Les îles bordées de palmiers ne sont pas les pires paradis fiscaux selon Tax Justice Network. (Photo: Licence C.C.)

Les îles bordées de palmiers ne sont pas les pires paradis fiscaux selon Tax Justice Network. (Photo: Licence C.C.)

La mode des listes noires est passée. Même le Forum mondial de l’OCDE sur la transparence et l’échange d’informations à des fins fiscales préfère maintenant mettre l’accent sur les progrès des juridictions en matière de coopération fiscale. Et l’UE a réduit de moitié sa liste des vilains – parmi lesquels certains auraient aimé trouver le Luxembourg, Malte ou Chypre.

Mais pour Tax Justice Network, qui utilise une autre méthodologie, l’opacité financière reste forte à travers le monde. Dans son classement biennal, l’organisation rappelle que les flux financiers transfrontaliers illicites représentent 1.000 à 1.600 milliards de dollars chaque année. Avec une victime directe, l’Afrique, dont les pays ont perdu 1.000 milliards de dollars en fuites de capitaux depuis les années 1970.

Les principaux fournisseurs d’opacité financière hébergeant des actifs ne sont pas pour la plupart de petites îles bordées de palmiers.

Tax Justice Network

Tax Justice Network souligne que «les principaux fournisseurs d’opacité financière hébergeant des actifs ne sont pas pour la plupart de petites îles bordées de palmiers comme le supposent beaucoup, mais certains des pays les plus grands et les plus riches du monde».

C’est ainsi que les États-Unis figurent à la deuxième place de son classement – une montée en puissance singulière puisqu’ils pointaient à la 6e en 2013 et à la 3e en 2015. La conséquence directe de leur politique à double tranchant, qui semble devoir s’accentuer sous la présidence de Donald Trump, consistant à traquer les paradis fiscaux à l’étranger tout en faisant preuve de laxisme sur leur sol.

Tax Justice Network s’appuie sur la transparence des juridictions (échange automatique de données, existence d’un registre des bénéficiaires…) et la taille de leur secteur financier afin de déterminer leur impact sur les pratiques fiscales dommageables (évasion fiscale, blanchiment d’argent, etc.). À la lumière de cette grille de lecture, la Suisse conserve son rang de championne au titre du secret bancaire, devant les États-Unis et les îles Caïmans. Hong Kong et Singapour devancent le Luxembourg, qui est suivi par l’Allemagne, Taïwan et les Émirats arabes unis. Les Pays-Bas arrivent en 14e position. Sachant que les juridictions dépendant du Royaume-Uni ont été jugées séparément – autrement Londres figurerait en bonne place dans le top 10, souligne TJN.

Le Luxembourg, un paradis fiscal reposant sur un «consensus des élites»

Si TJN reconnaît que le Luxembourg n’est plus «l’étoile de la mort» qu’il décrivait auparavant, l’organisation estime que les efforts du pays accumulés depuis 2013 ne suffisent pas à réduire l’opacité financière qui caractérise la Place. «Nous attribuons ce changement relatif en majorité à l’évolution du climat international sur la transparence combinée à des scandales mondiaux qui ont jeté une lumière négative sur ce paradis fiscal», commente TJN, qui lie également le virage luxembourgeois au départ de Jean-Claude Juncker, «le plus important architecte du paradis fiscal moderne». Mais «ne voit aucune amélioration en 2018», signe que «le paradis fiscal a toujours été nourri et promu par un consensus des élites qui va bien au-delà de Juncker».