Les apps de traçage peinent à convaincre les Européens. Les freins à son adoption sont nombreux, ont montré deux membres de l’Association pour la protection des données au Luxembourg, ce jeudi soir. (Photo: Shutterstock)

Les apps de traçage peinent à convaincre les Européens. Les freins à son adoption sont nombreux, ont montré deux membres de l’Association pour la protection des données au Luxembourg, ce jeudi soir. (Photo: Shutterstock)

Au moment où la France lançait la deuxième version de son application de traçage contre le Covid-19, deux membres de l’Association pour la protection des données au Luxembourg, Emma Goodwin et Renaud Le Squeren, évaluaient ces apps dans le cadre de la Cybersecurity Week. Bilan… mitigé.

«L’évolution des applications de traçage n’a pas suivi celle de la connaissance scientifique du virus. C’est bizarre et très intéressant.» Administratrice de l’Association pour la protection des données au Luxembourg, Emma Goodwin clôture un webinar, organisé dans le cadre de la , par quelques remarques qui illustrent bien pourquoi les Européens, en général, ont du mal à adopter les applications de traçage lancées dans leur pays respectif.

«Il reste plusieurs obstacles. En premier lieu, le comportement humain. Les gens qui ont été testés positifs sont réticents à enregistrer leurs résultats dans le système de traçage, par peur de risquer de perdre leur travail ou pour d’autres raisons», avance-t-elle. «Dans une certaine mesure, le décalage entre le test et la mise à disposition des résultats a aussi sapé les applications de traçage. En plus, en dépit de nombreux téléchargements, leur valeur ajoutée reste à voir: aucune étude scientifique n’a testé si elles peuvent réduire la transmission du virus, et les protections de sécurité rendent difficiles les mesures nécessaires pour permettre aux pays de les évaluer.»

La centralisation des données sur un serveur sous le contrôle de l’État, solution uniquement choisie par la France, pose le risque que toutes les données tombent entre des mains mal intentionnées en une seule fois, à la différence d’une approche décentralisée (où les données restent dans le smartphone)… mais «la technologie Bluetooth est connue pour son exposition aux risques de cyberattaques», explique Mme Goodwin. «Même le niveau de sécurité des smartphones est variable. Bref, l’efficacité et la sécurité des applications de traçage restent à démontrer.»

«La collecte des données personnelles pose des risques potentiels pour la vie privée, l’égalité et l’équité. Même si ces applications sont temporaires, leur déploiement rapide risque de créer des dossiers instables et permanents qui touchent la santé, la localisation et les contacts des gens, sujets sur lesquels ils ont peu de contrôle», indique-t-elle encore, tandis que l’autre intervenant de ce webinar, l’avocat (), ne nie pas ces problématiques mais invite à demander accès aux données que les opérateurs détiennent sur chacun de nous. «Je suis sûr qu’on se rendra compte qu’ils sont beaucoup plus intrusifs que ces applications.»

L’avocat venait de passer à la loupe les caractéristiques de la deuxième version de l’application française, StopCovid devenue TousAntiCovid. Selon lui, aucun des aspects technologiques qui posaient problème n’a été modifié. L’application s’est enrichie de nouvelles rubriques, comme les centres de dépistage où faire un test – utile quand on voit les difficultés à faire un test – ou un QR code pour enregistrer les endroits où l’on passe au lieu de devoir remplir des registres sur papier qui peuvent poser d’autres difficultés.

La première version de l’application a été téléchargée par 2,3 millions de personnes, soit 3% de la population là où et 700.000 personnes l’ont supprimé presque aussitôt. La probabilité d’être informé d’un cas positif est très faible.

Comme l’ont aussi expliqué de nombreux articles, de nombreux positifs ne renseignent pas l’application, exactement au moment où ils devraient le faire.

Qu’importe, pour l’avocat, compte tenu à la fois de la masse d’informations que nous laissons volontairement sur internet et sachant que cette application est un outil parmi d’autres, il faudrait la télécharger et l’utiliser, malgré les limites communément admises.

À ces limites, il faut ajouter celles nées de l’usage même des applications, dont .

Le Luxembourg s’est toujours refusé à lancer une application de traçage, mais il existe un protocole de suivi des cas positifs, Maela, qui prévoit un contact tous les deux jours avec les autorités sanitaires pour les cas positifs.