Guido Savi, porte-parole de la Febiac Luxembourg. (Photo: Romain Gamba / Maison Moderne)

Guido Savi, porte-parole de la Febiac Luxembourg. (Photo: Romain Gamba / Maison Moderne)

Avec la 5G, l’autonomisation des véhicules n’est plus très loin. Toutefois, comme l’affirme Guido Savi, porte-parole de la Febiac Luxembourg, si la technologie semble prête, la voiture autonome a encore pas mal d’obstacles à contourner pour espérer un jour sillonner les routes d’Europe.

Alors que la voiture autonome était un sujet très en vogue il y a encore quelques années, on note désormais moins d’intérêt pour cette technologie. Comment l’expliquer?

Guido Savi. – «Dans le secteur automobile, l’accent est aujourd’hui mis sur la transition écologique, la réduction des émissions, ainsi que sur les motorisations alternatives, donc les voitures hybrides, plug-in hybrides, électriques, les nouveaux carburants, etc. Le sujet de la voiture autonome a été relégué au second plan.

Avec le déploiement récent de la 5G, pourtant, la voiture autonome pourrait se retrouver sur nos routes plus rapidement que prévu…

«La voiture autonome est avant tout une voiture ­ultra-connectée. Et elle a besoin d’un nombre très important de paquets de données pour pouvoir communiquer efficacement avec les autres véhicules ainsi que les autres éléments qui ­l’entourent. L’optimisation de la conduite autonome passe donc par l’implantation de la 5G. Ce réseau ­permet en effet de véhiculer des données beaucoup plus ­rapidement.

Où en est-on désormais en matière de technologie de la voiture autonome?

«Il existe différents niveaux de voiture autonome, allant de 0 à 5. Le niveau le plus bas correspond à un engin dont le conducteur contrôle tous les ­aspects. Le niveau 1 comprend les véhicules qui ne peuvent contrôler qu’un aspect: la direction ou la vitesse.

Par exemple, le régulateur de vitesse adaptatif (ACC). Ensuite, le niveau 2 correspond à une automati­sation qui contrôle la vitesse et la direction en même temps. Il utilise des caméras et des ­capteurs pour brosser un portrait de son environnement immédiat. Le conducteur doit toutefois rester attentif et être prêt à intervenir, car cette ­technologie n’est pas sans faille. Il s’agit du niveau le plus élevé autorisé actuellement sur nos routes européennes.

Quid des niveaux supérieurs?

«Les niveaux 3 et 4 relèvent d’automatisations plus évoluées. Si le niveau 3 implique toujours une ­vigilance particulière, le niveau 4, lui, permet au conducteur de ne pas être forcément attentif à la route. Il lui suffit d’indiquer sa destination dans le GPS. Une nouvelle fois, cette technologie n’est pas sans faille. Enfin, le niveau 5 relève encore pour le moment de la science-fiction. En théorie, ce niveau d’autonomisation ne nécessitera plus de volant ni de pédales.

Au-delà de la technologie, qu’est-ce qui freine encore le déploiement de ces engins sur nos routes?

«La voiture autonome ne possède pas de libre ­arbitre. Elle fait simplement ce pour quoi elle a été ­programmée, sans réfléchir. Se posent donc ­encore de nombreuses questions sur les plans éthique et juridique. Le défi est de programmer des algorithmes d’intelligence artificielle qui permettent la prise de décisions sans intervention de l’Homme.

La généralisation de l’autonomisation de niveau 5 sur les routes pourrait toutefois répondre à l’enjeu capital de la sécurité sur la route…

«On diminuerait en effet sans conteste la sinis­tralité. 80% des accidents de voiture sont liés à des facteurs humains. La voiture autonome, elle, voit tout grâce à ses capteurs. Si un véhicule s’apprête à vous emboutir par la droite dans un carrefour, la voiture aura plus de chances de l’éviter que vous, qui ne pouvez pas la voir arriver.

Il sera toutefois impossible de généraliser du jour au lendemain. Cela peut-il poser des problèmes? Et au Luxembourg?

«En effet, il pourrait y avoir un conflit entre la ­voiture autonome et les véhicules conduits par des humains. Vous êtes par exemple sur l’autoroute, au volant de votre voiture autonome. Celle-ci a ­calculé que pour éviter d’emboutir la voiture ­devant elle en cas de freinage d’urgence, il lui faudra 100 mètres pour s’arrêter. Si un accident se produit, votre voiture va donc immédiatement freiner. Mais les conducteurs derrière vous seront surpris par votre freinage net et risqueront de vous emboutir.

Pour le Luxembourg, il faudra en effet attendre encore quelques années. Mais rappelons tout de même que depuis 2018, une partie du sud du ­Luxembourg, de l’Allemagne et de la France sert de zone ­d’expérimentation pour les chercheurs, qui peuvent y tester leur véhicule autonome.

Pourquoi les États-Unis possèdent-ils une longueur d’avance dans ce domaine?

«En Californie, les Gafa ont décidé de se ­positionner sur ces technologies et se voient bien venir ­concurrencer les constructeurs. Ce sont évidemment des acteurs qui ont un poids considérable et c’est pourquoi, en Californie par exemple, toutes les routes sont ouvertes aux voitures autonomes. Les routes aux États-Unis sont également plus fluides et il y a de grands espaces. Pour une ­voiture ­électrique, c’est plus facile de faire San ­Francisco-Los Angeles que de circuler dans le centre de Paris…»

Cet article a été rédigé pour l’édition «» de février  qui est parue le 27 janvier 2021.

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