La voiture électrique est-elle vraiment verte? Non, a répondu en substance l’expert d’Attac Winfried Wolf, appelant à limiter à 10% les trajets en voiture pour limiter les dommages à l’environnement. (Photo: Shutterstock)

La voiture électrique est-elle vraiment verte? Non, a répondu en substance l’expert d’Attac Winfried Wolf, appelant à limiter à 10% les trajets en voiture pour limiter les dommages à l’environnement. (Photo: Shutterstock)

Pour la première fois, mardi soir à la Chambre des salariés, le ministre de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire, Claude Turmes, a défendu son plan climat, présenté vendredi après-midi. Appelant à passer d’une adhésion de principe à l’action.

La soirée se terminait. Tranquillement. Devant 300 à 400 personnes réunies par la Chambre des salariés et le syndicat des transports FNCTTFEL, le ministre de l’Énergie et de l’Aménagement du territoire avait passé une soirée tout en sourires à écouter puis débattre de la voiture électrique avec Winfried Wolf, membre du Conseil consultatif scientifique d’Attac et rédacteur en chef de Lunapark21, une revue d’analyse critique de l’économie mondiale. Ce débat était modéré par la présidente du Mouvement écologique, .

La soirée se terminait tranquillement quand quitta sa position enfoncée dans son fauteuil noir pour avancer et mieux se camper sur ses jambes. Le ton se fit plus dur. «Je m’attendais à un accueil ‘Super, on a un plan climat! Allons-y!’», disait-il avec force. Des actes plutôt que des paroles. «Nous avons une taxe carbone! Nous avons décidé d’investir trois fois ce que la Suisse investit sur le sujet par habitant! Nous avons introduit une dimension sociale, qui bénéficiera de la moitié des recettes de la taxe!»

Selon les documents du ministère, diffusés en début de semaine, cette taxe devrait rapporter environ 150 millions d’euros la première année, en 2021. «Environ» parce que les documents ne précisent pas les émissions pour les mêmes années que celles du déploiement de la taxe: 2020 et 2025 pour les émissions, 2021, 2022 et 2023 pour la taxe. Et parce que les chiffres ne sont pas encore totalement gravés dans le marbre: une fois que le débat et le vote auront eu lieu à la Chambre des députés, ils seront fixés dans différents règlements grand-ducaux. 

Le double effet de bord de la voiture électrique

Le ministre et l’activiste n’étaient pas foncièrement en désaccord, le second étant seulement plus radical que le premier. Là où le premier prévoit, dans son plan, de réduire le nombre de voitures et de faire en sorte que celles qui restent soient propulsées par des énergies propres, le second n’aura eu qu’une seule réponse: 0 voiture.

Après avoir dressé un tableau noir des effets de la voiture sur la pollution, M. Wolf a évoqué l’effet «sac à dos» des véhicules électriques. «À la Foire internationale de Francfort, Porsche a présenté une Taycan, à 100% électrique, qui vaut 70.000 euros (en réalité, elle sera commercialisée en janvier à plus de 155.000 euros, ndlr), qui pèse plus de deux tonnes et fournit 300 chevaux. Le problème, c’est qu’outre le côté impayable, ces voitures partent avec un sac à dos: il leur faudra parcourir au moins 30.000 kilomètres pour que leur avantage en termes de CO2 puisse s’exprimer!»

Le représentant d’Attac évoquait aussi un effet boomerang: quand une grande ville, par exemple, décide de bannir le diesel, «les gens qui ont les moyens s’offrent une deuxième voiture, électrique, pour leurs déplacements en ville. Du coup, on ne remplace pas une voiture par une voiture électrique, mais on ajoute une voiture électrique à sa voiture.» Une problématique qui se généralise même en l’absence de mesures spécifiques. Selon lui, à chaque fois que le pourcentage de nouvelles immatriculations électriques augmente, le pourcentage de véhicules plus polluants augmente cinq à 20 fois plus vite.

Comment faire face à la prolifération de voitures? «Faut-il augmenter le prix du carburant? Moi, ça ne me dérange pas!», a lancé le ministre qui a abandonné sa voiture dans les années 1990, avant d’évoquer une limitation des places de parking dans les projets de construction, par exemple, comme une des pistes, au côté de l’offre de mobilité douce ou de transports publics qui doit non seulement s’étoffer mais parvenir à atteindre les villages les moins connectés.