Seulement 20% des objectifs du Code du travail sont remplis en ce qui concerne l’emploi des personnes en situation de handicap. (Photo: Shutterstock )

Seulement 20% des objectifs du Code du travail sont remplis en ce qui concerne l’emploi des personnes en situation de handicap. (Photo: Shutterstock )

Au Luxembourg, près de 9.200 personnes étaient salariées handicapées en âge de travailler en 2016. Parmi elles, on dénombrait 1.780 salariés handicapés demandeurs d’emploi résidents disponibles représentant au total quelque 10% des inscrits à l’Adem (données 2016). Du reste, s’adjoignaient les demandeurs d’emploi non disponibles (en congé maladie de plus de 7 jours ou en congé maternité), les demandeurs d’emploi affectés à une mesure pour l’emploi ainsi que les personnes sans emploi non-inscrites à l’Adem. De plus, 3.400 salariés étaient en poste dont 60% dans les ateliers protégés ou le secteur public.

Or une application scrupuleuse du Code du travail (voir tableau) aboutirait à une situation bien différente. Ainsi, en respectant strictement les taux d’emploi obligatoires de salariés handicapés en fonction de la taille de l’entreprise, le nombre de salariés handicapés en emploi dans le secteur privé pourrait dépasser les 5.000 personnes. Aujourd’hui, 26% de l’obligation fixée par le Code du travail est donc remplie.


Sources: Code du travail, Statec, Eurostat, IGSS, calculs Idea

Dans les seules entreprises de plus de 50 salariés, qui représentent 3% du total des entreprises et emploient plus du tiers de la main-d’œuvre, le potentiel d’emploi de salariés handicapés est de plus de 4.200 personnes. Des données de l’IGSS nous apprennent que ces entreprises étaient très peu nombreuses à remplir les quotas fixés par le Code du travail en 2014 (10% des entreprises entre 50 et 299 salariés, aucune entreprise de plus de 300 salariés). À noter que le respect des quotas légaux semble poser autant de difficultés dans le secteur public.

Un «bilan emploi» fort maigre

Le «bilan emploi» découlant des obligations légales semble donc relativement maigre, interrogeant l’applicabilité et la pertinence même de ces quotas pour les entreprises. Mais le Code du travail précise aussi que cette obligation s’applique si l’Agence pour le développement de l’emploi (Adem) «se trouve saisie de demandes d’emploi en nombre suffisant émanant de salariés handicapés répondant à l’aptitude requise dans l’entreprise».

Le processus de recrutement apparaît relativement complexe: l’Adem doit d’abord identifier un demandeur d’emploi inscrit correspondant au profil recherché par l’entreprise puis l’inviter à contacter l’employeur. Quelle que soit sa décision, l’employeur doit motiver son choix auprès de l’Adem et, en cas de refus d’embaucher le nombre prescrit de salariés handicapés, verser chaque mois au Trésor public une taxe de compensation équivalant à 50% du salaire social minimum, aussi longtemps que dure le refus et pour chaque salarié handicapé non embauché.

En considérant que le salaire d’un salarié handicapé peut être pris en charge de 40 à 100% par l’État, y compris la part patronale des cotisations sociales, de même que les 6 jours de congé supplémentaire dont il bénéficie, les frais de transport, de formation et d’aménagement du poste de travail, il apparaît que l’aspect financier n’est pas la principale barrière à l’emploi des personnes en situation de handicap, interrogeant l’impact de ces politiques spécifiques.

Faible niveau d'éducation

Pour ces personnes, la question de l’adéquation des compétences aux besoins du marché du travail, donc des degrés d’employabilité, également en fonction du type de handicap (physique, mental, psychique, sensoriel), se pose avec d’autant plus d’acuité. Ainsi, les salariés handicapés inscrits à l’Adem sont en majorité des hommes (55%), âgés de plus de 45 ans (63%), chômeurs de longue date (90%) et avec un niveau d’éducation très faible (77% de niveau secondaire inférieur). Plus âgées et moins diplômées que le reste de la population active, ces personnes handicapées dénotent des «taux d’emploi» (37%) et de participation au marché du travail (56%) relativement faibles ainsi qu’un taux de chômage de 34%, 6 fois supérieur à la moyenne.

Cette brève analyse ne serait pas complète sans mention de quelques défis consubstantiels à la problématique du handicap en entreprise: diversité, égalité des chances, indépendance, inclusion sociale mais aussi équilibre financier de notre modèle social.

Face à ces constats éloquents, une conclusion s’impose: la «Charte commune pour promouvoir l’égalité des chances des personnes en situation de handicap sur le marché de l’emploi» (UEL-INDR-LCGB-OGBL) doit devenir réalité.