«La meilleure réponse à la crise sera la façon de diversifier son activité ou de la revoir en fonction de la nouvelle dynamique de son marché», indique Brice Lecoustey, associé chez EY Luxembourg. (Photo: Romain Gamba / archives Paperjam)

«La meilleure réponse à la crise sera la façon de diversifier son activité ou de la revoir en fonction de la nouvelle dynamique de son marché», indique Brice Lecoustey, associé chez EY Luxembourg. (Photo: Romain Gamba / archives Paperjam)

Pour investir, voire se réinventer, en temps de crise, mieux vaut disposer d’une trésorerie lisible et prévisionnelle. Encore faut-il que les entreprises se dotent des méthodes et des outils digitaux nécessaires pour voir «plus vite, plus clair», résume Brice Lecoustey (EY).

Optimiser la gestion de la trésorerie et prévoir son évolution. Voici la périlleuse équation à laquelle sont soumis les CFO durant cette crise qui a signifié, pour beaucoup, un arrêt soudain de l’activité de l’entreprise en raison des mesures de confinement. Mais l’équation n’est pas insoluble pour autant.

«En temps normal comme en temps de crise – mais avec dans ce cas des éléments qui prennent une importance supplémentaire –, il y a des fondamentaux à maîtriser», résume , associé chez EY Luxembourg, advisory services leader for the commercial and public sector et digital leader. 

1. Effectuer un «liquidity assessment»

«C’est ce que toutes les entreprises ont dû effectuer en premier lieu au moment de la crise, à savoir comprendre et quantifier leur position en cash à un moment donné.» Une opération pas évidente pour celles qui ne disposent pas d’une réconciliation des situations dans différentes entités, par exemple. «Les problèmes peuvent venir d’une non-sophistication des outils de gestion de trésorerie, mais aussi du manque d’intégration entre les différents types d’entités au sein d’une entreprise ou d’un groupe. Or, pour évoluer dans le contexte actuel, il faut faire en sorte que les choses puissent aller plus vite et qu’elles soient plus claires, en se dotant, par exemple, d’un feed quotidien ou d’outils pour automatiser les positions sous l’angle des banques», ajoute Brice Lecoustey.  

2. Projeter sa disponibilité et son besoin en cash

Autre prérequis: simuler et planifier la position en cash, estimer le besoin en financement futur et, par extension, la capacité en financement. «Disposer, là aussi, d’un outil automatisé ou une d’une capacité à consolider la position en cash avec une périodicité au minimum hebdomadaire est un impératif de bonne gestion de crise», indique Brice Lecoustey. «Cela doit conduire aux prévisions de rentrée et sortie, ainsi que du besoin en cash.» Une capacité à se projeter qui s’avère d’autant plus importante au sortir de la crise ou en phase de reprise, dans la perspective de l’analyse des risques financiers.

3. Disposer des bons outils.

«Travailler avec des outils anciens ou des tableurs de base devient complexe», pointe Brice Lecoustey. Pour aller plus vite, voir plus claire, il faut pouvoir vite réévaluer, avec l’automatisation et les outils digitaux qui permettent d’intégrer les différentes dimensions d’un groupe ou des partenaires.»

Une attention sur les coûts indirects

Une fois le diagnostic posé, quels sont les sous-jacents sur lesquels le CFO pourra agir pour optimiser sa trésorerie? La première réponse tient dans l’amélioration de la structure de coûts. «Il faut réfléchir au rapport entre les coûts et le bénéfice d’externaliser ou d’automatiser certaines tâches répétitives ou à faible valeur ajoutée pour réallouer du temps aux collaborateurs sur des tâches plus productives», cite Brice Lecoustey.

Autre élément à avoir sur le radar: les coûts indirects. «Un levier important se situe dans la bonne compréhension, le ‘benchmarking’ et l’optimisation – ce qui ne veut pas dire forcément tous les couper – de l’ensemble des coûts indirects», précise Brice Lecoustey. «Dans le cas d’une entreprise de production, par exemple, les coûts directs liés aux matières premières sont connus. Le levier existe au niveau des coûts indirects qui concernent l’énergie, le marketing, les consommables, le facility management, la technologie, l’immobilier et son entretien… Tous ces coûts indirects nécessiteront une revue d’ici l’été.»

Oser se réinventer

Le déconfinement étant acté, quelle sera la vitesse de redémarrage des acteurs économiques? La réponse se déclinera selon les secteurs, mais certains entrepreneurs semblent avoir mis à profit le confinement pour se réinventer.

«Je vois des entreprises qui se diversifient, qui ont profité des dernières semaines pour paramétrer leur outil industriel ou productif, revoir leur offre de services, augmenter l’usage des nouveaux canaux digitaux pour vendre et trouver de nouveaux clients», détaille Brice Lecoustey. «La meilleure réponse à la crise sera la façon de diversifier son activité ou de la revoir en fonction de la nouvelle dynamique de son marché.»

Reste la question de l’investissement qui sera consenti pour concrétiser cette remise en question. «La boucle est bouclée», pointe Brice Lecoustey puisque la connaissance de la situation de la trésorerie et la maîtrise des coûts sont primordiales pour évaluer la capacité à investir en sollicitant notamment des partenaires financiers.

Une concordance des paramètres qui aboutira, le cas échéant, sur de l’innovation et ouvrira la voie aux entreprises vers des chemins plus heureux.