Les analystes de la banque Edmond de Rothschild anticipent les effets d’un resserrement des politiques monétaires. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Les analystes de la banque Edmond de Rothschild anticipent les effets d’un resserrement des politiques monétaires. (Photo: Matic Zorman/Maison Moderne)

Si l’environnement reste positif pour les actions, il devrait également devenir plus volatil en fonction des évolutions de l’inflation et des politiques monétaires, estime la banque Edmond de Rothschild pour qui un changement de régime est en cours.

Ce changement de régime, c’est un retour vers l’ancien monde, où les valorisations des actifs reposaient sur des fondamentaux économiques. Toute la question est de savoir si cette transition se fera en douceur ou pas.

Dans «un environnement où la conjonction inhabituelle de la reprise et des injections massives de liquidités maintient les marchés à des niveaux éloignés des normes usuelles de valorisation ou de comportements traditionnels dans cette phase du cycle», les décisions de la FED sont scrutées par tous les investisseurs. Avec le risque d’une surréaction, analyse la banque. Toute la question sera de savoir si la Banque fédérale américaine saura communiquer de façon telle que, lors d’un basculement vers une politique monétaire plus traditionnelle – et donc la fin du soutien «mécanique» aux actuels niveaux de valorisation des actifs –, les investisseurs ne paniquent pas, rendant les marchés erratiques.

Un exercice de style compliqué par le rebond de l’inflation. Un rebond dont la question de savoir s’il est transitoire ou appelé à durer n’est pas tranchée. «Nous devrions assister cet été au pic de la reprise mondiale et de l’inflation, ne serait-ce que par le jeu des effets de base, mais aussi probablement en raison de l’annonce de la Réserve fédérale sur la possibilité de réduire ses injections de liquidités en 2022. Pour autant, la question de la dynamique de l’inflation dépasse les effets de base. Le sujet pour les investisseurs sera de mesurer, au-delà du rebond ponctuel de l’inflation imputable à des pénuries, si une mécanique inflationniste se met en place aux États-Unis, en particulier via une accélération des salaires», analyse la banque.

Vers une hausse de la volatilité

Les fondations de ce qui pourrait constituer un changement de régime posées, on présage chez Edmond de Rothschild «un environnement qui demeure positif pour les actifs risqués sur un horizon prévisible, mais potentiellement plus volatil». Conséquence, les risques des allocations actuelles ont été réduits dans les portefeuilles.

«Dans cet environnement de croissance forte, d’inflation plus erratique et d’interrogations sur l’impact qu’aura le changement de régime de la Réserve fédérale, il va sans dire que les marchés d’actions conservent plus d’attrait que les marchés obligataires. À l’heure où la discrimination au sein des marchés d’actions s’opère surtout au niveau factoriel, nous continuons de penser qu’il convient de garder un bon équilibre entre la croissance, la qualité et la value et de se concentrer sur les grands thèmes porteurs sortis renforcés de la crise, à savoir le capital humain, la santé, le big data et la transition énergétique.»

D’un point de vue géographique, Edmond de Rothschild privilégie les actions européennes et japonaises aux actions américaines, les premières affichant un levier plus important sur ce cycle de reprise qui s’annonce jusqu’à la fin de l’année prochaine.

Attractivité chinoise

Et parie sur les actions chinoises. «Si elles ont contre-performé au cours du premier semestre, leur valorisation est redevenue relativement attractive face au reste du monde, tandis que les autorités s’emploient à canaliser l’épargne abondante vers les marchés financiers et éviter la spéculation vers d’autres actifs – sur le bitcoin, les matières premières, l’immobilier, etc. Enfin, à l’heure où toutes les interrogations sont portées sur le durcissement de la politique monétaire des grandes banques centrales comme la Fed et la BCE, la Chine fera figure d’exception étant donné qu’elle n’a pas mis en œuvre de mesures extraordinaires durant la crise. Le marché chinois n’a pas bénéficié de l’inondation de liquidités cette année; il ne pâtira pas non plus de son tarissement et peut donc faire la différence au cours des prochains mois. Certes, la Chine ne participe pas pour l’heure à l’accélération de l’activité mondiale. Mais gageons que l’intensification de la campagne de vaccination améliorera les conditions économiques et que le franc succès des autorités à rétablir la stabilité financière leur permettra de desserrer un peu les contraintes mises en place.» 

Quant aux obligations, elles restent globalement moins attractives pour Edmond de Rothschild. «La problématique de l’inflation n’étant pas résolue et la Fed se rapprochant d’un début de normalisation de sa politique monétaire, les emprunts d’État ou les obligations d’entreprises Investment Grade n’offrent ni rendement ni intérêt dans un portefeuille diversifié. En effet, dans le cadre d’une remontée des craintes d’inflation ou de tarissement de la liquidité impactant les marchés, ces obligations ne joueraient pas leur rôle de valeur refuge. Les obligations subordonnées financières demeurent intéressantes à nos yeux, car elles offrent encore un certain rendement et une faible sensibilité au risque de taux, dans un environnement où la reprise est positive pour le secteur financier.»