Le monopole du LNS en matière d’analyses anatomopathologiques est contesté par les laboratoires privés. (Photo: Sébastien Goossens)

Le monopole du LNS en matière d’analyses anatomopathologiques est contesté par les laboratoires privés. (Photo: Sébastien Goossens)

Le combat continue pour les Laboratoires réunis, qui avaient vu le tribunal administratif pencher en leur faveur dans sa décision du 27 avril dernier, publiée plusieurs semaines plus tard. Ils avaient porté recours contre le refus du ministère de la Santé, en octobre 2015, de leur accorder l’autorisation d’ouvrir une filière en analyses anatomopathologiques – celle qui concerne tous les prélèvements de tissus effectués en matière d’oncologie, par exemple.

Le tribunal administratif a démonté l’argumentaire du ministère de la Santé justifiant la conservation par le LNS du monopole sur les analyses anatomopathologiques. «Compte tenu d’une population d’environ 540.000 habitants au Grand-Duché de Luxembourg et de la capacité potentielle d’évolution du laboratoire d’anatomie pathologique actuellement en fonction (plus de 50.000 analyses anatomopathologiques par an ces dernières années), il n’y a pas actuellement d’obligation ou de raisons impérieuses de créer un ou plusieurs nouveaux laboratoires d’anatomie pathologique», expliquait la ministre dans ses conclusions.

Le LNS est l’acteur qui se prête le mieux pour assurer des analyses anatomopathologiques et dans le domaine de la génétique humaine pour notre population.

Lydia Mutsch, ministre de la Santé

Soulignant la légèreté de l’argumentation de l’État, le tribunal administratif a au contraire considéré que «le ministre est parti du postulat selon lequel le besoin national coïnciderait avec les intérêts du LNS du seul fait que celui-ci dispose d’un monopole étatique de fait».

Mais Lydia Mutsch persiste et signe. «Je pense que de par la situation géographique, l’élaboration des besoins nationaux et l’identification des besoins existants, le LNS est l’acteur qui se prête le mieux pour assurer des analyses anatomopathologiques et dans le domaine de la génétique humaine pour notre population», confiait-elle à Paperjam la semaine dernière. «J’ai interjeté appel de ce jugement du tribunal administratif et ce sera à la Cour administrative de se prononcer quant à l’opportunité de maintenir la centralisation des analyses dans le domaine anatomopathologique au sein du LNS.»

La ministre se sent d’ailleurs confortée dans cette conviction par le fait que la commission parlementaire de la santé a confirmé le rôle central du LNS lors de l’examen du projet de loi sur les établissements hospitaliers et la planification hospitalière. Le texte consacre en effet l’identité de fait entre le centre de diagnostic en anatomopathologie et en génétique et le LNS: «Les examens relevant de l’anatomopathologie et de la génétique humaine sont effectués exclusivement dans le centre de diagnostic visé à l’article 2, paragraphe 4 de la loi du 7 août 2012 portant création de l’établissement public ‘Laboratoire national de santé’.»

Soutien de la commission santé et du Conseil d’État

Une position que partagent non seulement la commission santé – en tout cas ses députés de la majorité gouvernementale, ceux de CSV s’étant abstenus lors de l’adoption des derniers amendements -, mais aussi le Conseil d’État, qui indiquait dans son avis du 23 décembre dernier qu’il «comprend également qu’un besoin sanitaire, abondamment développé dans le commentaire de l’article, justifie que cette activité de laboratoire soit centralisée au niveau national auprès d’un acteur, et qu’il est judicieux que l’acteur à qui sera confiée cette tâche nationale soit un établissement public. Les arguments avancés soulignent les raisons impérieuses d’intérêt général qui justifient une telle restriction à la liberté d’établissement dans ce domaine.» C’est même le Conseil d’État qui a recommandé au législateur d’inscrire noir sur blanc l’anatomopathologie comme mission de service public assurée par le LNS. Idem pour le centre de diagnostic en génétique humaine.

Forte de l’appui de la commission santé et du Conseil d’État, et même si les Laboratoires réunis comptaient pour leur part sur le soutien du Collège médical et de la Commission consultative des laboratoires, Lydia Mutsch espère ainsi convaincre la Cour administrative du bien-fondé du monopole ménagé au LNS depuis sa création officielle en 1897.

Ce sont des acteurs importants du secteur de la santé.

Lydia Mutsch, ministre de la Santé

La ministre de la Santé prend toutefois soin de rester à l’écoute des Laboratoires réunis. C’est d’ailleurs elle-même qui a annoncé à ses dirigeants, présents lors de la dernière quadripartite santé fin avril, la décision du tribunal administratif prononcée le matin même. Elle les a également invités, ainsi que les représentants de la FLLAM, à la rencontrer ce mercredi afin d’évoquer cette affaire. «Je suis d’avis qu’il faut toujours rester en dialogue, et ce sont des acteurs qui font preuve d’un certain dynamisme, qui se sont bien établis au Grand-Duché, qui ont un rayonnement qui va au-delà des frontières luxembourgeoises. Ce sont des acteurs importants du secteur de la santé.»

Avec tout le respect qui se doit entre les deux parties, le combat se poursuivra donc devant la Cour administrative dans les prochains mois. Sa décision sera définitive et obligera l’une et l’autre partie. Les juges auront donc entre leurs mains l’avenir des analyses anatomopathologiques et indirectement du LNS et des laboratoires privés au Luxembourg.