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Jean-Pascal Nepper, associé advisory et head of customer & operations, KPMG 

En effet, les gigantesques bouleversements technologiques que nous connaissons depuis plusieurs années trouvent souvent leur genèse dans un besoin sans cesse plus fort et plus pressant de placer le client et l’expérience client au centre de la transformation digitale. «Le client est roi», qui est sans doute une des expressions les plus convenues de ces 20 dernières années, mille fois prononcée, mille fois entendue, est en train de prendre une tout autre signification dans le monde digital: ce «roi» est tout simplement en train de dire aux entreprises ce qu’elles doivent faire! Le pouvoir est clairement passé des entreprises vers les consommateurs et le processus de prise de décision de ceux-ci est devenu plus volatile que jamais.

Ceci étant, si la transformation digitale doit avoir pour principale ambition d’améliorer l’expérience client, il faut néanmoins reconnaître que c’est devenu un exercice d’équilibriste pour bon nombre d’entreprises, prises entre le marteau d’une concurrence exacerbée les poussant à s’engager dans une démarche digitale tous azimuts et l’enclume d’un client volage toujours plus difficile à cerner et à satisfaire.

La barre est sans cesse plus haute.

Jean-Pascal NepperJean-Pascal Nepper, Associé advisory, head of customer & operations (KPMG)

Et c’est vrai, il faut le reconnaître, aujourd’hui, en tant que clients, «nos meilleures expériences sont devenues nos références», c’est-à-dire que nous ne comparons plus les services et l’offre d’une entreprise par rapport à ses concurrents mais bien par rapport à une meilleure expérience que nous aurions eue précédemment, quel que soit le secteur concerné. Et la barre est sans cesse plus haute. En effet, il ne s’agit plus pour nous de, par exemple, comparer les web banking de nos différentes banques, car ce que nous voulons intrinsèquement, ce que nous exigeons même, c’est que les interactions que nous avons avec notre web banking soient aussi souples, aussi simples, aussi immédiates et aussi intuitives que celles que nous pouvons avoir avec, par exemple, un Amazon ou un Netflix. Par ailleurs, quelle n’est pas notre surprise quand l’écran du distributeur de billets n’est même pas tactile! Ou pourquoi diable faut-il plus de trois clics sur ce site pour commander les mêmes sushis que je commande chaque semaine? L’offre digitale de certaines fintech n’est finalement que l’application au monde de la finance d’une offre digitalisée déjà présente dans d’autres secteurs lorsque, par exemple, conclure un contrat de gestion de patrimoine avec un robo-advisor semble presque aussi aisé, intuitif et immédiat que commander des chaussures sur Zalando.

Mais il serait trop simple, bien entendu, de réduire l’expérience client à la simple digitalisation et d’imaginer ainsi que la transformation digitale peut répondre, seule, aux attentes des clients.

L’importance de l’empathie, de la capacité à se mettre à la place du client, ne doit certainement pas être sous-estimée.

Jean-Pascal NepperJean-Pascal Nepper, Associé advisory, head of customer & operations (KPMG)

En effet, notre téléphone mobile est peut-être devenu la télécommande de nos vies, nous marchons peut-être inexorablement vers une nouvelle génération d’expériences client digitalisées et nous verrons peut-être, ou même sans doute, nombre de rôles commerciaux remplacés par des bots, des technologies cognitives ou de l’intelligence artificielle, mais l’importance des interactions humaines dans l’expérience client, de l’empathie, de la capacité à se mettre à la place du client, ne doit certainement pas être sous-estimée.

Au sein de KPMG, nous avons identifié six piliers qui, selon nous, sont les éléments constitutifs de toute expérience client. Ces éléments revêtent bien entendu une importance relative diverse en fonction des individus, de leur culture, du contexte, ou même du moment au cours duquel ceux-ci sont exposés à une relation commerciale:

Il apparaît aujourd’hui que les entreprises innovantes structurent non seulement leur démarche commerciale, mais aussi toute leur organisation «front-to-back», autour des parcours et de l’expérience client, tentant ainsi de maintenir un savant équilibre entre une offre digitale permettant de mener à bien des tâches routinières ou répétitives dans un environnement personnalisé (piliers «Personnalisation» et «Effort») et des interactions humaines aux moments critiques ou opportuns (piliers «Empathie», «Intégrité» ou «Résolution»). Il ne fait en effet aucun sens pour une compagnie aérienne de m’offrir un accès digital aisé pour mon enregistrement si elle est par ailleurs incapable de m’aider à récupérer mes bagages égarés.

Ainsi cette forme d’émulation digitale transversale à tous les secteurs ne doit-elle pas devenir une course effrénée au «tout digital», car c’est d’abord et avant tout la qualité de l’expérience client qui doit présider à la définition et à la mise en place des moyens adéquats, fussent-ils humains ou digitaux.