Au Luxembourg, le nombre de personnes atteintes d’un cancer représente environ 3% de la population. Mais celles-ci ne sont pas toutes immunodéprimées, et seulement de manière temporaire puisqu’elles le sont en général seulement pendant le traitement et durant les six mois qui suivent. (Photo: Shutterstock)

Au Luxembourg, le nombre de personnes atteintes d’un cancer représente environ 3% de la population. Mais celles-ci ne sont pas toutes immunodéprimées, et seulement de manière temporaire puisqu’elles le sont en général seulement pendant le traitement et durant les six mois qui suivent. (Photo: Shutterstock)

Dans un contexte de levée des mesures sanitaires, les immunodéprimés sévères se trouvent encore davantage exposés au Covid-19. Combien sont-ils? Comment mieux les protéger? Le ministère de la Santé ne sait pas ou reste muet. En première ligne depuis le début de la pandémie, cette communauté reste exclue de la sortie de crise.

Greffe d’organe, lymphome, sida, chimiothérapie, traitement immunomodulateur: les raisons d’être immunodéprimé sévère sont multiples. Et les personnes qui en sont atteintes sont en première ligne depuis le début de la pandémie de Covid-19.

Or, cela ne devrait pas s’arranger pour cette communauté alors que, dans un contexte de reflux du Covid-19, les mesures sanitaires – masques, tests, distanciation sociale –, qui leur offraient une protection relative, sont levées. Comment, dans ce contexte, oser aller au restaurant, dans un bar, au cinéma ou même au travail, quand on sait être particulièrement vulnérable au Covid-19, qui continue malgré tout de circuler?

1.720 déclarations

En France, ils seraient entre 200.000 et 300.000. En Belgique, plus de 100.000. Au Luxembourg, on ne sait pas. Interrogé par Paperjam sur le nombre de personnes concernées, le ministère de la Santé a répondu laconiquement, après une semaine de réflexion, qu’«il n’y a pas de ‘registre des personnes avec immunodéficience’».

L’administration d’une quatrième dose a pourtant été pour les immunodéprimés sévères. Mais, ces personnes étant directement vaccinées en cabinet médical, aucune invitation n’a été envoyée (comme c’était le cas pour les précédentes doses), et aucune liste de personnes immunodéprimées n’existe, assure le Centre des technologies de l’information de l’État (CTIE). La seule source d’informations, bien que partielle, se trouve avec MyGuichet, qui répertorie 1.720 déclarations introduites par les médecins pour leurs patients pour une quatrième dose.

Pas de stratégie particulière

De fait, il semble assez difficile d’établir un chiffre précis. Par exemple, au Luxembourg, le nombre de personnes atteintes d’un cancer représente environ 3% de la population. Mais celles-ci ne sont pas toutes immunodéprimées, et seulement de manière temporaire, puisqu’elles le sont en général seulement pendant le traitement et durant les six mois qui suivent. Reste qu’une estimation globale semble nécessaire pour mener une politique sanitaire.

Au-delà de leur nombre, la question de la protection de personnes immunodéprimées est d’autant plus prégnante actuellement que le gouvernement vient de . Interrogé par Paperjam sur les moyens mis en œuvre pour protéger cette catégorie de la population, le ministère de la Santé reste cependant muet sur la question.

Le vaccin moins efficace

«Les personnes immunodéprimées ont intérêt à être vaccinées», prévient Gérard Schockmel, spécialiste en maladies infectieuses aux Hôpitaux Robert Schuman (HRS). Le problème est que la protection conférée par la vaccination est moins efficace pour ces personnes hautement vulnérables – même si cette protection peut varier selon le type de cancers ou de traitements.

«De façon générale, la protection est inférieure que celle conférée à une personne qui a un système immunitaire sans particularité», explique Gérard Schockmel. «Il y aura probablement une petite proportion qui ne répondra pas à la vaccination, et d’autres qui vont développer une immunité partielle.»

Paxlovid en soutien

Pour pallier cette moindre efficacité, les médicaments pourront aider. Mais les traitements à base d’anticorps monoclonaux se sont révélés en grande partie inefficaces contre l’actuel variant dominant, Omicron. Le Paxlovid de Pfizer s’adresse justement aux personnes adultes sévèrement immunodéprimées ou présentant une pathologie à très haut risque de forme grave. Ce médicament a fait preuve d’efficacité. Le Luxembourg en a commandé 100.000 doses, soit l’équivalent de 20.000 traitements.

Le Paxlovid pourrait cependant ne pas être compatible avec d’autres traitements, comme ceux reçus par les patients VIH ou ceux avec des problèmes rénaux ou cardiaques. Or, les personnes à risque sont souvent déjà traitées pour d’autres pathologies. «Le cadre clinique va être complexe», expliquait ainsi la virologue Danielle Perez-Bercoff, du Luxembourg Institute of Health (LIH), .

Repli sur soi

Dans cette nouvelle étape de la pandémie, les personnes immunodéprimées sévères, ainsi que leur entourage, n’auront ainsi pas le choix que de faire preuve d’une très grande prudence. Avec comme corollaire le port du masque et le recours aux tests en cas de symptômes suspects. Et un risque d’anxiété et de repli sur soi-même.

«D’un point de vue psychologique, cela a été mal vécu par cette communauté de patients, notamment en Grande-Bretagne», prévient Gérard Schockmel. «Avec l’impression que, désormais, la fête est pour tout le monde, sauf pour eux.»