Jean-Marc Kieffer reste confiant et optimiste quant à la reprise des chantiers après le lockdown.  (Photo: Nader Ghavami/archives Maison Moderne)

Jean-Marc Kieffer reste confiant et optimiste quant à la reprise des chantiers après le lockdown.  (Photo: Nader Ghavami/archives Maison Moderne)

Depuis un peu plus d’une semaine, le secteur de la construction a pu rouvrir ses chantiers. Une mesure bien accueillie de la part des professionnels, et une reprise qui s’est passée sans grand encombre. Témoignage de Jean-Marc Kieffer, administrateur délégué de CDCL.

Comment s’est passée la reprise depuis la réouverture des chantiers lundi 20 avril?

– «La réouverture des chantiers s’est bien passée d’une manière générale. Il n’y a pas eu de situation inconnue en revenant au travail. Les mesures mises en place ont permis de rassurer les équipes, qui sont revenues travailler en confiance. Nous avons eu le temps de réaliser les formations nécessaires et d’acquérir le matériel indispensable. Tout le monde est sensibilisé, et les gestes barrières sont acquis. Il y a toujours quelques personnes qui doivent rester à la maison pour raisons familiales ou parce que ce sont des personnes à risque, mais la plus grande partie des équipes est opérationnelle.

Ainsi, nous avons pu rouvrir environ 80% de nos chantiers. Les équipes administratives restent en télétravail, il n’y a toujours pas de réunion de chantier sur place, la vidéoconférence est toujours privilégiée, les déplacements inutiles sont bannis. C’est une réorganisation conséquente, mais qui se met en place. Quelques maîtres d’ouvrage n’ont toutefois pas encore souhaité rouvrir leur chantier, par mesure de précaution. Nous sommes en train d’adapter les différents plans, et c’est en cours de normalisation.

Rencontrez-vous des difficultés d’approvisionnement en matières premières?

«Nous n’avons pas de pénurie de matières premières pour le moment. C’est quelque chose que nous avions craint, mais je dois reconnaître que cela ne s’est pas vraiment passé. Nous rencontrons toutefois quelques difficultés pour des commandes spéciales, notamment en provenance de l’Italie. En tout cas, pour le moment, nous pouvons travailler. Par contre, il y a un creux au niveau administratif, qui est encore plus profond qu’avant. J’avais espéré que les retards pris avant la pandémie pourraient être rattrapés pendant la suspension des chantiers, mais c’est l’effet inverse qui se passe. Nous avons plusieurs signes indicateurs sur l’existence d’un trou décalé, qui sera encore un peu plus profond qu’avant le lockdown. Peut-être que les équipes de bureaux d’études et de planification ont eu du mal à être aussi efficaces à la maison qu’au bureau. Il y a eu aussi la suspension des permis de construire pendant quelque temps, avant que cela ne soit repris dans les Communes. Mais nous allons devoir faire face à cette situation, qui va engendrer des délais supplémentaires.

Avez-vous des surcoûts importants pour vos chantiers?

«Nous avons effectivement un surcoût sur les chantiers, notamment pour tout ce qui concerne l’achat de matériel de protection, qui est assez onéreux et dont nous avons besoin en grand nombre. Il y a aussi une perte de productivité sur les chantiers. Nous devons par exemple organiser différemment les camionnettes qui transportent nos ouvriers, faire plus de trajets pour les amener sur site, car nous devons mettre moins de monde dans une camionnette qu’en temps normal. Nous devons aussi organiser différemment les moments de pause, qui doivent être décalés pour éviter les rassemblements d’un trop grand nombre de personnes. Ces moments de déphasage sur chantier sont conjugués avec des moments de désinfection des postes de travail, ce qui demande un peu de temps. Il y a donc une perte de productivité, qui aura un impact sur les délais de livraison. Nous allons devoir rendre nos clients attentifs à cela.

Craignez-vous une crise systémique du secteur de l’immobilier?

«En ce qui concerne le secteur résidentiel, je suis confiant. Je pense que nous aurons une adaptation à faire, car les demandes vont un peu évoluer. Les futurs acquéreurs vont certainement se poser d’autres questions. Nous aurons sans doute une demande plus importante de balcons et d’espace pour installer un home office. Par contre, cela sera certainement plus compliqué pour l’immobilier de bureaux. Je ne pense pas que nous aurons encore beaucoup de construction à blanc, et les surfaces demandées risquent de diminuer.»