Selon Antonio Caetano, au début de la pandémie, pour répondre à la demande, certains produits commercialisés ne répondaient pas à toutes les garanties. (Photo: Delano.lu)

Selon Antonio Caetano, au début de la pandémie, pour répondre à la demande, certains produits commercialisés ne répondaient pas à toutes les garanties. (Photo: Delano.lu)

Six des dix produits de désinfection des mains achetés au hasard au Luxembourg contenaient des informations vagues ou inexistantes sur leur efficacité à stopper la propagation du coronavirus. Et seulement deux d’entre eux s’avèrent enregistrés dans le Registre des produits biocides, révèle Delano.

Sur un panier de dix gels hydroalcooliques achetés au hasard dans les magasins du Luxembourg pendant la pandémie, seuls quatre produits sur dix ont été jugés conformes aux normes professionnelles de nettoyage, selon un expert sollicité par . «Les six autres gels sont-ils mauvais? Non, parce que c’est mieux que rien du tout. Mais, en tant que professionnel, je dois bénéficier d’un produit qui garantit une hygiène parfaite», a déclaré Antonio Caetano, directeur de la société de produits de nettoyage professionnels Boma Luxembourg, à Delano le 12 août.

Titulaire de la certification «Fachwirt in Reinigung und Hygiene», qui le qualifie pour conseiller les entreprises en matière de matériaux et de méthodes de nettoyage, cet expert affirme que, pour une efficacité maximale contre le SARS-CoV-2, l’Organisation mondiale de la santé (OMS) recommande d’appliquer sur les mains une solution composée de 60 à 80% d’alcool (éthanol, isopropanol ou n-propanol, ou une combinaison de ces éléments). Antonio Caetano applique, de son côté, le seuil de 70%, car un mélange d’alcool à hauteur de 60% ne tuera pas toutes les bactéries. 

Cependant, l’étiquetage approximatif des produits rend difficile leur compréhension et il n’est donc pas aisé de savoir si un gel répond à ce critère. Normalement, cette information est incluse dans la fiche technique qui accompagne un produit professionnel, qui serait fournie au détaillant. Toutefois, les fabricants et les distributeurs ne sont pas tenus de remettre cette fiche aux consommateurs.

Au sein du panier de produits examinés, un produit acheté dans un supermarché au début de la pandémie semblait même ne pas contenir d’alcool. Il est à noter que le produit n’était plus en vente à la fin juillet. Sur la majorité des étiquettes de ces produits, le contenu était vague, suggérant qu’ils contenaient de l’alcool sans en préciser la proportion. Sur l’étiquette d’un autre produit, il était noté qu’il contenait au moins 65% d’alcool, une proportion insuffisante pour tuer tous les virus.

Entre les mailles du Registre des produits biocides

Une autre considération à prendre en compte pour les gels ou liquides hydroalcooliques est qu’ils doivent être enregistrés au Registre des produits biocides pour être commercialisés au Luxembourg. Le registre garantit que les désinfectants, les agents de conservation et les produits antiparasitaires sont conformes aux exigences de sécurité européennes et nationales.

Antonio Caetano souligne qu’au début de la pandémie, plusieurs produits sont passés entre les mailles du filet pour répondre à la demande pressante. Il confirme, par exemple, que les pharmaciens pouvaient fabriquer leurs propres désinfectants pour les mains, afin d’accompagner la forte demande: «Il n’est pas compliqué de créer un gel pour les mains. Tout ce dont vous avez besoin, c’est de l’alcool, un stabilisateur et un gel.»

Les dix gels hydroalcooliques achetés au hasard dans les magasins du Luxembourg pendant la pandémie. (Photo: Delano.lu)

Les dix gels hydroalcooliques achetés au hasard dans les magasins du Luxembourg pendant la pandémie. (Photo: Delano.lu)

Selon les réponses des ministères de l’Environnement et de l’Éducation à une question parlementaire, l’État luxembourgeois a lui-même importé 56.000 bouteilles de désinfectant médical Lionser, un désinfectant pour les mains fabriqué en Chine qui, à l’époque, n’était pas inscrit au Registre des produits biocides. Le produit a été distribué dans les écoles et d’autres services publics liés à la gestion de crise. Le 20 juillet, 74 produits biocides figuraient sur la plus récente liste des produits de nettoyage des mains. Sur ce total, seulement deux produits du panier compilé au hasard ont été identifiés dans le registre. Certains des désinfectants pour les mains n’ont peut-être pas été répertoriés parce qu’ils étaient sans alcool et qu’ils utilisaient à la place des composés d’ammonium quaternaire. Ceux-ci peuvent réduire les microbes, mais sont considérés comme moins efficaces que l’alcool.  

Des contrôles par les autorités nationales

Dans sa réponse à la question parlementaire, le ministère de l’Environnement a déclaré que son administration effectue des contrôles sur les produits biocides trouvés sur le marché. Au moment de la rédaction de cet article, il n’avait pas répondu à la question de Delano sur le nombre de contrôles effectués et sur leurs conclusions.

Un porte-parole de l’Agence européenne des produits chimiques (ECHA), qui fait partie d’un groupe axé sur l’application de la réglementation des produits biocides, a déclaré que les États membres avaient signalé une augmentation du nombre de «désinfectants non conformes sur le marché, et des inspecteurs ont pris des mesures pour faire respecter les manquements».

Selon l’ECHA, les autorités nationales sont responsables de la conduite des inspections du marché et du contrôle des ventes en ligne. Elles peuvent imposer des amendes et retirer des produits de la vente.

Mieux que le gel: se laver les mains

Dans tous les cas, Antonio Caetano affirme que le gel pour les mains ne devrait être considéré comme une alternative que lorsqu’il n’est pas possible de se laver les mains avec du savon et de l’eau pendant 30 secondes. «Si quelqu’un peut se laver les mains avec de l’eau et du savon, c’est assez pour tuer le SARS-CoV-2», conclut ce spécialiste.