En cette année historique, de nombreuses sociétés se trouvent dans des situations extrêmement complexes. Si des mécanismes d’aides existent, toutes les entreprises n’en bénéficient pas. On assiste à une augmentation des faillites/liquidations, et pour les créanciers, certains réflexes sont à adopter. 

Dans un contexte marqué par la crise, nous constatons une augmentation des sociétés en défaut, en faillite ou liquidation. Pour les créanciers de ces entreprises, il est plus que jamais important d’anticiper ces difficultés et de se préparer.

Le Luxembourg, de par sa position spécifique et son tissu économique, présente une spécificité. «Entre 30.000 et 40.000 sociétés sont inscrites au Registre du Commerce et des Sociétés. Beaucoup d’entre elles sont des holdings détenant des participations dans d’autres sociétés. Elles n’ont peut-être pas elles-mêmes une activité commerciale, mais leurs filiales peuvent connaître une faillite susceptible de se répercuter sur elles. Ces holdings sont alors confrontées à des créanciers venant du monde entier», explique Nicolas Thieltgen, Avocat à la Cour et Managing Partner chez Brucher Thieltgen & Partners.

Connaître le statut du failli

Ces créanciers parfois venus de pays éloignés peuvent se sentir perdus face aux règles luxembourgeoises. Un accompagnement est donc nécessaire pour savoir comment réagir et adopter les bons réflexes. Le premier d’entre eux est de bien connaître le statut de la société en difficulté. En effet, au Luxembourg, en plus des sociétés commerciales normales, des statuts spécifiques existent, chacun ayant un régime différent: fonds d’investissement, PSF, ou encore prestataire de services de paiement. «En cas de faillite, les personnes concernées ne seront pas les mêmes. Pour les PSF, fonds et services de paiement, la CSSF interviendra. Il est nécessaire de connaître le statut pour savoir quelle procédure collective s’applique», poursuit Nicolas Thieltgen.

Indépendamment d’une faillite, il est important que les créanciers puissent se ménager des garanties suffisamment solides pour augmenter leurs chances d’être payés en cas de difficulté.
Nicolas Bernardy

Nicolas BernardyAvocat à la Cour et Associé spécialisé dans le droit commercial et des sociétésBrucher Thieltgen & Partners

Prévenir le défaut

Anticiper est également primordial. «Indépendamment d’une faillite, il est important que les créanciers puissent se ménager des garanties suffisamment solides pour augmenter leurs chances d’être payés en cas de difficulté», précise Nicolas Bernardy, Avocat à la Cour et Associé spécialisé dans le droit commercial et des sociétés. Ces garanties peuvent être obtenues auprès d’autres intervenants et protégées en cas de faillite/liquidation/insolvabilité du débiteur. Encore faut-il le faire à temps pour éviter leur nullité. Diverses procédures, comme le concordat, la gestion contrôlée ou la suspension des paiements, permettent aussi d’éviter la faillite. Dans ce contexte, s’informer de la situation de son débiteur grâce à divers outils (LBR, CSSF ou site du Barreau) est crucial.

Obtenir le jugement en faillite

Lorsqu’un débiteur est en faillite/liquidation, il est primordial d’obtenir une copie du jugement de faillite contenant les principales informations et règles applicables afin d’éviter les mauvaises surprises. Il faut pour cela contacter le curateur et s’informer des dates du dépôt des déclarations de créances.

Entretenir de bonnes relations avec le curateur

Personne centrale dans la faillite/liquidation, le curateur/liquidateur a pour rôle de récupérer un maximum d’argent auprès des débiteurs de la société pour ensuite le distribuer aux créanciers. «Cette personne capitale représente ce qu’il reste de la société en faillite/liquidation. Il travaille aussi pour la masse des créanciers. Il est donc important de dialoguer avec lui et d’entretenir de bonnes relations», déclare Nicolas Thieltgen. En effet, le créancier connaît la société, son patrimoine, ses dirigeants, et peut assister le curateur en lui confiant des informations et ses doutes.

C’est important d’être assisté par un avocat pour préparer cette déclaration, car les montants sont souvent élevés.
Nicolas Thieltgen

Nicolas ThieltgenAvocat à la Cour et Managing PartnerBrucher Thieltgen & Partners

Introduire une déclaration de créance

La société en faillite doit de l’argent au créancier? Celui-ci doit le réclamer au moyen d’une déclaration de créance à remettre au greffe et accompagnée d’annexes prouvant ses dires. «C’est important d’être assisté par un avocat pour préparer cette déclaration, car les montants sont souvent élevés. Il va défendre son cas et convaincre le curateur d’accepter la créance pour rentrer dans la masse des créanciers ayant droit à un versement», poursuit Nicolas Thieltgen.

Analyser le patrimoine de la société

Ce patrimoine peut en intéresser plus d’un. Si une faillite est malheureuse, elle peut aussi être synonyme d’opportunités et possibilités de rachat pour un créancier souhaitant lancer une activité similaire. «Si vous voyez une société tombée en faillite/liquidation et que vous envisagiez de commencer une activité similaire, cela vaut la peine de contacter le curateur pour proposer d’acheter le fonds de commerce ou tout ou partie des actifs (droit de propriété intellectuelle, brevet, droits de licence, etc.)», ajoute Nicolas Bernardy.

S’organiser avec d’autres créanciers

Peu utilisé, le comité des créanciers peut pourtant être utile dans de grandes faillites internationales avec de nombreux créanciers. «Il permet d’assurer leur représentation auprès du curateur. Certains misant sur des stratégies opposées, ce comité permet de se coordonner pour faire avancer les choses. Le tribunal peut toutefois refuser sa constitution, comme c’est souvent le cas», conclut Nicolas Bernardy.