Jerome Powell  a profité de la réunion – virtuelle – de Jackson Hole pour annoncer une inflexion importante dans la stratégie de la Réserve fédérale américaine. (Photo: Fed)

Jerome Powell  a profité de la réunion – virtuelle – de Jackson Hole pour annoncer une inflexion importante dans la stratégie de la Réserve fédérale américaine. (Photo: Fed)

Le patron de la Fed, Jerome Powell, veut modifier la stratégie de la Réserve fédérale américaine. Elle visera désormais le plein emploi et moins l’équilibre des prix. Elle pourrait donc laisser filer l’inflation dans certaines limites.

Au cours de l’université d’été des banquiers centraux, le traditionnel rendez-vous de Jackson Hole, vécu cette année de manière virtuelle, le patron de la Fed, Jerome Powell a frappé un grand coup.

Ce jeudi 27 août, il a en effet annoncé un changement fondamental de cible pour la Réserve fédérale américaine. Celle-ci visera désormais le plein emploi et plus le maintien de l’inflation à 2%.

Lors de son discours, Powell a estimé qu’il était possible de stimuler l’économie avec des taux bas sans faire repartir l’inflation à la hausse. «Un marché du travail solide peut être soutenu sans faire exploser l’inflation», a exposé le patron de la FED.

L’inflation au-delà de 2%

«La réunion annuelle des banquiers centraux à Jackson Hole a souvent été l’occasion de communiquer des annonces importantes de politique monétaire. Cela faisait un an et demi que la Réserve fédérale réexaminait le cadre de sa politique monétaire, et une annonce de la Fed était attendue au plus tard à la prochaine réunion de la Fed en septembre», observe Alexandre Gauthy, macroéconomiste chez Degroof Petercam Luxembourg.

La Fed n’abandonne pas son objectif de l’équilibre de l’inflation autour de 2%. Mais, en période de croissance, elle se permettra un niveau modérément supérieur à 2% pendant une certaine période. Sans toucher aux taux...

Son objectif est de laisser filer les prix dans une certaine limite afin de compenser toutes les périodes où leur hausse a été trop faible.

Depuis 2012, année où la Fed a déterminé cette cible de 2% à moyen terme, l’inflation américaine est restée trop souvent en dessous de 2%.
Alexandre Gauthy

Alexandre GauthyMacroéconomisteDegroof Petercam Luxembourg

«Lorsque l’inflation réatteindra la cible de 2%, la banque centrale tolérera une inflation modérément supérieure à 2% pendant une certaine période, afin de donner une dimension symétrique à son objectif d’inflation. Depuis 2012, année où la Fed a déterminé cette cible de 2% à moyen terme, l’inflation américaine est restée trop souvent en dessous de 2%», poursuit l’économiste. 

La grave crise économique est évidemment passée par là et pousse la Fed à s’intéresser aux difficultés du marché de l’emploi, notamment pour les classes défavorisées, alors que, avant l’apparition du nouveau coronavirus sur le continent, les États-Unis vivaient en situation de plein emploi.

«L’objectif d’emploi maximum a été légèrement modifié. La Fed ne se focalisera plus principalement sur le taux de chômage, mais tiendra également compte de la situation sur le marché de l’emploi des minorités américaines ainsi que des plus faibles revenus», explique encore Alexandre Gauthy.

Quelles conséquences?

À voir désormais si la Banque centrale européenne se rangera prochainement à cette nouvelle vision. Sa prochaine réunion du conseil des gouverneurs est prévue le 10 septembre prochain. Aux États-Unis, en tout cas, cette nouvelle orientation aura pour principale conséquence un maintien des taux bas pour une longue période.

Sur les marchés, l’annonce est diversement appréciée. Wall Street a bien réagi jeudi à cette année. Mais ce vendredi, les marchés européens se montrent hésitants face à ces mesures qui risquent d’affaiblir le dollar par rapport à l’euro.