Voici une vue 3D de ce que sera l’éco-quartier dans le bas de la ville de Wiltz, grâce à l’économie circulaire.  (Photo: Commune de Wiltz)

Voici une vue 3D de ce que sera l’éco-quartier dans le bas de la ville de Wiltz, grâce à l’économie circulaire.  (Photo: Commune de Wiltz)

Cela fait cinq ans que Wiltz est un «cobaye» de l’économie circulaire, selon le souhait du gouvernement, approuvé par les pouvoirs locaux. Ces derniers sont convaincus par la méthode qui permet d’économiser de l’argent et de préserver l’environnement.

Penser à la deuxième voire à la troisième vie d’un bâtiment avant même sa construction, ce n’est pas ce qui est le plus courant au Luxembourg. Pourtant, c’est un des principes de l’économie circulaire testée, avec succès, par la commune de Wiltz.

Le gouvernement via le ministre a demandé d’y implémenter cette manière de faire il y a déjà cinq ans. Un choix dont se félicite aujourd’hui , bourgmestre de Wiltz.

«Quand Étienne Schneider m’a demandé si on pouvait faire un quartier dans l’optique de l’économie circulaire, j’ai dit oui tout de suite, avant même de consulter le conseil communal. C’est une chance pour Wiltz. Je ne savais pourtant pas ce qu’était l’économie circulaire concrètement. Mais en travaillant sur la matière, on se rend compte des possibilités que cela nous donne», se réjouit Fränk Arndt.

On regarde pour utiliser des matériaux sains, que l’air soit bien propre, et on réalise de nombreux tests avant de choisir un matériau.

Sabine Mornarchitectecommune de Wiltz

Le gouvernement a donc dédié un salarié de la commune à ce projet pour une période de deux ans. Ensuite, Wiltz en engagera un deuxième pour continuer à développer l’économie circulaire à tous les niveaux. Rénovation de l’hôtel de ville, création d’un PAP de 150 logements, éco-quartiers, hall de stockage ou école: de nombreuses constructions vont s’adapter à l’économie circulaire dans la commune.

Concrètement, travailler en pensant «économie circulaire» signifie qu’il faut changer globalement la façon de fonctionner. «Pour chaque projet, on fait le même exercice. On analyse tout par le prisme de l’économie circulaire. Certains prennent donc beaucoup de temps. On regarde pour utiliser des matériaux sains, que l’air soit bien propre, et on réalise de nombreux tests avant de choisir un matériau», explique Sabrina Morn, architecte à la commune de Wiltz.

Un «pass matériaux» pour tout référencer

La commune a d’ailleurs mis en place un système de «pass matériaux» qui recense l’ensemble des matériaux utilisés et leurs qualités pour chaque projet. De cette façon, s’il est nécessaire de démonter le bâtiment, la commune sait exactement ce qu’elle peut récupérer et en quelle quantité. 

Ce «pass matériaux» permet notamment de développer une polyvalence des bâtiments. «Dans la zone d’activité à Weidingen, on a fait un mélange de bâtiments d’activités PME et sports. C’est là qu’on a construit les trois nouveaux terrains de football, il y a aussi un hall pour la gym, le tir à l’arc et d’autres sports. Les parkings qu’on a aménagés pour les matchs, ils servent toute la semaine pour les entreprises. Donc c’est un investissement qui est rentabilisé deux fois», explique fièrement David Koch, architecte urbaniste à Wiltz. 

L’hôtel de ville de Wiltz est en pleins travaux actuellement afin de répondre aux normes dictées par l’économie circulaire.  (Photo: Commune de Wiltz)

L’hôtel de ville de Wiltz est en pleins travaux actuellement afin de répondre aux normes dictées par l’économie circulaire.  (Photo: Commune de Wiltz)

La fin de l’obsolescence programmée

Les entreprises du secteur de la construction ne sont toutefois pas toujours prêtes à fournir les services inhérents à un bâtiment qui respecte les principes de l’économie circulaire. Les élus communaux ont donc sollicité des ingénieurs et des entreprises étrangères afin d’apporter des solutions concrètes.

«Nous avons eu des discussions très intéressantes avec des ingénieurs qui fabriquent des ampoules. Il y a dix ans, ils faisaient des ampoules très bon marché, mais maintenant ils sont fournisseurs de services ‘lumière’. L’ampoule va donc rester leur propriété. Leur patron leur dit alors de fabriquer le meilleur produit qui soit pour avoir une durée de vie plus longue. Il y avait une notion d’obsolescence programmée que nous n’avons plus car ils souhaitent rentabiliser leur investissement», commente David Koch. 

Grâce à l’économie circulaire, l’énergie n’est donc plus traitée de la même manière. Cela fonctionne comme un système de location dont on paye uniquement les quantités réellement utilisées. «On a trouvé une entreprise qui nous fournit de la chaleur et de l’isolation pour les bâtiments. On n’a pas acheté les machines, on ne paye que pour que ça fonctionne. C’est un peu le principe du leasing», ajoute Sabrina Morn.

La géothermie 4.0

Pour tout ce qui relève du chauffage, Wiltz a également opté pour un système innovant: la géothermie. Si le principe existe depuis plusieurs années, il a toutefois été développé différemment à Wiltz. Inspiré par un projet allemand, la géothermie qui sera installée dans le PAP, qui comprendra 150 logements, ainsi que dans la future école de la ville, bénéficiera d’un concept novateur. 

«Ce sont des forages très profonds qui permettent d’utiliser l’inertie de la terre. En été, on injecte la chaleur dans le sol, et en hiver, on puise cette chaleur. On peut aussi utiliser la capacité de la pompe à chaleur pour réguler les températures. En été, cela apporte de la fraîcheur et en hiver de la chaleur. Mais attention, ce n’est pas un climatiseur. Votre sol sera froid et permettra de diminuer la température de 5 degrés», détaille David Koch.

Pour réguler cet apport d’énergie, la commune souhaite créer une société qui vendra alors la kilocalorie aux propriétaires, qui ne devront plus se soucier de l’entretien de leur chauffage puisqu’il sera géré par le fournisseur. Un principe similaire avec ce qui se fait pour les panneaux photovoltaïques. Et un sérieux gain de temps et d’argent pour les futurs acheteurs de logements à Wiltz. 

Investir pour dépenser moins

Il faut toutefois noter que si sur le long terme, l’économie circulaire permet d’économiser de l’argent, elle nécessite un plus gros investissement en amont.

«Il faut compter 10% de plus qu’un projet classique, mais cela peut aller jusqu’à 25% en fonction des matériaux utilisés. Un frein pour beaucoup de promoteurs. Le bourgmestre de Wiltz estime toutefois que sur le long terme, tout le monde est gagnant.

«Nous avons compris que la matière première n’est pas éternelle et qu’il est nécessaire d’envisager d’autres solutions. Il y a d’ailleurs pas mal de confrères bourgmestres qui nous demandent conseil sur le sujet. On organise une journée sur l’économie circulaire ce 20 septembre. On parlera des différents exemples qu’on a mis en place ici et de ce qu’on a pu découvrir dans nos recherches. C’est organisé à Wiltz et on invite toutes les communes à nous rejoindre», lance Fränk Arndt en guise de conclusion.