Le Laboratoire national de santé accueillera en 2017 son directeur, Friedrich Mühlschlegel. (Photo: Maison Moderne)

Le Laboratoire national de santé accueillera en 2017 son directeur, Friedrich Mühlschlegel. (Photo: Maison Moderne)

Traînant les erreurs passées comme autant de casseroles, le Laboratoire national de santé remonte la pente et nourrit de grandes ambitions. «Quand je suis arrivé en mars dernier avec Thomas Lentz, il n’y avait rien dans mon bureau», se souvient Philippe Hartemann, directeur par intérim. «J’ai appris récemment qu’un audit réalisé en 2001 dressait les mêmes constats et confortait les objectifs que j’ai fixés», sourit-il. S’il avait eu ledit audit entre les mains à son arrivée, il aurait toutefois gagné du temps…

Le Français appelle un chat un chat et ne tente pas de minimiser les dysfonctionnements qui minent le LNS depuis trop longtemps. «Il y a eu des loupés, il y en aura encore», glisse-t-il. «Nous travaillons par objectifs stratégiques avec des chefs de projet et des indicateurs. Depuis trois mois, nous fournissons le délai de remise des résultats en anatomie pathologique.» Des chiffres suivis de près par la ministre de la Santé, Lydia Mutsch, qui ne cache pas ses attentes vis-à-vis d’un LNS en reconstruction.

La seule anatomo-pathologie – qui ne représente pas la majorité des activités du LNS – compte une moyenne de 300 échantillons entrants par jour. Des chiffres là encore récents puisqu’aucune statistique n’était tenue avant 2016. «Nous avons à la fois des problèmes de personnel – que nous devons aller chercher ailleurs – et d’organisation», résume Philippe Hartemann. «Tous les trimestres, nous mettons en place une nouvelle activité avec des indicateurs, par exemple la réduction des délais de temps. Les délais ont déjà baissé de 30% en trois mois. En anatomo-pathologie classique, le délai est actuellement de neuf jours et il passera à cinq en un an et demi.»

Le LNS doit être un laboratoire de référence et, en tant que tel, il doit aller vers l’excellence.

Philippe Hartemann, directeur par intérim du LNS

«La philosophie, c’est que le LNS doit être un laboratoire de référence et, en tant que tel, il doit aller vers l’excellence», explique le directeur par intérim. «Nous sommes clairement sous pression, nous recevons de l’argent public et devons donc être performants et excellents», renchérit Simone Niclou, présidente du conseil d’administration du LNS.

La nouvelle direction a identifié des «projets fédérateurs lancés pour redonner une dynamique» à l’établissement, ajoute Philippe Hartemann, qui a bouclé le plan stratégique 2016-2018 en quelques mois. Celui-ci compte ainsi un projet de télépathologie qui permettra aux pathologistes du LNS d’examiner une biopsie en temps réel afin de guider le chirurgien dans la poursuite de son opération. «C’est en train de se mettre en place et le premier hôpital sera celui d’Esch-sur-Alzette», indique Simone Niclou.

Les hôpitaux font partie des acteurs luxembourgeois à reconquérir. «C’est triste que beaucoup d’analyses partent à l’étranger, il faut faire en sorte que ce ne soit plus le cas», appuie Philippe Hartemann, qui invoque la nécessité d’une bonne communication entre les médecins qui prescrivent les analyses et les pathologistes.

De la recherche génétique à la santé publique

Le LNS devrait aussi accueillir le Centre national de la génétique issu de son service Médecine, dont les principales attributions sont l’analyse de maladies cancéreuses présentant des mutations génétiques ponctuelles ou héréditaires ainsi que les tests prénataux.

En neuropathologie, un ticket LNS-LIH-LCSB (laboratoire en biomédecine) a remporté le financement d’un projet Pearl par le FNR. «C’est la première fois que le LNS coordonne un projet d’une telle envergure», souligne Simone Niclou. Le projet de recherche porte sur les maladies dégénératives et cancéreuses.

Le département Microbiologie travaille de son côté sur la résistance aux antibiotiques et l’hygiène hospitalière, un thème cher au professeur Hartemann. Quant au département Analyse de l’environnement et santé publique, bientôt renommé Environnement et santé, il est chargé d’identifier des substances toxiques dans les produits alimentaires ou encore les jouets. La surveillance des drogues figure aussi parmi ses attributions afin de déceler toute drogue frelatée. «Nous avons mis en place des contrôles de drogues illégales dans les festivals, en collaboration avec les associations, pour faire en sorte que ces manifestations se passent dans les meilleures conditions possibles», ajoute le médecin.

C’est exactement le profil que nous recherchions.

Simone Niclou, présidente du conseil d’administration du LNS

«Il y a des services qui marchent merveilleusement et qui n’ont aucun problème de délais ou de relations», souligne-t-il, évoquant le service médico-légal ou celui d’identification génétique. «Ils sont qualitativement aussi importants que les autres et travaillent même pour l’étranger.»

Bien que passionné par son travail de reconstruction du LNS, Philippe Hartemann n’a pas postulé à la direction que pour des raisons familiales mais aussi professionnelles – il souhaite conserver ses multiples implications internationales dans la santé publique notamment. Le ministère de la Santé a peiné à lui trouver un successeur qui remplisse les nombreuses exigences du poste. Le nom de l’heureux élu est finalement tombé hier.

«Friedrich Mühlschlegel a un profil de médecin et une spécialisation en microbiologie médicale», détaille Simone Niclou. Formé à Berlin, Hanovre et Wurtzbourg, il est installé depuis 15 ans en Angleterre où il enseigne à l’université du Kent tout en dirigeant le service de microbiologie à l’hôpital universitaire East Kent. «C’est exactement le profil que nous recherchions pour diriger une institution avec des activités très diverses avec une vision de santé publique», ajoute la présidente du conseil d’administration.

L’Allemand prendra ses fonctions le 1er février 2017, dans un bâtiment du LNS aujourd’hui terminé. Le reste du site sera finalisé en juillet 2017, date à laquelle pourront emménager l’IBBL (biobanque) et le service vétérinaire du ministère de l’Agriculture. Philippe Hartemann se réjouit également des bons contacts noués avec des start-up dans les domaines de la pharmacie, des dispositifs médicaux et de la toxicologie.