Même si la plate-forme promet une énorme base de jeunes clients à recruter, le rapport sur investissement de TikTok reste inférieur à celui d’autres réseaux sociaux comme Facebook ou Instagram. (Photo: Shutterstock)

Même si la plate-forme promet une énorme base de jeunes clients à recruter, le rapport sur investissement de TikTok reste inférieur à celui d’autres réseaux sociaux comme Facebook ou Instagram. (Photo: Shutterstock)

Brand content, challenges et mise en scène: le spécialiste des réseaux sociaux de l’agence Vanksen nous livre ses conseils pour réussir sa communication sur TikTok. Une stratégie qui ne vaut pas le coup pour toutes les entreprises.

Un jeune homme en T-shirt noir ouvre sa porte. Une main lui tend un passeport et lorsqu’il le récupère, il se transforme en pilote d’avion. Il jette le document en l’air. Nouveau plan, une femme buvant son café en sweat le rattrape en vol. Elle change aussitôt de look pour prendre l’apparence d’une hôtesse de l’air. À son tour, elle lance le passeport. Et ainsi de suite, pendant quelques minutes, avec en fond la musique «Don’t rush».

Un challenge populaire sur TikTok pendant le confinement, ici repris par l’entreprise Luxair (4.848 abonnés). Elle fait partie des rares sociétés luxembourgeoises à s’être lancées sur cette plate-forme née en septembre 2016. Les autres sont surtout des commerces ou salons de tatouage. Alors TikTok, une opportunité à saisir pour les entreprises?

«Nous n’avons recommandé à aucun de nos clients de se précipiter sur TikTok», répond, d’office, Joffrey Martin, directeur des médias sociaux dans l’agence de communication numérique Vanksen. «Bien sûr, vu le succès de la plate-forme, la question doit forcément se poser.» Elle a récemment dépassé le seuil de 2 milliards de téléchargements et de 800 millions d’utilisateurs actifs. Près de la moitié auraient entre 16 et 24 ans. «Un utilisateur actif se connecte une fois par mois. Mais je suis certain que la grande majorité de ceux qui l’utilisent entre 15 et 20 fois par jour sont les jeunes.» Alors si ce sont eux que vous visez, foncez… avec précaution.

Surfer sur les challenges

«On ne peut pas publier la même chose sur TikTok que sur Facebook ou Instagram.» Faire une publicité classique, pour annoncer un nouveau produit par exemple, pourrait donner l’impression d’être «un vieux qui veut se la jouer jeune». Un tel flop signalerait au client que la marque n’est pas faite pour lui.

Il faut plutôt se lancer dans une stratégie de brand content, par la création de contenus créatifs suivant les codes de la plate-forme: «des vidéos 100% verticales, toujours illustrées par du son».

Les challenges, comme des chorégraphies à reproduire, ont le vent en poupe sur la plate-forme. «Les employés peuvent ainsi se mettre en scène, pour humaniser la communication de l’entreprise», précise l’expert. Par exemple, leur demander de jongler avec le produit pour montrer qu’il est incassable et inviter les abonnés à faire pareil.

McDonald’s France fait figure de bon élève en «communication TikTok». Le groupe aux plus de 118.000 abonnés a par exemple filmé un employé qui semble, en arrière-plan, marcher sur une frite posée en premier plan comme un funambule. En suivant la même astuce, un hamburger se transforme facilement en trampoline, ou une boisson en punching-ball.

«On peut aussi opter pour la cocréation de contenus avec des influenceurs», poursuit Joffrey Martin. «Red Bull n’a par exemple même pas besoin de faire apparaître son produit sur ses vidéos. Le groupe met en valeur des sportifs phares qui véhiculent l’esprit de la marque.»

Stratégie de long terme

Il ne suffit pas de deux ou trois bonnes idées pour conquérir TikTok. «Il faut imaginer une stratégie pour animer la communauté au quotidien pendant au moins un an», conseille Joffrey Martin. «Avec un fil rouge de storytelling autour de l’entreprise, agrémenté de contenus liés à des événements, comme la Schueberfouer ou le marché de Noël. Mais toujours en rapport avec l’univers de l’entreprise.»

«Toutes les entreprises ne sont pas suffisamment matures, digitalement, pour TikTok», avertit cependant le spécialiste. Toutes ne sont pas non plus faites pour la plate-forme. «Une marque qui n’a pas d’univers profond risque de tourner en rond.» Il estime par exemple que certains des plus gros employeurs du pays comme Post ou les CFL auraient tout intérêt à s’y mettre. Alors que les banques et assurances devraient d’abord se concentrer sur Facebook, Twitter ou Linkedin.

Il déconseille à ceux qui ne se sentent pas prêts d’investir trop de temps et d’argent sur ce réseau social, car il rapporte encore peu par rapport à d’autres. «Facebook et Instagram ont bien réussi à monétiser leur audience. Pour l’instant, TikTok a su capter un grand nombre d’utilisateurs. La prochaine étape sera de convaincre les annonceurs», analyse-t-il. Sans parler de l’incertitude quant à l’avenir de la plate-forme si elle venait à être interdite sur le territoire américain, comme le demande Donald Trump. Comme pour Facebook, Joffrey Martin estime qu’il faudra encore deux ou trois ans pour que les entreprises apprivoisent vraiment le réseau.