Yuriko Backes est, depuis septembre 2016, à la tête du Bureau de la représentation de la Commission européenne au Luxembourg. À quelques heures des élections, elle a partagé un petit-déjeuner avec la rédaction de Paperjam.

Si les élections européennes ont lieu dimanche, la Commission ne mène pas campagne. C’est ce qu’a précisé rapidement  lors du petit-déjeuner qu’elle a partagé avec la rédaction de Paperjam. À la tête du Bureau de la représentation de la Commission européenne au Luxembourg, sa mission, avec son équipe d’une dizaine de personnes, est d’informer au mieux les citoyens sur ce que la Commission propose et réalise.

Volet social et plan Juncker

Et les réalisations ne manquent pas. «Il y a notamment un important volet social, avec le socle européen des droits sociaux, qui doit être mis en pratique. Mais aussi le plan Juncker, qui s’est traduit par des investissements dans des entreprises luxembourgeoises. Le Luxembourg, ses citoyens et ses entreprises  profitent tous les jours de l’Europe», dit-elle. Cela même si, contrairement à une idée reçue, ce n’est pas toujours simple. «L’Europe a finalement les moyens que lui donnent les États membres. Le futur budget européen, on le voit bien, est un enjeu important. En réalité, l’Europe fait plein de choses avec des moyens assez limités.»

Elle a exposé le travail de l’équipe de Jean-Claude Juncker aux journalistes de Paperjam. (Photo: Patricia Pitsch/Maison Moderne)

Elle a exposé le travail de l’équipe de Jean-Claude Juncker aux journalistes de Paperjam. (Photo: Patricia Pitsch/Maison Moderne)

Dès lors, entendre que Bruxelles dicte et impose la ligne à suivre lui est insupportable. «Cela n’existe pas, c’est plus compliqué que cela», dit Yuriko Backes. Comme supporter le reproche d’une Commission très éloignée du citoyen. «La Commission n’a sans doute jamais été aussi présente sur le terrain. Les commissaires sont venus dans les pays, notamment au Luxembourg. On a multiplié les rencontres citoyennes (dialogues citoyens), demandé l’avis des Européens.»

Moi, je préfère une décision prise à 28. Quitte à ce que cela soit plus long.

Yuriko Backesreprésentante de la Commission européenne au Luxembourg

Évidemment, rien n’est parfait. Yuriko Backes en convient et souligne «que la construction européenne est permanente». Mais le chantier progresse parfois trop lentement aux yeux de certains. «Il ne faut pas laisser du temps au temps. Mais prendre des décisions rapidement, c’est le propre de dictatures. Que préférez-vous? Moi, je préfère une décision prise à 28, quitte à ce que cela soit plus long.»

Un autre reproche est que l’Europe n’est pas assez démocratique. «On a tout de même des traités!», commente Yuriko Backes. Qui juge cependant que des décisions prises à la majorité qualifiée pourraient être utiles. Mais pour cela, il faut changer ces traités, organiser des référendums, trouver un équilibre... 

Dimanche, les Européens voteront et la montée des partis populistes hante l’avant-scrutin. «Je suis politiquement neutre. Mais je ne vais pas dire que cela ne me concerne pas. L’après-élections va prendre du temps. Quelle coalition en sortira? Il reste des inconnues de taille, comme ce que fera La République en Marche, si Orban décidera de rester ou pas au sein du PPE...» Face aux populismes, ne faudrait-il pas l’émergence d’une grande figure telle que l’a été Jacques Delors? «Oui, sans doute. Une personnalité fédératrice, l’Europe le mérite.»

Le doute d’un nouvel élargissement dans les 5 ans

La prochaine Commission et les autres instances de l’Union auront en tout cas du pain sur la planche. «Il faudra mettre en œuvre le socle social européen. Mais il y aura aussi les dossiers environnementaux, l’Union économique et monétaire...», analyse Yuriko Backes, qui doute qu’un nouvel élargissement puisse avoir lieu au cours des cinq prochaines années. «Des pays sont occupés à faire des efforts en ce sens. Le jour où ils rempliront les critères, pourra-t-on leur dire non? Mais ce ne sera pas de suite.» Quant à la Turquie, «elle fait exception. Il se peut qu’Erdogan souhaite que la responsabilité de la non-intégration de son pays échoie à l’Europe, mais pas à lui. Et, de fait, il y a la question du respect des droits fondamentaux.»

Épanouie dans ses nouvelles fonctions, car plus en contact avec les gens, Yuriko Backes poursuivra sa promotion du travail de la Commission avec la même détermination. Car pour elle, l’avenir de l’Europe, ce sera plus d’Europe.