Le président russe, Vladimir Poutine, est le pionnier de la cyberguerre, qu’il a érigée au rang de priorité stratégique, entre cyberattaques et diffusion de fausses informations. (Photo: Shutterstock)

Le président russe, Vladimir Poutine, est le pionnier de la cyberguerre, qu’il a érigée au rang de priorité stratégique, entre cyberattaques et diffusion de fausses informations. (Photo: Shutterstock)

L’invasion de l’Ukraine s’accompagne d’une guerre de désinformation dans laquelle Moscou excelle depuis plus de 25 ans. Alors que Meta déploie Facebook Protect au Luxembourg ce mardi, l’européenne East Stratcom et la plaforme Edmo se battent. Les jeunes Luxembourgeois appellent à un meilleur contrôle.

Ne croyez pas que la Russie a découvert les «vertus» de la cyberguerre en 2022 contre l’Ukraine, ni même en 2016 ou en 2014 contre la Crimée: ce sont autant de fake news alimentées par ceux qui n’ont pas compris, en 1996, comment la Russie avait organisé l’opération Moonlight Maze. Celle-ci impliquait le vol d’une quantité massive d’informations classifiées de nombreux organismes gouvernementaux, dont le ministère de l’Énergie, la Nasa et le ministère de la Défense, ainsi que des sous-traitants de la défense et du secteur privé.

Ironie de l’histoire, en même temps qu’elle a continué à développer ses techniques de pillage des informations militaires et sensibles d’un côté et de sapement de l’opinion publique de l’autre, la Russie a présenté, deux ans plus tard – et tous les ans –, une résolution de l’Onu concernant «les développements dans le domaine de l’information et des télécommunications dans le contexte de la sécurité internationale» appelant à un examen multilatéral des menaces émergentes dans le domaine de la cybersécurité, la définition des notions de base liées à l’interférence non autorisée de l’information et des systèmes de télécommunication, et l’examen des principes internationaux pour aider à lutter contre la cybercriminalité et le terrorisme.

L’Ukraine, cible connue des fake news russes

Et tous les ans, les États-Unis ont voté contre… Il a fallu attendre 2016 pour que les agences américaines partagent leurs informations et que l’opinion publique découvre que, grâce à la connivence de Wikileaks, la Russie avait tenté d’interférer dans son élection présidentielle comme jamais auparavant. est un roman d’espionnage… qui a alors obligé Facebook à embrayer.

Souvent désignée comme le moulin qui a apporté l’eau à ces pratiques, la société de Mark Zuckerberg a entamé une étude et une purge de ses utilisateurs. En mai 2021 sort : citée une trentaine de fois, la Russie y est désignée comme le principal utilisateur du réseau social pour mener sa cyberguerre.

À ceux qui aimeraient avoir des exemples concrets, nous suggérons la lecture de «», de Graphika, qui pastiche le titre d’un célèbre James Bond. Cet ouvrage possède un autre intérêt: il décrit dans quel ordre le président russe, Vladimir Poutine, pourrait continuer ses opérations militaires en fonction de la dynamique des fake news dirigées contre un pays. Numéro un? L’Ukraine. Puis la Moldavie, les États baltes… puis l’Allemagne.

East Stratcom, arme européenne en plein essor

L’Ukraine avait directement compris le problème, dès 2014, lorsque des étudiants ont lancé , un site internet de débunking aujourd’hui largement contrôlé par  de l’Ukraine Crisis Media Center – parmi les sites mis «down» par les hackers russes.

Autre initiative, enregistrée à Amsterdam, à avoir gagné ses titres de noblesse dans l’art de ne pas laisser dire tout et n’importe quoi, de chercheurs, d’enquêteurs et de journalistes citoyens utilisant des sources ouvertes et des enquêtes sur les médias sociaux pour s’intéresser à une variété de sujets.

Depuis 2015, l’Union européenne a soutenu et financé un groupe d’une vingtaine d’experts de cette guérilla de la communication, , au budget annuel supérieur à 11 millions d’euros, pour remettre l’église orthodoxe au milieu du village. Leur site internet, , gagne chaque jour en visibilité, conséquence indirecte et manifeste de l’invasion. Pour eux aussi, les fake news contre l’Ukraine concentrent 40% des cas.

Facebook Protect au Luxembourg

Outre son radar désormais permanent, Facebook a entamé en décembre le déploiement de sa stratégie contre les fake news et l’influence, surtout dans le domaine politique. Cette semaine, le géant américain a confirmé avoir déployé au Luxembourg. Résumé simplement, il force la double authentification pour tous les gestionnaires de pages politiques sur le réseau social, afin de pouvoir assurer son propriétaire que personne ne peut usurper le compte ni y publier quoi que ce soit.

C’est aussi la fin de ces hommes politiques qui se lâchent sur les réseaux sociaux… avant d’assurer que leur compte a été hacké.

Mi-février, Meta France avait présenté son dispositif complet pour «protéger» l’intégrité des élections françaises, non seulement avec Facebook Protect, mais aussi avec son partenariat anti-fake news avec l’AFP, Les Décodeurs du Monde, 20 Minutes, Les Observateurs de France 24, son centre opérationnel virtuel de contrôle, ses campagnes d’information à destination de populations cibles ou encore son chatbot sur WhatsApp.

Moins menacé, le Luxembourg n’aura pas besoin de tout ce dispositif l’an prochain. Mais un European Digital Media Observatory for Belgium and Luxembourg (Edmo Belux), un pôle de recherche belge et luxembourgeois sur les médias numériques et la désinformation, a été lancé en cinq langues en octobre. . Ce groupe d’une centaine d’experts, et auquel se sont associés nos confrères de RTL, a pour ambition de procéder à 800 vérifications en 30 mois. 

Enfin, le travail de fond mené depuis des années par BEE Secure a trouvé une illustration, début février, dans. La désinformation, seulement cinquième préoccupation chez les 3-11 ans, devient numéro 2 chez les 12-16 ans et numéro 1 chez les 17-30 ans. Si la violence est omniprésente chez ces derniers, ils appellent à un contrôle plus strict et plus structuré des contenus pour éviter les fake news.