Luke Bell explique avoir eu la chance de pouvoir compter sur ses économies. En attendant la reprise des tournées, il a trouvé un emploi de chauffeur de camion, tout comme son épouse. (Photo: Den Atelier)

Luke Bell explique avoir eu la chance de pouvoir compter sur ses économies. En attendant la reprise des tournées, il a trouvé un emploi de chauffeur de camion, tout comme son épouse. (Photo: Den Atelier)

L’équipe de l’Atelier a mobilisé 18 de ses partenaires internationaux, tous actifs dans le domaine de l’industrie musicale, pour évoquer l’impact de la pandémie sur leur quotidien, mais aussi la résilience dont ils font preuve. Une série de témoignages à découvrir chaque semaine via Paperjam et Delano.

Comment votre entreprise s’est-elle adaptée à la crise? Quels sont les changements qui ont affecté votre activité? Comment envisagez-vous le futur?

Luke Bell, tour manager indépendant. – «Nous avons eu de la chance que notre situation financière ne soit pas précaire, nous avons réussi à tenir avec des économies et nos cartes de crédit pour passer le cap sans souffrir, mais nous sommes beaucoup plus chanceux que beaucoup de nos collègues. Nous avons récemment pris des emplois ensemble en tant que chauffeurs de camion Covid sur le site de l’aéroport de Manston, près de chez nous. Cela devrait durer quelques mois et nous espérons pouvoir compter sur cela jusqu’à ce que les tournées reprennent. Évidemment, notre activité de tournée s’est complètement arrêtée et ne nous a pas rapporté un centime depuis mars 2020. Je suis également associé dans une société audio au Royaume-Uni, juste une petite entreprise que nous avons lancée un an avant la pandémie. Nous avons réussi à travailler un peu, car nous avons converti notre installation en un lieu de diffusion en direct. Ce qui permettra à l’entreprise de survivre jusqu’à ce que le travail de tournée soit à nouveau une réalité.»

Dick Meredith, tour manager indépendant. – «Il est impossible de s’adapter quand on n’a aucune perspective dans notre domaine de prédilection, la musique live. Un concert en streaming, ce n’est pas une tournée.»

Rémi Bruggmann, booker & coordinateur artistique du festival de jazz de Montreux. – «La crise a accéléré les plans que nous avions en tant que festival. Le festival a une longue histoire avec les archives audiovisuelles et nous avons voulu pérenniser cela et œuvrer pour proposer les meilleures créations de contenus tout au long de l’année. Nous n’avons pas attendu cette crise pour le faire et cela fait quelques années que nous travaillons sur cette expérience numérique, pour essayer de rester en avance sur les tendances.»

Steffen Rabe, booker pour FKP Scorpio. – «Depuis le 16 mars 2020, j’ai travaillé à temps partiel. J’ai pu faire du télétravail. On suppose que l’on va bientôt voir le retour des spectacles, concerts et tournées, mais rien n’est clair à ce sujet.»

Zöé Caldwell, agent de Blue Man Group et de Circa. – «Je me suis beaucoup adaptée au cours de la dernière année: pays d’origine, travail, et j’ai même un bébé en route maintenant! Les tournées internationales vous apprennent à être très adaptable, alors j’ai continué à tirer parti de ces compétences et je suis restée ouverte à ce que le monde m’amènerait ensuite. L’avenir sera différent, mais j’espère que nous pourrons bientôt reprendre notre vie de voyageurs internationaux.»

Natasha Gregory, agent chez Mother Artists, qui réside au Royaume-Uni et représente Amy Macdonald, IDLES, RY X, Tom Misch, Foster the People. – «Notre entreprise est nouvelle (décembre 2020), donc on pourrait dire que c’est en partie à cause de la pandémie que nous avions le temps de travailler sur une nouvelle entreprise qui incarnerait qui nous sommes, ce que nous représentons et ce qui est important en ces temps. Empathie, travail acharné et respect ont été au premier plan. Tout en étant prêts à s’adapter à chaque tournant de la pandémie.»

Clotaire Buche, agent Junzi. – «Nos employés sont en congé, nous adaptons la production de nos spectacles pour que nos artistes puissent jouer devant un public plus restreint, assis. Mais tout reste incertain.»

Dany Hassenstein, booker du Paléo Festival Nyon. – «La technologie pour le télétravail était déjà implantée dans notre entreprise avant la crise et a donc été mise en œuvre très facilement. En termes d’innovation, nous travaillons sur un nouvel événement compatible Covid pour 2021. Et de nouvelles expériences pour le public.»

