Cette exposition met en valeur les différentes facettes de la vie associative au Luxembourg, dont les associations sportives. (Photo: Christof Weber)

Cette exposition met en valeur les différentes facettes de la vie associative au Luxembourg, dont les associations sportives. (Photo: Christof Weber)

La vie associative occupe une place importante dans la société luxembourgeoise. L’exposition «Komm, mir grënnen e Veräin» au Lëtzebuerg City Museum en témoigne avec beaucoup d’habilité. 

«On estime à environ 7.000 le nombre d’associations actives aujourd’hui dans le pays et à plus de 500 celles sur le territoire de la Ville de Luxembourg», introduit Gilles Genot, conservateur au Lëtzebuerg City Museum et curateur de l’exposition «Komm, mir grënnen e Veräin». «Et si l’on considère que chaque association compte au moins une dizaine de membres, cela représente 1/10e de la population actuelle.» C’est donc dire que la vie associative est bel et bien une réalité vivante au Grand-Duché. «Le sujet peut sembler à première vue un peu banal, mais il permet en fait d’aller bien plus loin dans la compréhension de la société luxembourgeoise et devient un miroir de notre société», argumente Gilles Genot.

Pour composer cette exposition, cet historien de formation a lancé un appel en 2020 à toutes les personnes privées et associations pour faire don d’objets relatifs à cette thématique. «80% des objets qui sont présentés ici proviennent de cet appel», confirme le curateur. Le reste provient des collections du musée ou des prêts d’autres institutions telles que le Musée national d’histoire et d’art, le Centre national de l’audiovisuel, ou encore les Archives nationales.

L’exposition est principalement organisée de manière chronologique. Au sein de ce parcours, des thématiques sont articulées et permettent de mettre en lumière certains aspects plus inattendus. «Lorsqu’on pense association, vient rapidement à l’esprit l’équipe de foot du quartier ou encore le club d’échecs. Mais il y a de nombreux autres aspects qui peuvent être abordés, et c’est que nous avons voulu faire à travers cette exposition.»

Une réflexion qui se poursuit d’ailleurs encore plus loin dans le travail mené pour le catalogue qui complète les axes de l’exposition et dans lequel une vingtaine de contributions d’historiens sont rassemblées sur des sujets de recherche jusque-là encore inédits.

Un développement historique

La première salle de l’exposition commence donc avec les prémices des associations: les corporations de l’Ancien Régime. «Ces groupes sont très différents du monde associatif qui apparaîtra au 19e siècle, mais ils représentent toutefois le socle de ce qui se développera par la suite», précise Gilles Genot.

Puis vient une vaste salle qui présente les fondamentaux d’une association: la raison du regroupement (qui peut être d’ailleurs de natures variées, telles que la convivialité, le sport, la santé, la culture, la foi, les sciences, l’engagement social ou politique), la création d’un nom et d’un logo, le besoin de disposer d’un local pour se réunir ou encore les indispensables besoins de financement. On notera dès ces premières salles les efforts muséographiques (réalisés par Lars Jürgens et Atelier Schubert) pour une approche ludique du sujet, tout en parvenant à garder un bon niveau de sériosité.

Sont alors évoquées les premières sociétés de lecture, lieu de rencontre de la bourgeoisie et exprimant la conscience des élites urbaines.

Puis, avec la Constitution de 1848, est garantie pour la première fois la liberté de réunion et d’association, ce qui entraîna une vague de créations d’associations jusque dans les couches artisanales et ouvrières. Les grandes entreprises de l’époque, comme la draperie Godchaux, les champagnes Mercier ou la faïencerie Villeroy & Boch, avaient leurs propres associations pour leur personnel. C’est à cette époque qu’apparaissent aussi les corps de pompiers volontaires. La musique occupe une place de choix dans ces groupements, et nombre de fanfares naissent à cette époque.

Des approches plus thématiques

Un autre sujet important pour les associations est la compétition, la reconnaissance, avec nombre de médailles et autres diplômes honorifiques. Les différents jubilés sont aussi des moments festifs que les associations ne manquent pas de célébrer pour fédérer anciens et nouveaux membres.

Une autre salle est consacrée aux associations religieuses et anticléricales. Il est à noter que cette exposition a permis par ailleurs de restaurer plusieurs drapeaux qui ont été retrouvés en mauvais état. On notera la présentation d’une association qui promouvait l’incinération des morts et la création d’un crématorium au Luxembourg, et ceci bien avant que cela ne soit autorisé dans les années 1960.

On retrouve aussi de nombreuses associations de défense de la nature, ou liées aux conditions d’hygiène et de santé, ou encore aux nouvelles technologies pouvant s’épanouir dans des activités de loisirs telles que le sport automobile, l’aviation, la photographie ou la radio.

Les heures sombres ne sont pas oubliées. L’entre-deux-guerres et l’occupation nazie sont aussi évoqués. «Pendant ces années, les associations ne pouvaient bien entendu plus mener la même activité que précédemment. Plus de 800 associations ont dû arrêter leurs activités pour ne pas être contraintes de rejoindre l’idéologie nazie», précise le curateur. Cette période du milieu du 20e siècle marque aussi le début du déclin de certaines grandes associations historiques. «Mais le tissu associatif reste toutefois toujours très actif. Aujourd’hui, on compte encore plus de créations d’associations que de disparitions.» Leur contribution à la société actuelle reste tout à fait importante et elles fédèrent encore une large part de la population.

«Komm, mir grënnen e Veräin», du 25 mars au 15 janvier 2023, au Lëtzebuerg City Museum, 14 rue du Saint-Esprit à Luxembourg.