Pour les syndicats, le projet de loi 7024 nécessite la réalisation d’un état des lieux sur les compétences actuelles et futures des salariés de la Place. (Photo: Maison Moderne/archives)

Pour les syndicats, le projet de loi 7024 nécessite la réalisation d’un état des lieux sur les compétences actuelles et futures des salariés de la Place. (Photo: Maison Moderne/archives)

Déposé à la Chambre le 29 juillet 2016, le désormais célèbre projet de loi 7024 ne cesse de faire parler de lui. Visant officiellement à transposer en droit luxembourgeois le règlement européen 2015/751 sur les commissions d’interchange pour les opérations de paiement liées à une carte, le texte propose de faciliter le recours à l’externalisation de données auprès d’un prestataire intragroupe ou externe. Une mesure aux conséquences potentiellement néfastes sur l’emploi de la Place selon les syndicats, qui avancent la disparition de 5.000 emplois.

Trois mois après leur dernière rencontre, Aleba, OGBL-SBA et LCGB-SESF ont une nouvelle fois manifesté leurs inquiétudes la semaine dernière auprès de Pierre Gramegna (DP), ministre des Finances. Dans un communiqué commun publié lundi, les trois organisations syndicales assurent que «le ministre des Finances est (…) conscient que la décision de moderniser le secret professionnel permettra l’externalisation de services et risque d’avoir des conséquences importantes en termes de pertes d’emplois».

Présentation orale de plusieurs amendements

Toutefois, elles déplorent dans le même temps que «jusqu’à présent, aucun état des lieux des répercussions sur les emplois dans le secteur n’ait été dressé». À en croire les syndicats, Pierre Gramegna aurait «la conviction» que la modification de la législation permettra «à terme» d’acquérir «de nouveaux emplois grâce à l’internalisation», sans avancer de chiffre permettant de comparer par rapport à la perte d’emplois «back-office» liée à la modification de la législation.

Pour tenter de limiter la casse, le ministre des Finances a, selon le communiqué commun des syndicats, «présenté oralement» plusieurs amendements. Parmi eux, «l’introduction et le renforcement de la responsabilité de l’entité sous-traitante, y compris dans le cas d’une sous-traitance en cascade», «l’exigence que la sous-traitance ne fasse pas entrave au contrôle par l’autorité de surveillance» et «une extension de la modernisation du cadre légal relatif à l’outsourcing aux secteurs de l’assurance et des services de paiement».

Des efforts combinés sont nécessaires.

Pierre Gramegna, ministre des Finances

Pour l’Aleba, l’OGBL-SBA et le LCGB-SESF, ces nouvelles mesures ne permettront pas à la Place de voir le nombre de ses salariés rester stable. Selon eux, «les nouveaux profils des emplois attendus ne correspondront pas forcément au caractère et au volume des emplois perdus» et «ne se traduiront en définitive que par l’installation des maisons mères au Luxembourg, sans pour autant que les entreprises ne ramènent leurs quartiers logistiques avec eux».

Face à ce risque, le gouvernement et le Haut Comité de la place financière assurent que «des efforts combinés sont nécessaires (…), notamment par l’offre de formations et de reconversions professionnelles adéquates». Sur ce point, syndicats et ministère des Finances estiment «qu’il est essentiel de réaliser un état des lieux au préalable sur les compétences existantes et celles dont devront être pourvus les salariés dans le futur». Une affirmation délivrée sans préciser le moindre délai quant à la réalisation de cette évaluation.

Seul un accord de principe sur la nécessité d’engager «la responsabilité de l’ensemble des acteurs du secteur» dans la transition a été acté. Selon les analystes de la Place, les profils à venir devraient concerner la cybersécurité, l’analyse de données ou des profils créatifs, capables de répondre aux besoins futurs, notamment dans le cadre du développement voulu des fintech. Plusieurs d’entre eux estiment d’ailleurs que, d’ici cinq ans, le nombre de salariés sur la Place pourrait être plus important qu’aujourd’hui, en lien avec le positionnement du Luxembourg comme hub européen pour les banques étrangères ou les opportunités liées au Brexit.