«Parmi les autres obligations, après l’émission, l’émetteur doit assurer un reporting régulier des investissements faits avec les fonds levés», précise Christian Merlyn. (Photo: ING Luxembourg)

«Parmi les autres obligations, après l’émission, l’émetteur doit assurer un reporting régulier des investissements faits avec les fonds levés», précise Christian Merlyn. (Photo: ING Luxembourg)

La sauvegarde de la planète est devenue l’une des priorités pour les acteurs politiques et économiques de notre société. Les investisseurs sont également de plus en plus concernés par le réchauffement climatique, car celui-ci pourrait avoir un impact négatif sur le rendement de certains de leurs investissements à long terme. C’est dans ce contexte que sont apparus les «Green Bonds» («obligations vertes» en français).

La Banque européenne d'investissement (BEI) a émis en 2007 une première obligation dite de «sensibilisation climatique». En 2009, l’accord de Copenhague a créé un fonds devant mobiliser 100 milliards de dollars par an d'investissements dans des projets liés au climat. De plus, les exigences réglementaires grandissantes en termes de gouvernance économique et sociale ont permis l’essor du marché des Green Bonds. Fin 2015, l’univers des obligations «liées à l’environnement» atteignait presque 600 milliards de dollars. 

En quoi consiste un «Green Bond»?

Les Green Bonds sont des titres à revenu fixe dont les capitaux levés servent à financer des projets environnementaux ou liés au climat. En plus d’analyser les critères standard des obligations (comme la maturité, le coupon, le prix, la qualité de crédit de l'émetteur), les investisseurs évaluent la finalité environnementale des projets que ces titres ont l'intention de financer. Les agences de notation sont partiellement remplacées par des «Second Party Opinion Providers », des organisations indépendantes censées vérifier le bon usage des capitaux. Le développement du marché des Green Bonds est donc un outil essentiel dans la facilitation de l'allocation du capital aux projets portant sur le réchauffement climatique et dans le développement durable d’une économie verte. 

Les Green Bonds se classent en deux catégories. Les «unlabelled bonds» (532 milliards de dollars d’actifs à ce jour) sont ceux dont les émetteurs ne prévoient pas de vérification externe de l'utilisation des fonds en raison de la nature de leurs activités. C’est par exemple le cas des sociétés d'énergie renouvelable. Les émetteurs de «self-labelled bonds» (66 milliards de dollars) sont en revanche obligés de se faire contrôler par des agences indépendantes. Parmi ces agences, les plus importantes sont Cicero, Vigeo et Oekom. Récemment, nous remarquons un véritable engagement des agences de notation, notamment Moody’s. Un certain nombre d'initiatives visant à créer une définition claire et à fixer des structures communes pour les Green Bonds sont apparues ces dernières années. 

Généralement, les «self-labelled» Green Bonds donnent droit au même recours envers l’émetteur et se classent donc «pari passu» avec les obligations ordinaires. Néanmoins, ils diffèrent de ces dernières sur trois aspects. Premièrement, avant l’émission, l’émetteur doit dévoiler les projets dans lesquels les fonds seront employés et idéalement chercher un réviseur externe. Ensuite, en fonction de ces informations, les investisseurs doivent évaluer si les obligations remplissent leur mandat environnemental. Finalement, après l’émission, l’émetteur doit assurer un reporting régulier des investissements faits avec les fonds levés.

Un univers diversifié et une large gamme d’émetteurs

Sur l’ensemble de leur univers, les Green Bonds chinois - émis en yuan - représentent plus du tiers du marché. China Railways a en effet émis pour l’équivalent de 172 milliards de dollars. Suivent les émetteurs américains, britanniques et français. En termes de devises, le yuan, le dollar et l’euro se retrouvent logiquement sur le podium. Concernant les projets financés, on observe une concentration sur le secteur des transports en commun, encore une fois grâce à China Railways. Néanmoins, le plus grand nombre d'émetteurs sont issus du secteur de l’énergie et le financent. Ils sont suivis de loin par les projets pour «les bâtiments et l’industrie» et pour les «déchets et la pollution».

Parmi les «self-labelled bonds», nous retrouvons plusieurs types d’obligations. Les agences sont représentées par les banques de développement comme la BEI ou KfW (Kreditanstalt für Wiederaufbau). Les obligations émises par les entreprises (« corporates ») et les banques sont présentes en grand nombre avec des émetteurs comme Engie, Tennet, ING ou Société générale. D’autres sociétés ont choisi d’émettre des ABS (asset-backed securities), comme Toyota, qui a émis des obligations «vertes» adossées à des prêts auto. Il existe également des Green Bonds émis par des municipalités (Massachusetts) ou des gouvernements régionaux (Île-de-France). Les maturités à cinq ans ont été les plus populaires auprès des émetteurs, et la grande majorité de ces obligations sont notées AAA.

En effet, avec neuf milliards de dollars, la BEI reste à ce jour le plus grand émetteur de «self-labelled» Green Bonds, suivie par KfW (5,4 milliards de dollars) et par la Banque mondiale (4,7 milliards de dollars). L’univers des «corporates» reste dominé par trois grands secteurs: les services financiers, l'énergie et l'immobilier. Le plus grand émetteur est le producteur d’électricité français EDF (2,1 milliards de dollars).