Les blocages en série dans les chaînes d’approvisionnement obligent les opérateurs commerciaux à envisager de nouvelles routes commerciales, augmentant les risques et les coûts de financement. (Photo: Shutterstock)

Les blocages en série dans les chaînes d’approvisionnement obligent les opérateurs commerciaux à envisager de nouvelles routes commerciales, augmentant les risques et les coûts de financement. (Photo: Shutterstock)

Les ruptures dans les chaînes d’approvisionnement mondiales font légion depuis plus de deux ans. La hausse des coûts de financement du commerce mondial n’est pour autant pas une mauvaise nouvelle pour les investisseurs en recherche d’actifs liquides et de plus-values rapides.

L’agence de notation Fitch Ratings s’attend à une baisse de la croissance du commerce mondial, avec des conséquences sur les volumes de flux traités par les ports. Une situation qui résulte notamment des tensions géopolitiques poussant de nombreuses multinationales qui ont commencé à «dérisquer» leurs chaînes d’approvisionnement, depuis les premiers goulots d’étranglement causés par les consécutives restrictions liées à la gestion sanitaire du Covid-19 en Asie.

Les données recueillies par Fitch Ratings indiquent que les entreprises ont tendance à accumuler des stocks afin d’atténuer les risques sur leurs chaînes d’approvisionnement. «L’accumulation des stocks exacerbe la crise de la chaîne d’approvisionnement. Alors que les ports tirent un revenu accru du stockage, leurs recettes d’exploitation ont souffert de l’augmentation des temps d’attente», commente Fitch Ratings.

Les entreprises préfèrent accumuler des stocks plutôt que de délocaliser. «L’atténuation typique des risques serait de diversifier votre base traditionnelle de clients ou d’approvisionnement. La difficulté est qu’il y a désormais tellement d’évènements qui viennent s’ajouter qu’il est difficile pour les entreprises de rester agiles dans de telles circonstances», note Morgan Terigi, cofondateur et CEO d’Incomlend, une place de marché B2B spécialisée dans le financement des créances de marchandises transfrontalières.

D’un blocage à un autre

De par son activité professionnelle, Morgan Terigi tient une place d’observateur du commerce international. Comme, par exemple, avec les exportations de céréales ukrainiennes chamboulées depuis l’invasion de la Russie: «Quand il commence à y avoir énormément d’entreprises qui cherchent d’autres fournisseurs, les prix des fournitures augmentent et les coûts de financement aussi.» Le phénomène commence à affecter les chaînes d’approvisionnement des engrais.

Les produits de bases dits «durs», dont les métaux sont également affectés. «Nous avons vu beaucoup de commandes métaux dont l’expédition a été retardée ou a été réacheminée via d’autres pays», explique le CEO d’Incomlend.

Il n’y a pas que les tensions géopolitiques croissantes et les restrictions sanitaires qui impactent les flux commerciaux. En Europe, le fantôme du Brexit se fait encore ressentir. Selon une étude de la London School of Economic, les volumes commerciaux entre le Royaume-Uni et le continent depuis janvier 2021 en raison des formalités administratives et douanières qui en ont découlé.

La hausse du coût de financement

Situation post-Brexit, restrictions sanitaires, guerres en Ukraine… «Il y a beaucoup d’évènements qui se superposent les uns aux autres», observe Morgan Terigi. Ce qui crée un effet domino: «Lorsque le commerce est perturbé, les opérateurs commerciaux ont tendance à trouver de nouvelles routes pour expédier les marchandises. Aussitôt qu’ils opèrent ces changements, les risquent augmentent. Et plus les risques augmentent, plus les coûts de financement augmentent.» À cela s’ajoute que «75% des transactions sont libellées en dollars, qui a formellement augmenté».

La situation n’empêche cependant pas les investisseurs de continuer à financer les créances liées aux expéditions des marchandises. C’est justement le drôle d’Incomlend de mettre des opérateurs commerciaux en relation avec des investisseurs. «L’avantage de ce type d’investissements est qu’ils sont très liquides, n’étant pas corrélés aux marchés financiers», indique Morgan Terigi. Et d’ajouter: «Nous envisageons généralement des transactions de 75 à 90 jours. C’est un cycle très court qui réduit le risque.» Les opérateurs commerciaux touchent la somme investie avant l’expédition des marchandises, pouvant alors payer leurs fournisseurs et salariés. À la fin du cycle, ils remboursent l’investisseur avec un taux d’intérêt. Un type de financement direct de l’économie réelle avec un retour sur investissement rapide pouvant atteindre jusqu’à 9% dans certains cas.