Pierre Gramegna écrivait ce lundi à Jean-Claude Juncker pour lui présenter des arguments contre une supervision européenne des fonds. (Photo : Sebastien Goossens)

Pierre Gramegna écrivait ce lundi à Jean-Claude Juncker pour lui présenter des arguments contre une supervision européenne des fonds. (Photo : Sebastien Goossens)

«Nous n’approuvons pas la proposition de Bruxelles (…), car ce sont des mesures qui sont censées résoudre un problème qui n’existe pas.» En marge d’une conférence de presse ce mercredi après-midi, Pierre Gramegna rappelait les arguments du ministère des Finances contre le transfert de la supervision d’opérations cross-border des fonds d’investissement de la Commission de surveillance du secteur financier (CSSF) à l’autorité européenne des marchés financiers, l’Esma, à Paris.

Contrairement aux banques il y a 10 ans, les fonds ne représenteraient actuellement aucun risque systémique.

À l’image du succès du Luxembourg avec les fonds Ucits qui seraient «connus partout dans le monde», le ministre des Finances luxembourgeois estime par ailleurs que l’attractivité de l’industrie des fonds démontrerait la santé du système actuel. Près de 4.000 milliards d’euros sont gérés au Luxembourg «sans pannes et sans risques systémiques, cela prouve que les autorités nationales fonctionnent très bien».

Subsidiarité

«Nous livrons l’architecture et la Commission européenne veut rendre l’architecture beaucoup plus complexe», explique Pierre Gramegna. Une démarche qui, selon lui, risquerait d’attirer «moins de capitaux et moins d’investissements» en Europe. Et d’ajouter que le Haut Comité de la place financière partagerait l’avis selon lequel les propositions de Bruxelles «ne sont pas les bonnes mesures dont nous avons besoin sur un marché des fonds qui fonctionne bien et qui est attractif».

L’approche de Bruxelles ne respecterait pas le principe de subsidiarité: «Quand il y a le choix entre une solution nationale au lieu d’une solution européenne, alors il vaut mieux utiliser la solution nationale.»

D’ailleurs, les agences européennes qui existent depuis cinq ans auraient, selon Pierre Gramegna, un certain pouvoir pour faire «converger les règles». Un pouvoir auquel le Luxembourg ne s’opposerait pas, «mais il faut faire les choses de manière progressive».

Le travail ne fait que commencer

Maintenant que les propositions de la Commission européenne sont sur la voie législative, «le Luxembourg participera à ces travaux de manière constructive mais aussi critique», déclare Pierre Gramegna.

Et de poursuivre: «Il faut une approche réaliste. Il faut entrer en contact avec la Commission européenne, ainsi qu’avec les autres États membres et consulter le secteur.»

Difficile à ce stade de savoir quels arguments s’imposeront au cours des travaux, car «chiffrer l’impact des propositions de la Commission européenne, ne serait-ce que vaguement, serait extrêmement aléatoire et irréaliste».

Selon le ministre, «cela dépend de quoi auront l’air les réglementations à l’issue de la procédure législative. C’est un dossier très technique et il y a encore beaucoup de questions.»

Parole contre parole

Paperjam demandait au ministre des Finances pourquoi donc la Commission européenne proposerait des mesures qui nuiraient à l’Europe et au Luxembourg? Pierre Gramegna répondait que les commissaires européens ne représentent plus les intérêts de leur pays d’origine, mais les intérêts de l’Union européenne.

Le ministre des Finances estime que la démarche de Bruxelles découle de la volonté des États membres, dont le Luxembourg, d’établir une union des marchés des capitaux pour «fluidifier encore davantage le flux d’investissements en Europe» et permettre ainsi aux entreprises d’accéder plus facilement aux capitaux et grandir.

Mais «là où nous ne sommes pas d’accord, c’est la question de comment y arriver».