Josh Javor, agent, X-Ray Touring. –«J’ai fermé le bureau, et pris beaucoup de congés…»

Rahel Feidler, production manager, Showtime! Entertainment Services. –«Nous avons commencé à chercher un travail alternatif pour nous maintenir la tête hors de l’eau. Filip a rapidement trouvé du travail dans le secteur de la construction. Pour ma part, j’ai même essayé de trouver du travail en tant qu’employée dans l’administration, mais aucune des nombreuses demandes d’emploi n’a abouti. La raison: la plupart de mes employeurs ‘normaux’ me demandaient si je voulais revenir après cette crise. Question à laquelle j’ai toujours répondu oui, et comme personne ne pensait que cette situation durerait aussi longtemps, j’ai été refusée à chaque fois par ailleurs. Pour remplir mes journées, je me suis inscrite à un cours d’agent de conformité Covid-19 et j’ai renouvelé mes certificats SCC et de secourisme. Fin août, j’ai enfin trouvé un petit boulot en Allemagne, pour diriger une station de tests Covid temporaire sur une autoroute. Après cela, des événements virtuels sont apparus, où j’ai pu utiliser mon expérience dans la gestion de la scène et de la télévision. J’ai décidé de me concentrer là-dessus. Grâce à mon vaste réseau, j’ai eu l’opportunité de rejoindre l’équipe qui coordonne et anime techniquement les réunions virtuelles au Parlement européen pour les deux prochains mois. Pas vraiment rock’n’roll, mais au moins ça m’offre un revenu régulier.»

Björn Harder, tour & stage manager, Try Harder Productions GmbH. –«Comme le monde semble se transformer, j’ai aussi évolué. J’ai le sentiment que l’industrie du divertissement sera encore autant désirée dans le futur. Je ne vois que des divertissements qui seront financés par l’État, ce qui sera la fin de l’art tel que nous le connaissons.»

Jan Smeets, agent & booker, Live Nation Belgium, Rock Werchter. –«Comme nous étions obligés de travailler à la maison, nous avons trouvé notre chemin vers des réunions virtuelles grâce à Zoom. La tendance des événements en streaming a semblé intéresser, par conséquent, nous suivons cette évolution de près. En l’état actuel des choses, 2022 ressemble à un goulot d’étranglement de concerts, nous craignons donc la sursaturation du marché. Au contraire, nous sommes convaincus que l’équilibre sera rétabli à partir de 2023.»

Silvio König, tour manager & production manager, Thirteen Fourteen Productions. –«Hum… s’adapter? Pas vraiment. Nous avons fait des streams et des enregistrements. Mais rien de cool comme nous l’avions fait avant! J’espère que la vaccination va continuer et vite.»

Ton Maessen, tout manager indépendant. – «Aucune adaptation n’a été possible, c’est un arrêt. Ce n’est que lorsque nous pourrons à nouveau remplir les salles que notre entreprise deviendra économiquement viable.»

Alex Bruford, agent, ATC Live. – «Nous avons dû procéder à des réductions d’effectifs l’an dernier, principalement dans les services administratifs qui soutiennent les tournées. Depuis lors, nous avons maintenu l’équipe unie et nous nous sommes concentrés sur la préparation du redémarrage de l’entreprise et sur la recherche d’autres opportunités pour nos artistes, à savoir la diffusion en direct et le branding. À travers le groupe de sociétés ATC, nous avons lancé Driift – dirigé par Ric Salmon et Brian Message –, une société devenue un producteur et un promoteur de premier plan d’événements de diffusion en direct. De plus, nous avons utilisé notre temps pour nouer de nouvelles relations, notamment en annonçant le partenariat d’ATC Live avec la nouvelle agence américaine Arrival Artists.»

Silke Westera, booker, FKP Scorpio. –«Je pense que pour une si grande entreprise, l’adaptation n’est pas aussi simple que pour les plus petites. Nous ne changeons pas de ‘core business’ bien sûr et sommes optimistes pour pouvoir travailler à nouveau, espérons-le, bientôt. Mais bien sûr, nous nous préparons aux ajustements que nous pourrions devoir apporter à l’avenir au niveau de la production.»

Dirk «Bats» Dillen, électricien, Powershop. – «J’ai essayé de m’occuper d’autres choses. Mais la vie normale devra impérativement revenir bientôt.»

Danny Simons, agent, Grand Hotel van Cleef Musik GmbH. –«Nous avons dû réduire nos activités et nous nous sommes concentrés sur les artistes capables de jouer dans des salles ‘corona safe’… Cela fonctionne pour le moment, mais en raison des coûts liés au concept, il devient encore plus difficile de programmer de nouveaux artistes.»