Karolina Pernar et Josep Fernandez Margalef sont actuellement en résidence à la Kulturfabrik. (Photo: Gilles Kayser)

Karolina Pernar et Josep Fernandez Margalef sont actuellement en résidence à la Kulturfabrik. (Photo: Gilles Kayser)

Karolina Pernar et Josep Fernandez Margalef sont les deux artistes invités à participer à la Squatfabrik de la Kulturfabrik. À la fin de la semaine, le vendredi 12 novembre, ils présenteront le résultat de leur résidence artistique, portant sur le sentiment de se sentir à la maison pour l’une et sur l’observation du territoire eschois pour l’autre.

Depuis le début de la pandémie, la Kulturfabrik s’est engagée aux côtés des artistes pour les soutenir et les accompagner dans leur processus de création. C’est ainsi que le centre culturel a lancé la résidence Squatfabrik, qui permet à un artiste résidant au Luxembourg et à un artiste étranger de profiter des espaces de travail et de création mis à disposition par la Kulturfabrik pendant quatre semaines. Pour cette édition, ce sont les artistes Karolina Pernar, qui vit à Luxembourg, et Josep Fernandez Margalef, originaire de Barcelone, qui ont pu profiter de cette proposition.

Karolina Pernar est d’origine croate et a vécu plus de 10 ans en Italie. Elle est aujourd’hui installée avec sa famille au Luxembourg. Ces déménagements successifs ont provoqué en elle une interrogation quant au sentiment d’appartenance à un territoire, de se sentir à la maison. Elle se pose alors la question suivante: Où est sa «maison»? Est-ce là où se trouvent ses ancêtres, sa famille? Là où elle se trouve actuellement?

«Pour essayer de répondre à ces questions qui sont universelles, mais que je me pose moi-même, j’ai interrogé différentes personnes que j’ai rencontrées à Esch ou que je connaissais dans mon entourage», explique Karolina Pernar. «Je leur ai demandé ce que c’était pour elles que de se sentir ‘à la maison’. Pour cela, elles m’ont raconté leur histoire personnelle et sélectionné des objets qui les représentent.» Ces interviews serviront aussi de base à une future installation sonore.

Le résultat de cette collecte est très divers: extrait d’acte de naissance, carte postale, morceaux de tissus, ticket de concert, ou bâton de rouge à lèvres… Une fois ces portraits chinois composés, l’artiste les prend en photo et imprime par la suite les photos. «Pour cette résidence, je voulais essayer une technique que je ne connaissais pas encore. Aussi, j’ai décidé de travailler avec de la pâte à papier.» Elle se sert des photos qu’elle découpe en petites lanières pour fabriquer sa pâte, qu’elle dispose ensuite sur de petites maisons en bois. «Ces petites constructions sont des répliques des maisons du Monopoly. J’ai choisi ce motif car, actuellement, le marché immobilier est devenu complètement fou au Luxembourg. Il se moque totalement des individus, des personnes qui travaillent et contribuent à la construction même de ces maisons. Tout est réduit au prix du mètre carré et à sa rentabilité. Et ceci nous ramène à la question initiale, si on considère son chez-soi comme étant un espace physique, une maison par exemple, avons-nous le droit d’en être propriétaire?»

Observer le territoire et en tirer ses caractéristiques

Josep Fernandez Margalef, lui, a une autre pratique. Il part de l’observation du territoire sur lequel il se trouve. Ne connaissant rien du tout du Luxembourg et d’Esch, il s’est, dans un premier temps, documenté pour comprendre le lieu qui l’accueille. «De cette phase d’observation, j’ai retenu des éléments saillants, qui, pour moi, caractérisent en partie ce territoire. J’ai retenu le rapport au patrimoine sidérurgique, qui marque à la fois le territoire physiquement et raconte l’histoire du pays, sa multiculturalité, et qui a fait sa richesse. Par ailleurs, j’ai été frappé par le nombre de personnes qui viennent de l’étranger pour vivre ici. C’est pourquoi j’ai choisi de travailler sur le motif de la grue, qui est un objet très présent dans le paysage luxembourgeois, qui est en fer et qui permet de construire le futur du pays.»

La grue est en effet un élément visuel marquant, «le contrepoint vertical des chemins de fer qui servaient autrefois à acheminer les minerais», précise l’artiste. Les grues sont composées d’éléments métalliques triangulaires qui sont une géométrie simple, un vocabulaire typiquement humain, reconnu pour son efficacité. Décontextualisés, ce sont des objets qui peuvent facilement devenir sculpturaux et infinis.

À côté de cela, il a retenu un autre élément du paysage eschois, à savoir son patrimoine naturel. «J’ai été marqué par les terres rouges. J’en ai ramassé un peu et j’ai fait des expériences de peinture avec cette matière. Quand elle est sèche, la terre ne marque pas, mais dès qu’on la mouille, elle prend des teintes rouge orangé vraiment intéressantes et qui marquent momentanément la surface qu’elle touche. Aussi, je souhaite réaliser des graffitis au pochoir sur des restes de structures en béton des lieux de production de la Minett.»

En parallèle à ces recherches, il poursuit aussi un travail personnel de création de cartes postales ou de posters des différentes villes qu’il fréquente et réalise des collages d’images d’éléments répétitifs repérés dans le paysage urbain. À Esch, Josep Fernandez Margalef est frappé par la présence de la couleur orange, que ce soit sur les camionnettes municipales, les gilets des travailleurs dans la rue, ou encore les éléments de signalétique urbaine. Cette même couleur orange qu’on retrouve sur les grues, ou dans les peintures faites à partir du sol des Terres Rouges. La boucle est bouclée.

Sortie de résidence, vendredi 12 novembre, 18h30-22h, à la