L’activisme économique de Joe Biden sur les 100 premiers jours de son mandat dope la croissance américaine. (Photo: Shutterstock)

C’est un véritable chassé-croisé que se livrent Américains et Chinois pour prendre le rôle de locomotive de la croissance et de leader planétaire. Washington vient de reprendre la main.

«Les États-Unis reprennent le rôle de locomotive de la croissance économique mondiale. Ainsi, au premier trimestre de cette année, le PIB américain a augmenté de 6,4% en rythme annualisé par rapport aux trois derniers mois de 2020, grâce au soutien fiscal important et à l’accélération de la campagne de vaccination», analyse , chief investment officer et administrateur-directeur de pour qui «tant la consommation des ménages que les investissements des entreprises ont contribué à l’amélioration de l’activité. Seul le commerce net a pesé sur la croissance, la hausse des importations résultant de l’accélération de la demande interne n’ayant pas été accompagnée par une amélioration des exportations qui ont même enregistré une légère baisse.»

Dans le même temps, en Chine, les signes d’atténuation de la reprise conjoncturelle en février et mars ont été confirmés avec la publication des chiffres de croissance du premier trimestre. «À partir du deuxième trimestre, la consommation des ménages et les investissements des entreprises devraient à nouveau accélérer, même si les mesures de soutien monétaires et fiscales sont nettement moins généreuses en Chine qu’aux États-Unis», estime Guy Wagner.

Est-ce que ce sera suffisant pour que la locomotive change encore?

Thomas Costerg, analyste chez Pictet Wealth Management, s’attend à ce que la solide croissance américaine du premier trimestre soit suivie d’un deuxième trimestre encore plus fort avec une croissance du PIB de 10% en glissement trimestriel. Toujours portée par la hausse de la consommation (+10,7% en rythme annuel). Selon lui, les consommateurs américains vont accélérer leurs dépenses avant la date limite «officielle» du 4 juillet pour la réouverture complète de l’économie. Nous observons des dépenses particulièrement solides dans les services les plus touchés par la pandémie, comme les voyages, le tourisme et les restaurants. Des taux de vaccination élevés sont à la base de cette prévision. Déjà, 54,5% de la population adulte a reçu au moins une première dose de vaccin. Notre prévision de croissance du PIB américain pour l’année 2021 reste à 6,5%.»

Le miracle des chèques.
Thomas Costerg

Thomas CosterganalystePictet Wealth Management

Thomas Costerg parle de «miracle des chèques» – en référence aux 600 dollars que chaque adulte a reçus en décembre au titre du programme de dépenses et 1.400 autres dollars reçus dans le sillage du «plan de sauvetage américain» voté en mars. Il s’attend également à ce qu’une partie de l’épargne accumulée durant la pandémie – le taux d’épargne des ménages était de 21% au premier trimestre – soit progressivement dépensée au cours du deuxième trimestre au rythme de la campagne vaccinale. «Compte tenu de cette dynamique, le PIB américain devrait dépasser son pic d’avant la crise au deuxième trimestre.»

Cette dynamique vertueuse a été rendue possible par le volontarisme économique de l’Administration Biden. Son effet devrait se diluer dans le temps pour Thomas Costerg qui table, pour 2020, sur une croissance de l’ordre de 3%, ce qui «ramènerait l’économie américaine à sa vitesse de croisière après sa reprise rapide cette année».

Frédéric Rollin, conseiller en investissement senior chez Pictet Asset Management, voit les bienfaits de cette politique sur les marchés. La performance du Standard & Poors 500 sur les 100 premiers jours de mandat de Joe Biden bat tous ses records depuis la Deuxième Guerre mondiale. Il devance John Fitzgerald Kennedy et «écrase» Donald Trump.

La fin de l’état de grâce

Mais l’analyste craint que «l’état de grâce» soit désormais terminé. C’est moins la majorité tenue du président au Capitole qui l’inquiète que le financement des plans de relance successifs. «Les premières annonces de remontée de la fiscalité sont déjà sur la table. Le taux marginal d’imposition sur les hauts revenus devrait remonter. Plus important, le taux d’imposition des entreprises devrait passer de 21 à 28%.» Cet alourdissement de la fiscalité aura, selon Frédéric Rollin, deux effets: «Elle donne des arguments à ceux qui trouvent le plan d’infrastructures trop coûteux et risque ainsi de diviser les démocrates. Et elle réduira les bénéfices des entreprises et des investisseurs. D’une part, l’attractivité des actions à moyen terme est réduite par le surcroît d’imposition. D’autre part, certains investisseurs souhaiteront anticiper la hausse des taxes et vendront leurs positions avant la fin de l’année. À cet égard, l’impact sera probablement plus fort pour les valeurs ayant le plus progressé au cours des derniers mois.»

En attendant, les marchés restent saturés de prospérité et digèrent l’abondance.

«Les rendements des obligations d’État américaines se sont stabilisés, et l’embellie sur les marchés actions s’est poursuivie», constate Guy Wagner. «La forte croissance économique aux États-Unis, l’accélération des campagnes de vaccination et la publication d’excellents résultats d’entreprises maintiennent un climat propice aux actions malgré des niveaux de valorisation très élevés.»