Le ministère des Finances a une nouvelle fois assuré mardi qu'aucun traitement fiscal particulier n'a été octroyé à Amazon. (Photo: Jessica Theis - Archives)

Le ministère des Finances a une nouvelle fois assuré mardi qu'aucun traitement fiscal particulier n'a été octroyé à Amazon. (Photo: Jessica Theis - Archives)

Après Apple, Starbucks et Fiat Finance, c’est au tour d’Amazon EU sàrl d’entrer dans le viseur de la Commission européenne, qui a annoncé mardi l’ouverture d'une enquête approfondie pour savoir si les autorités fiscales luxembourgeoises avaient accordé «des subventions déguisées» à Amazon, dont le siège européen est situé au Grand-Duché.

«Les autorités nationales ne doivent pas permettre à des entreprises particulières de réduire artificiellement leurs bénéfices imposables en ayant recours à des méthodes de calcul favorables», a expliqué lors d’une conférence de presse le commissaire européen chargé de la concurrence, Joaquin Almunia. «Il est juste», a-t-il ajouté, «que les filiales de multinationales paient leur part d'impôt et ne bénéficient pas d'un traitement préférentiel qui équivaudrait à des subventions déguisées.»

Le commissaire en charge des affaires fiscales, Algirdas Semeta, y est allé aussi de son couplet dans un communiqué de presse, en jugeant «fondamental de garantir une concurrence fiscale loyale» au sein du marché unique européen.

À nouveau, ce sont les «décisions anticipatives» ou tax rulings émises par l’Administration des contributions directes et fournissant à une société déterminée des indications sur son traitement fiscale qui sont dans le collimateur de la Commission.

Le gouvernement luxembourgeois a toujours soutenu que ces traitements fiscaux s’inscrivaient en conformité avec la législation, mais les autorités ont tout de même du mal à défendre la légitimité d’une taxation au plancher pour des multinationales multipliant les montages et les filiales dans différentes juridictions afin de réduire à presque néant leur base imposable.  

La Commission ne remet pas fondamentalement en cause le principe des rulings, mais soupçonne néanmoins des abus dans la manière dont cette pratique est appliquée dans certains pays au bénéfice de certains groupes.

Accord de 2003 dans le viseur

Selon le commissaire Joaquin Almunia, un accord, toujours en vigueur, a été conclu en 2003 entre Amazon et l’Administration des contributions directes sur lequel Bruxelles émet un «doute raisonnable concernant le respect de ses règles».

L’entité luxembourgeoise Amazon EU sàrl au Luxembourg enregistre l'essentiel des bénéfices européens du groupe. L'accord de 2003 passé avec l’administration fiscale luxembourgeoise prévoit notamment le paiement d’une redevance fiscalement déductible à une société en commandite simple établie au Luxembourg sans y être assujettie à l'impôt sur les sociétés.

C’est un classique pour les sociétés actives dans l’e-commerce implantées au Luxembourg de prévoir ce double niveau et avoir droit à un traitement fiscal des plus favorables. Dans le cas d’Amazon, la plupart des bénéfices européens sont enregistrés au Luxembourg mais n'y sont même pas imposés.

Accusé par la Commission de ne pas avoir pleinement coopéré à sa demande de renseignement dans le cadre de son enquête préliminaire, des procédures d'infraction avaient été lancées en juin. Mais depuis lors, «l'attitude des autorités luxembourgeoises s'est clairement améliorée», a assuré le commissaire à la concurrence lors de sa conférence de presse.

Dans un communiqué de presse, le ministère des Finances a réagi à la décision de la Commission en indiquant avoir «fourni à la Commission toutes les informations requises», et en assurant qu'il «coopérera pleinement avec la Commission dans le cadre de l'enquête».

«Le Luxembourg est convaincu», poursuit le communiqué du ministère, «que les allégations d’aides d’État sont infondées et que l’enquête permettra à la Commission de conclure qu’aucun traitement fiscal particulier ou avantage n’a été octroyé à Amazon.»

À la demande du groupe CVV, Pierre Gramegna sera amené le 16 octobre prochain à fournir des explications sur cette enquête de Bruxelles devant la commission des Finances et du Budget.