Les motivations des émetteurs sont de différents ordres. La possibilité d'accéder à une base d'investisseurs plus diversifiée reste la raison principale, mais ce n’est pas la seule. En effet, les obligations émises par des agences supranationales permettent aux promoteurs de petits projets d’accéder à un financement à moindre coût. Les obligations titrisées permettent également de réduire le coût du capital pour des petits émetteurs. Dans certaines juridictions, les émetteurs peuvent bénéficier d’avantages fiscaux (États-Unis) ou même d’accéder à des garanties de l’État (Royaume-Uni). Finalement, le gouvernement et les autorités financières des grandes économies émergentes comme la Chine ou l’Inde sont en train de tout mettre en œuvre pour favoriser le développement du marché des Green Bonds. Ces obligations semblent donc avoir un bel avenir devant elles, d’autant plus que plusieurs institutions financières se sont engagées à investir dans ce type d’obligations et certaines banques ont déclaré qu'elles avaient l'intention de doubler le financement de projets dans l’énergie renouvelable d'ici 2020.
De plus en plus d’investisseurs
La gamme de produits d’investissements dans ce type d’obligations s’est considérablement étoffée durant ces dernières années. Avec l’augmentation du nombre d’émissions, des indices ont été constitués et un grand nombre de fonds se sont créés. Rien qu’en 2015, neuf fonds ont levé 324 millions d’euros lors de leur lancement. Parmi eux, on y retrouve des gestionnaires comme Allianz, Axa, Erste ou State Street. Début 2016, la valeur de ces neuf fonds atteignait 599 millions d’euros, ce qui représente une augmentation des actifs de 85%. Plus globalement, parmi les investisseurs les plus importants se trouvent des fonds de pension et des gestionnaires d’actifs américains (Vanguard, Blackrock) ainsi que les sociétés de gestion des banques scandinaves (Nordea, Svenska Handelsbanken).
Les motivations des investisseurs sont également diverses. Comme nous l’avons déjà signalé, ceux-ci s’inquiètent de l’impact potentiel du réchauffement climatique sur leurs investissements. Par ailleurs, les fonds de pension et les investisseurs institutionnels sont appelés à réduire leur exposition aux émissions de carbone et à ne plus investir dans des combustibles fossiles. En décembre 2015, lors de la Conférence de Paris sur le climat (COP 21), un groupe d’investisseurs gérant l’équivalent de 11 000 milliards de dollars a signé une déclaration en faveur des Green Bonds. Ajouter ce type d'obligations à un portefeuille d'investissements offre une solution simple tant pour les gestionnaires de portefeuille que pour leurs clients. C’est d’autant plus vrai que les Greens Bonds se négocient comme les obligations ordinaires du même émetteur. Dans certaines juridictions, investir dans ce type d’instruments peut également avoir des avantages fiscaux; c’est le cas du Massachusetts, où les résidents seront exonérés des impôts sur les revenus générés par les Green Bonds.
Un marché de niche qui doit garder sa vocation
Les Green Bonds ont su trouver leur place parmi les instruments obligataires. Il existe bien entendu des avantages à investir dans ce type d’obligations. Le fait que le risque de crédit soit le même que pour les obligations ordinaires élimine des risques supplémentaires et permet de réduire les coûts de financement pour des projets dits «verts». Des acteurs majeurs commencent à investir dans ce type d’instruments, ce qui montre que ce marché acquiert une certaine profondeur. Enfin, les Green Bonds permettent une plus grande transparence quant à l’utilisation des fonds.
Il existe néanmoins des inconvénients. Les Green Bonds exigent plus de travail et de dépenses (surveillance, reporting) que les obligations ordinaires, ce qui peut s’avérer un fardeau pour les petits émetteurs. C’est un marché qui n’a pas de structure ni de définitions uniques. Cela reste un «marché de niche» enclin a subir les phénomènes de «bulle». Enfin, une bonne diversification sectorielle est difficile à atteindre puisque les émetteurs se concentrent essentiellement sur les services financiers, l'énergie et l'immobilier.
Par ailleurs, les «self-labelled» Green Bonds offrent généralement un rendement inférieur par rapport aux obligations ordinaires émises par les mêmes entités. Ceci est principalement dû à la forte demande qu’il y eu pour ce type d’instruments. Cette «prime» peut être considérée comme le «prix à payer» pour lutter contre le réchauffement climatique. Malgré cela, le marché des Green Bonds continuera probablement à croître et à attirer la demande d’un nombre croissant d’investisseurs. Le plus grand risque qu'ils encourent est une sorte de «mauvaise conduite» (par exemple une utilisation incorrecte des fonds) qui pourrait amener les investisseurs à se méfier et délaisser ce type d'obligations.